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03/04/2015 | FRANCE | N°13NT02084

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 03 avril 2015, 13NT02084


Vu la requête, enregistrée le 18 juillet 2013, présentée pour la commune de Saint-Luperce (28190), par Me Festivi, avocat, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103758 du 21 mai 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans, saisi de la demande présentée par M.B..., a annulé l'arrêté du 29 septembre 2011 par lequel le maire de Saint-Luperce a refusé de délivrer à M. B...un permis de construire modificatif ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif d'Orléans ;

3°) de mettre à la charge de M.

B...le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de j...

Vu la requête, enregistrée le 18 juillet 2013, présentée pour la commune de Saint-Luperce (28190), par Me Festivi, avocat, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103758 du 21 mai 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans, saisi de la demande présentée par M.B..., a annulé l'arrêté du 29 septembre 2011 par lequel le maire de Saint-Luperce a refusé de délivrer à M. B...un permis de construire modificatif ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif d'Orléans ;

3°) de mettre à la charge de M. B...le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- l'arrêté contesté est suffisamment motivé ;

- le maire n'a commis aucune erreur d'appréciation ;

- le corps de ferme présente une harmonie architecturale ;

- les travaux envisagés dépareillent l'architecture du centre de la commune ;

- cette dernière se caractérise par une homogénéité architecturale qu'il convient de préserver à tout prix ;

- la suppression des volets dénature la vue de l'ensemble ;

- l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme n'a, par suite, pas été méconnu ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2013, pour M. A...B...par Me Cruchaudet, avocat, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Luperce le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il fait valoir que :

- l'arrêté annulé par les premiers juges n'était pas suffisamment motivé ;

- le maire a commis une erreur d'appréciation ;

- il n'y a aucune atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux ;

- le village est sans intérêt architectural particulier ;

- les articles L. 111-6-2 et R. 111-50 du code de l'urbanisme s'opposaient à ce que le maire s'opposât au bardage de la façade au moyen de bois ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 novembre 213, présenté pour la commune de Saint-Luperce, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 ;

Vu le décret n° 2011-830 du 12 juillet 2011 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2015 :

- le rapport de M. Durup de Baleine, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;

1. Considérant que, le 13 octobre 2010, le maire de la commune de Saint-Luperce (Eure-et-Loir) a délivré à M. B...un permis de construire l'autorisant à transformer en deux logements une longère localisée sur un terrain sis 9 rue de l'Eglise ; que, le 1er juillet 2011,

M. B...a sollicité la délivrance un permis de construire modificatif à l'effet, d'une part et en façade ouest, de remplacer l'enduit à la chaux par un bardage en bois, de réaliser un bandeau en briques pour délimiter le bardage du soubassement conservé en enduit lissé, de supprimer les volets et de remplacer la marquise en métal et verre par un auvent en bois en console couvert en tuiles de terre cuite à l'identique de l'habitation et, d'autre part, de réaliser un mur de clôture en parpaing enduit à l'identique des enduits de l'habitation, surmonté d'un chaperon en briques, ce mur servant de séparation visuelle des deux logements sur une longueur de 2,31 mètres et une hauteur de 1,93 mètre ; que, par un arrêté du 29 septembre 2011, le maire a refusé la délivrance de ce permis de construire modificatif ; que la commune de Saint-Luperce relève appel du jugement du 21 mai 2013 par lequel, saisi de la demande présentée par M.B..., le tribunal administratif d'Orléans a annulé, pour excès de pouvoir, cet arrêté du 29 septembre 2011 ;

Sur la légalité de l'arrêté du 29 septembre 2011 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales " ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 111-6-2 du code de l'urbanisme, issu de l'article 12 de la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement et dans sa rédaction alors en vigueur : " Nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, le permis de construire ou d'aménager ou la décision prise sur une déclaration préalable ne peut s'opposer à l'utilisation de matériaux renouvelables ou de matériaux ou procédés de construction permettant d'éviter l'émission de gaz à effet de serre, à l'installation de dispositifs favorisant la retenue des eaux pluviales ou la production d'énergie renouvelable correspondant aux besoins de la consommation domestique des occupants de l'immeuble ou de la partie d'immeuble concernés. La liste des dispositifs, procédés de construction et matériaux concernés est fixée par voie réglementaire. Le présent alinéa ne fait pas obstacle à ce que le permis de construire ou d'aménager ou la décision prise sur une déclaration préalable comporte des prescriptions destinées à assurer la bonne intégration architecturale du projet dans le bâti existant et dans le milieu environnant. / Le premier alinéa n'est pas applicable dans un secteur sauvegardé, dans une zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager créée en application de l'article L. 642-1 du code du patrimoine, dans le périmètre de protection d'un immeuble classé ou inscrit au titre des monuments historiques défini par l'article L. 621-30-1 du même code, dans un site inscrit ou classé en application des articles L. 341-1 et L. 341-2 du code de l'environnement, à l'intérieur du coeur d'un parc national délimité en application de l'article L. 331-2 du même code, ni aux travaux portant sur un immeuble classé ou inscrit au titre des monuments historiques ou adossé à un immeuble classé, ou sur un immeuble protégé en application du 7° de l'article L. 123-1-5 du présent code. / (...) / A compter de la publication de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, toute règle nouvelle qui, à l'intérieur d'un des périmètres visés aux deux alinéas précédents, interdirait ou limiterait l'installation des dispositifs énumérés au premier alinéa fait l'objet d'une justification particulière. / Le premier alinéa est applicable six mois après la publication de la même loi " ; que l'article R. 111-50 du code de l'urbanisme, créé par le décret du 12 juillet 2011 pris pour l'application notamment de l'article L. 111-6-2 précité, prévoit, dans sa rédaction applicable en l'espèce, que, pour l'application de cet article, les dispositifs, matériaux ou procédés sont : " 1° Les matériaux d'isolation thermique des parois opaques des constructions et, notamment, le bois et les végétaux en façade ou en toiture ; / (...) " ;

4. Considérant que, pour refuser le permis de construire modificatif sollicité par M. B..., le maire a, sur le fondement de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, estimé que l'utilisation d'un bardage en bois en façade dénature la vue d'ensemble des longères mitoyennes et environnantes, porte atteinte à l'esthétique du lieu et ne s'intègre pas à l'ancien corps de ferme traditionnel ; que, si la commune fait état de ce que l'église et son enclos, le jardin et son mur sur la rue de l'église sont protégés au titre du 7° de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme par son plan local d'urbanisme approuvé le 20 mai 2011 et publié le 13 juillet 2011, alors d'ailleurs que l'arrêté du 29 septembre 2011 se borne à viser une carte communale approuvée le 20 décembre 2002 et révisée le 4 mai 2005, les travaux formant l'objet de la demande de permis modificatif rejetée par cet arrêté ne portent toutefois sur aucun des immeubles protégés à ce titre ; que, dès lors et en tout état de cause, la commune ne saurait se prévaloir des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 111-6-2 de ce code ; que les dispositions précitées des premier et quatrième alinéas de cet article, ainsi que celles de l'article R. 111-50 du même code, faisaient obstacle à ce que, sur le fondement de l'article R. 111-21 de ce code, le maire de Saint-Luperce s'opposât au recours au bois pour le bardage de la façade ouest de la construction ; que, dès lors, c'est à bon droit que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont décidé que l'arrêté du 29 septembre 2011 était intervenu en méconnaissance des articles L. 111-6-2 et R. 111-50 du code de l'urbanisme ;

5. Considérant, en second lieu, que, si le centre aggloméré de la commune de Saint-Luperce présente l'aspect général d'un village beauceron traditionnel, il ressort toutefois des pièces du dossier que les lieux avoisinants de la construction réaménagée par M.B..., constitués pour l'essentiel, outre des éléments de voirie, par des constructions d'habitation de diverses époques et leurs annexes ainsi que par l'église de la commune et ses dépendances, ne présentent pas, en dépit de l'intérêt qui s'attache à cette église et à son mur d'enceinte sur la rue de l'église, un caractère remarquable ; que l'impact visuel de la suppression des volets de quatre fenêtres, sur la seule façade ouest de la construction, n'est, sur les seuls abords immédiats de cette façade, que très limité et ne porte pas atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants ; qu'elle est, en particulier, dépourvue d'incidence sur l'intérêt de l'église communale comme sur les conditions de sa conservation ; que, dès lors, en estimant que les dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme s'opposent à cette suppression, le maire de Saint-Luperce a fait à une inexacte application de ce texte ;

6. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la commune de Saint-Luperce n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a annulé l'arrêté du 29 septembre 2011 ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de M.B..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande à ce titre la commune de Saint-Luperce ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de cette dernière le versement de la somme de 1 500 euros que demande M. B...au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Saint-Luperce est rejetée.

Article 2 : La commune de Saint-Luperce versera à M. B...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Luperce et à M. A...B....

Délibéré après l'audience du 13 mars 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Durup de Baleine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 avril 2015.

Le rapporteur,

A. DURUP de BALEINELe président,

H. LENOIR

Le greffier,

F. PERSEHAYE

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT02084
Date de la décision : 03/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Antoine DURUP de BALEINE
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : SCP GIBIER FESTIVI RIVIERRE GUEPIN

Origine de la décision
Date de l'import : 11/09/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-04-03;13nt02084 ?
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