La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/04/2015 | FRANCE | N°14NT00611

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 17 avril 2015, 14NT00611


Vu la requête, enregistrée le 10 mars 2014, présentée pour la société civile immobilière (SCI) EH, dont le siège est 3 allée de l'Ile Gloriette à Nantes (44000), représentée par son gérant, par Me Pineau avocat au barreau de Nantes ;

la SCI EH demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101900 du 2 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des deux décisions du 21 décembre 2010 du président de la communauté urbaine de Nantes lui retirant, pour le compte de l'Agence nationale de l'habitat, le

s deux subventions accordées le 11 mai 2010 pour des montants respectifs de 135 9...

Vu la requête, enregistrée le 10 mars 2014, présentée pour la société civile immobilière (SCI) EH, dont le siège est 3 allée de l'Ile Gloriette à Nantes (44000), représentée par son gérant, par Me Pineau avocat au barreau de Nantes ;

la SCI EH demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101900 du 2 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des deux décisions du 21 décembre 2010 du président de la communauté urbaine de Nantes lui retirant, pour le compte de l'Agence nationale de l'habitat, les deux subventions accordées le 11 mai 2010 pour des montants respectifs de 135 963 et 91 115 euros en vue de la réalisation de logements à loyer conventionné social et très social à Couëron, et imposant le reversement des sommes déjà perçues ;

2°) d'annuler ces décisions pour excès de pouvoir ;

3°) " de lui accorder le sursis à remboursement des sommes réclamées jusqu'à la notification de l'arrêt à intervenir " ;

4°) de mettre à la charge de l'Agence nationale de l'habitat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ; la formation de jugement était irrégulièrement composée ;

- l'auteur des décisions litigieuses n'avait pas compétence ;

- les travaux prévus ont été réalisés ;

- la facture de 300 785,73 € émise par la société Coach House a été réglée directement par M.D..., gérant de la SCI, sous forme d'avance en compte courant en raison de l'impossibilité pour la société Coach House d'encaisser des chèques ; la circonstance que M. D... n'était plus un associé de la SCI est à cet égard indifférente ;

- la société AID a été réglée par six virements bancaires à hauteur de 441 220 € ;

- le chantier ouvert en 2007 a été interrompu en 2009 en raison du retrait du permis de construire intervenu en décembre 2008, avant qu'un nouveau permis ne soit délivré en 2010 ; les entreprises concernées bénéficiaient d'une assurance de responsabilité décennale et en conséquence doivent être regardées comme des entreprises du bâtiment ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er décembre 2014, présenté pour l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), dont le siège est 8 avenue de l'Opéra à Paris (75001), représentée par son directeur, par Me Musso, avocat au barreau de Paris ;

l'Agence nationale de l'habitat conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la SCI EH une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que :

- la requérante n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations relatives à l'irrégularité du jugement attaqué ;

- le vice-président de la communauté urbaine signataire des décisions contestées bénéficiait d'une délégation régulière ;

- la société Coach House a produit le 16 janvier 2009 pour règlement par la SCI EH une facture de 300 785,73 €, alors que ses comptes bancaires avaient été clos le 16 septembre 2008, sa liquidation étant par ailleurs prononcée le 27 mai 2009 ; de plus, M.D..., gérant et non associé de la SCI EH, ne pouvait passer avec celle-ci de convention de compte courant pour régler des factures et n'établit pas en tout état de cause avoir réglé la facture émise par Coach House, laquelle n'a au demeurant effectué de travaux qu'à hauteur de 100 000 € ;

- la société AID, est une entreprise de transports routiers appartenant à M.D..., qui ne relève pas du secteur professionnel du bâtiment ; les attestations de garantie décennale produites pour tenter de justifier son appartenance à ce secteur sont pour l'une non datée et pour l'autre postérieure aux factures émises, l'attestation d'inscription au répertoire des métiers étant également postérieure ; en outre, il n'est pas établi que les six virements effectués par la SCI EH au profit de la société AID pour un montant total de 441 220 € correspondent au règlement de la facture de 356 456, 57 € émise par cette société ;

- M. D...est renvoyé devant le tribunal correctionnel pour escroquerie, faux et usage de faux en raison de ces opérations ;

- la demande de sursis à remboursement des sommes réclamées ne peut être accueillie ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 mars 2015, présenté pour la SCI EH, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens qu'elle développe ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu l'arrêté du 2 juillet 2010 portant approbation du règlement général de l'Agence nationale de l'habitat ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mars 2015 :

- le rapport de M. François, premier conseiller,

- les conclusions de M. Delesalle, rapporteur public

- et les observations de Me Pineau, avocat de la SCI EH et de MeA..., substituant Me Musso, avocat de l'Agence Nationale de l'Habitat ;

1. Considérant que la SCI EH relève appel du jugement du 2 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des deux décisions du 21 décembre 2010 du président de la communauté urbaine de Nantes lui retirant, pour le compte de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) les deux subventions accordées le 11 mai 2010 pour des montants respectifs de 135 963 et 91 115 euros en vue de la réalisation de logements à loyer conventionné social et très social à Couëron, et imposant le reversement des sommes déjà perçues ;

2. Considérant, d'une part, que le jugement attaqué qui énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde, est suffisamment motivé ; que par ailleurs, contrairement aux allégations du requérant, la formation de jugement n'était pas irrégulièrement composée ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R. 321-12 du code de la construction et de l'habitation : " I.- L'agence peut accorder des subventions : 1° Aux propriétaires (...) pour des logements qu'ils donnent à bail ou, dans des conditions fixées par le règlement général de l'agence, qu'ils mettent à disposition d'autrui et qui sont occupés dans les conditions prévues à l'article R. 321-20 (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 321-18 de ce code : " (...) La subvention est versée sur présentation des justificatifs précisés par le règlement général de l'agence, en particulier des factures des entreprises (...) " ; que selon les dispositions de l'article R. 321-21 de ce même code : " (...) Le retrait de l'aide versée par l'agence est prononcé et le reversement des sommes perçues exigé s'il s'avère que celle-ci a été obtenue à la suite de fausses déclarations ou de manoeuvres frauduleuses. (...) " ; que l'article R. 321-10-1 de ce code énonce que : " Lorsqu'une convention mentionnée à l'article L. 321-1-1 a été signée, le président (...) de l'établissement public de coopération intercommunale (...) 3° Décide du reversement et du retrait des subventions en application de l'article R. 321-21, après avis de la commission mentionnée au II de l'article R. 321-10 " ; que l'article 13 du règlement de l'Agence nationale de l'habitat dispose que : " Les travaux doivent être exécutés par des entreprises professionnelles du bâtiment inscrites au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers (...) Ces entreprises doivent être soumises aux règles de garantie légale. (...) " ;

4. Considérant que le 16 mars 2007, la SCI EH, dont M. E...D...est le gérant, a présenté à l'Agence nationale de l'habitat deux demandes de subvention pour la réalisation de douze logements locatifs conventionnés, dont quatre à caractère social et huit à caractère très social, dans des immeubles situés 46 rue Alexandre Olivier et 2 rue des Epinettes à Couëron ; qu'après un avis favorable de la commission locale de l'habitat, le président de la communauté urbaine Nantes métropole a, le 6 juillet 2007, octroyé à la SCI requérante par délégation de l'agence deux subventions de montants respectifs de 133 992 et 199 946 euros ; qu'au vu de l'avancement des travaux, une somme de 227 078 euros a été versée à la SCI EH ; qu'à la suite des vérifications diligentées dans le courant de l'été 2010 par la délégation locale de l'agence, le président de la communauté urbaine, sur le fondement des dispositions précitées de l'article R. 321-21 du code de la construction et de l'habitation, a, par les deux décisions contestées, retiré les subventions accordées à la SCI EH et imposé le reversement des sommes perçues au motif que la SCI avait effectué de fausses déclarations ; que pour justifier le retrait des subventions accordées, l'ANAH a relevé que la SCI EH ne justifiait pas avoir réglé les factures émises par les sociétés pour les travaux, et en outre que l'une d'entre elles n'était pas soumise aux règles de garantie légale lors de leur exécution ;

5. Considérant, en premier lieu, que la communauté urbaine Nantes Métropole est délégataire des compétences de l'agence ; que M. C...B..., vice-président de la communauté urbaine, a été désigné président de la commission locale de l'habitat par arrêté du 10 mai 2010 du président de la communauté urbaine régulièrement publié et, par arrêté du 21 juin 2010 régulièrement publié, a reçu délégation du président de la communauté urbaine pour signer tous actes relatifs aux " logements spécifiques et à l'amélioration de l'habitat " ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions litigieuses ne peut être accueilli ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que les moyens respectivement tirés de l'insuffisante motivation des décisions contestées et de ce qu'elles n'auraient pas été précédées de la procédure contradictoire prévue par l'article 24 de la loi susvisée du 12 avril 2000, que la SCI requérante renouvelle en appel sans apporter aucune précision nouvelle, doivent être écartés par adoption des mêmes motifs que ceux retenus par les premiers juges ;

7. Considérant, en troisième lieu, que la SCI EH n'établit pas s'être acquittée de la facture n° 0002009-019 d'un montant de 300 785,73 euros émise le 16 janvier 2009 par la société Coach House en se bornant à produire la photocopie de chèques libellés à l'ordre de cette société ; qu'elle ne peut par ailleurs utilement soutenir que son gérant aurait acquitté cette facture le 13 mai 2009 dans le cadre d'une convention de compte courant d'associé, dès lors que M. E...D...n'était plus associé de la SCI EH depuis le 10 mai 2007 ; qu'elle ne produit au demeurant aucun élément permettant de justifier de la réalité de ce versement alors qu'il ressort notamment de l'ordonnance du 3 septembre 2014 de la vice-présidente chargée de l'instruction du tribunal de grande instance de Nantes renvoyant M. E...D...devant le tribunal correctionnel pour escroquerie au préjudice de l'ANAH, que ce versement n'a jamais été effectué ;

8. Considérant que pour justifier s'être acquittée de la facture n° AJ 102010 d'un montant de 356 456,57 euros émise le 24 février 2010 par la société AID, dont M. E...D...est également le gérant, la SCI EH se borne à produire des relevés de compte faisant apparaître six versements au profit de cette société pour un montant total de 441 220 euros ; que cependant ces virements sont dépourvus de toute référence à cette facture ; qu'au surplus, la requérante n'apporte aucun élément de nature à établir que la société AID aurait émis une facture rectificative à hauteur de 441 220 euros ;

9. Considérant, enfin, qu'il résulte de l'instruction qu'en février 2010, quand elle est intervenue sur le chantier de Couëron, la société AID ne justifiait pas avoir souscrit une assurance de responsabilité décennale ; que les attestations relatives à la souscription de cette assurance, produites ultérieurement, sont pour l'une imprécise et non datée et pour l'autre assortie d'une prise d'effet en septembre 2010 ; que, dans ces conditions, en recourant à la société AID pour l'exécution de certains travaux, la SCI requérante n'a pas satisfait aux règles de garanties légales imposées par les dispositions précitées de l'article 13 du règlement de l'Agence nationale de l'habitat ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de faire droit alors à la demande de " sursis à remboursement des sommes réclamées " présentée par la requérante, que la SCI EH n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Agence nationale de l'habitat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à la SCI EH de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de la SCI EH une somme de 2 000 euros au titre des frais de même nature que l'Agence nationale de l'habitat a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SCI EH est rejetée.

Article 2 : La SCI EH versera à l'Agence nationale de l'habitat, une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière EH et à l'Agence nationale de l'habitat.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2015, où siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. Millet, président-assesseur,

- M. François, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 avril 2015.

Le rapporteur,

E. FRANÇOISLe président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 14NT00611


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT00611
Date de la décision : 17/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Eric FRANCOIS
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : CABINET HUC CONSEIL ASSISTANCE DEFENSE C.A.D.

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-04-17;14nt00611 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award