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06/03/2015 | FRANCE | N°14NT01125

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 06 mars 2015, 14NT01125


Vu la requête, enregistrée le 28 avril 2014, présentée pour M. B... C..., demeurant..., par Me Dos Reis, avocat au barreau d'Orléans ; M. C... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 13-3413 du 11 février 2014 par lequel le tribunal administratif de d'Orléans a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 11 février 2013 du préfet du Loiret refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois, et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet d

u Loiret de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à la délivrance d'une...

Vu la requête, enregistrée le 28 avril 2014, présentée pour M. B... C..., demeurant..., par Me Dos Reis, avocat au barreau d'Orléans ; M. C... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 13-3413 du 11 février 2014 par lequel le tribunal administratif de d'Orléans a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 11 février 2013 du préfet du Loiret refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois, et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à la délivrance d'une carte de séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

il soutient que :

- le préfet devait saisir la commission du titre de séjour, compte tenu de la durée de son séjour en France ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle viole aussi les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du même code et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la mesure d'éloignement a été prise par une autorité incompétente ;

- elle est privée de base légale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi viole également les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 septembre 2014, présenté par le préfet du Loiret, qui conclut au rejet de la requête ;

il fait valoir que :

- M. C... n'établit pas qu'il résiderait habituellement en France depuis plus de dix ans et que la commission du titre de séjour devait être consultée ;

- il ne justifie d'aucun motif exceptionnel de nature à permettre la délivrance d'une carte de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision de refus de titre de séjour n'a pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code, et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le requérant n'établit pas encourir un risque personnel pour sa sécurité en cas de retour au Mali ;

Vu la décision du 28 mars 2014 du président du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes, accordant à M. C... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de d'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 février 2015 :

- le rapport de M. Pouget, premier conseiller ;

1. Considérant que M. C..., ressortissant malien, relève appel du jugement du 11 février 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet du Loiret du 11 février 2013 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire national dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans " ; que, pour l'application de ces dernières dispositions, la résidence habituelle s'entend d'un séjour permanent en France pendant une période continue d'au moins dix ans ;

3. Considérant, d'une part, que si M. C... déclare résider habituellement en France depuis près de vingt-six ans et produit de nombreux justificatifs attestant de sa présence sur le territoire national au cours de diverses périodes depuis 1987, il admet lui-même avoir dû quitter la France au moins à deux reprises en exécution de précédentes mesures d'éloignement, en 1992, puis en 2006 ; que ces interruptions dans son séjour ne permettent pas de regarder M. C..., qui déclare être entré une nouvelle fois irrégulièrement en France en 2006, comme justifiant, à la date de la décision litigieuse, d'une résidence habituelle depuis plus de dix ans sur le territoire national ; que le préfet n'était, dès lors, pas tenu de saisir la commission du titre de séjour ;

4. Considérant, d'autre part, qu'à titre de circonstances exceptionnelles, M. C... se prévaut de l'ancienneté et de la stabilité de ses séjours en France, et de ce que sa présence ne constitue pas une menace pour l'ordre public ; qu'en estimant que de telles circonstances ne suffisent pas à l'admettre au séjour à titre exceptionnel, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

5. Considérant, en second lieu, que l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) " ;

6. Considérant que M. C... soutient qu'au cours des vingt-six dernières années, qu'il a passées pour l'essentiel en France, où résident ses oncles, il y a tissé des liens personnels profonds et stables ; qu'il ne justifie toutefois pas de la réalité d'une insertion sociale particulièrement intense ; que le requérant, qui n'a pas de charges de famille en France, a déclaré dans la fiche de renseignements remplie par ses soins le 3 décembre 2012 avoir deux épouses au Mali, avant d'affirmer par la suite être divorcé ; qu'il conserve en toute hypothèse des attaches familiales dans son pays d'origine, où résident notamment ses cinq enfants, avec lesquels il n'établit pas n'avoir aucun contact ; que, par suite, le préfet du Loiret, en refusant de délivrer un titre de séjour à M. C..., n'a ni méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant, en premier lieu, que par un arrêté du 3 décembre 2012, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs, M. D... A..., préfet du Loiret, a donné délégation à M. Antoine Guérin, secrétaire général de la préfecture, aux fins de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports et correspondances relevant des attributions de l'Etat dans le département du Loiret, à l'exception des arrêtés portant élévation de conflit et des réquisitions de comptable public ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée manque en fait ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que M. C..., qui n'établit pas l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé, n'est par suite pas fondé à exciper d'une telle illégalité à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Loiret aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation qu'il a faite des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de l'intéressé, au regard en particulier des éléments de cette situation rappelés aux points 3 et 6 ci-dessus ;

10. Considérant, enfin, que M. C... ne peut utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire, qui ne fixe pas par elle-même le pays de renvoi ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

11. Considérant que l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dispose que " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " :

12. Considérant que si M. C... fait état de son implication politique passée au Mali et soutient avoir été recherché par les autorités de ce pays, il n'apporte aucun élément probant à l'appui de ses allégations, de nature à établir qu'il encourrait un risque personnel pour sa sécurité en cas de retour dans son pays d'origine ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que, par voie de conséquence de ce qui précède, les conclusions de M. C... tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Loiret de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et un titre de séjour, ainsi que ses conclusions relatives à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 3 février 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Millet, président,

- M. François, premier conseiller,

- M. Pouget, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 mars 2015.

Le rapporteur,

L. POUGETLe président,

JF. MILLET

Le greffier,

S. BOYÈRE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT01125


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01125
Date de la décision : 06/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MILLET
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : SELARL DA COSTA-DOS REIS-SILVA

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-03-06;14nt01125 ?
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