Vu la requête, enregistrée le 8 décembre 2013, présentée pour la SARL Transports GilbertA..., dont le siège est route de Carhaix à Châteauneuf du Faou (29520), représentée par son gérant en exercice, par Me Metais-Mouries, avocat au barreau de Saint-Brieuc ; la société des Transports Gilbert A...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 10-5435 du 7 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 30 novembre 2010 du préfet de la région Bretagne portant retrait temporaire de sa licence communautaire de transports et décidant la publication de cette sanction dans deux journaux régionaux ;
2°) d'annuler cette décision ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
elle soutient que :
- le jugement attaqué, qui ne répond pas au moyen tiré des irrégularités affectant l'enquête menée par le service des contrôles des transporteurs terrestres, est entaché d'une omission à statuer et est, par suite, irrégulier ;
- l'ensemble de la procédure est fondé sur un procès-verbal irrégulier ;
- la sanction litigieuse est intervenue au terme d'une procédure non contradictoire et qui n'a pas respecté les droits de la défense ;
- la sanction contestée est fondée sur des faits matériellement inexacts ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 août 2014, présenté par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie qui conclut au rejet de la requête ;
il soutient que :
- le tribunal administratif a répondu à l'ensemble des moyens soulevés par la société des Transports GilbertA... ;
- la circonstance que la décision contestée et l'avis de la commission régionale des sanctions administratives font référence par erreur à un procès-verbal du 30 juillet 2009 alors qu'il a été rédigé le 5 août 2009 est sans incidence sur la légalité de cette décision ;
- le principe du contradictoire et les droits de la défense ont été respectés dès lors que M. A... a été avisé du contrôle puis entendu par le contrôleur et qu'aucune disposition ne prévoit une obligation d'auditionner le contrevenant au cours du contrôle sur pièces effectué dans l'entreprise ;
- les faits sont matériellement établis et la relaxe prononcée par le tribunal correctionnel de Quimper ne concerne que la falsification de documents pour la période du 1er février au 18 mai 2009 à Châteauneuf du Faou ;
- la sanction est justifiée au regard des infractions relevées à l'encontre de la société ;
- elle ne présente aucun caractère disproportionné en raison du nombre des infractions constatées qui mettent en péril la sécurité des usagers de la route ;
Vu les mémoires, enregistrés le 22 janvier 2015, présentés pour la SARL Société des Transports GilbertA..., qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;
elle soutient en outre que la décision contestée méconnaît l'autorité de la chose jugée dès lors que la cour d'appel de Rennes a prononcé la relaxe intégrale et inconditionnelle de M. et Mme A... ;
Vu le mémoire, enregistré le 27 janvier 2015, présenté pour la SARL Société des Transports Gilbert A...;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 modifiée ;
Vu le décret n° 99-752 du 30 août 1999 modifié ;
Vu le code des transports ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 janvier 2015 :
- le rapport de Mme Gélard, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Giraud, rapporteur public ;
1. Considérant que la société des Transports GilbertA..., qui est titulaire d'une licence communautaire de transport de marchandises, a fait l'objet le 18 mai 2009 d'un contrôle portant sur la période du 28 février au 31 mars 2009 ; qu'à cette occasion le contrôleur du service du contrôle des transports terrestres de la direction régionale de l'équipement de Bretagne a relevé plusieurs infractions résultant du dépassement de la durée maximale de conduite journalière, de la réduction du repos journalier, de l'utilisation injustifiée de plusieurs feuilles d'enregistrement et de la falsification de documents ; qu'en dépit de l'avis de la commission régionale des sanctions administratives réunie le 17 septembre 2010, qui proposait de ne pas infliger de sanction à la société, le préfet de la région Bretagne a, par un arrêté du 30 novembre 2010, prononcé le retrait, pour une durée de 15 jours, de la licence de transport de l'entreprise et la publication de cette sanction dans deux journaux régionaux ; que la société des Transports Gilbert A...relève appel du jugement du 7 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que, dans sa demande introductive d'instance devant le tribunal administratif de Rennes, la société des Transports Gilbert A...a relevé que le procès-verbal de constatation des contraventions était daté du 5 août 2009 et non du 30 juillet 2009 comme indiqué dans la décision contestée, se bornant par ailleurs à mentionner que l'enquête menée par le service de contrôle des transports terrestres comportait des irrégularités ; que le tribunal administratif, en indiquant que la divergence de date concernant l'établissement du procès-verbal de contrôle résultait d'une simple erreur matérielle et que le procès-verbal comportait en annexe les pièces sur lesquelles il s'appuyait, et en estimant que M. A..., gérant de la société et conducteur du seul ensemble routier de l'entreprise, avait pu faire valoir ses observations au cours de la procédure, qui n'était pas entachée d'irrégularité, a répondu sans en omettre aux moyens de procédure soulevés par la société requérante ; que, par suite, celle-ci n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une omission à statuer et irrégulier pour ce motif ;
Sur la décision du 30 novembre 2010 :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 37 de la loi susvisée du 30 décembre 1982 dans sa rédaction alors en vigueur, désormais codifié à l'article L. 3452-1 du code des transports : " I. - Les autorisations et les copies conformes de la licence de transport intérieur ou de la licence communautaire prévues aux chapitres III et IV du titre II de la présente loi pourront faire l'objet d'un retrait, à titre temporaire ou définitif, en cas de constat d'infraction aux réglementations des transports, du travail, de l'hygiène ou de la sécurité constituant au moins une contravention de la cinquième classe ou d'infractions répétées constituant au moins des contraventions de la troisième classe. II. (...) Une publication dans les locaux de l'entreprise sanctionnée et par voie de presse de la sanction administrative prévue au présent article est effectuée (...) " ;
4. Considérant, en premier lieu, que la société des Transports Gilbert A...soutient que l'ensemble de la procédure est fondé sur un procès-verbal irrégulier ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que, si l'avis du 17 septembre 2010 de la commission régionale des sanctions administratives de Bretagne ainsi que l'arrêté préfectoral du 30 novembre 2010 font référence à un procès-verbal n° 035-2009-00255 du " 30/07/2009 ", le procès-verbal de constatation des contraventions concernant la société requérante, qui a été " fait et clos à Quimper le 5 août 2009 ", porte le même numéro 035-2009-00255 et mentionne de manière exacte les infractions sur lesquelles se sont prononcés tant la commission mentionnée ci-dessus que le préfet de la région Bretagne ; que, par suite, c'est à juste titre que les juges de première instance ont estimé que l'erreur purement matérielle commise par la commission régionale des sanctions administratives puis par le préfet de la région Bretagne était sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il n'est pas contesté que la société des Transports Gilbert A...a été informée par un courrier du 27 avril 2009 du contrôle dont elle allait faire l'objet et que Mme A..., qui est la titulaire du certificat de capacité professionnelle au transport routier de marchandises obtenu le 31 janvier 1992 dont bénéficie la société, s'est présentée comme la responsable de l'entreprise lors du contrôle réalisé le 18 mai 2009 ; que le procès-verbal de constatations des infractions précise que le contrôleur a adressé le 19 juin 2009 à Mme A..., par lettre recommandée, un relevé des infractions constatées en l'invitant à présenter ses observations ; que M. A... a été reçu le 31 août 2009 par le service chargé du contrôle ; qu'en sa qualité de gérant de la société, ce dernier a pu faire valoir sa défense le 17 septembre 2010 devant la commission régionale des sanctions administratives ; que, par suite, M. et Mme A... ont pu faire part de leurs observations à tout moment de la procédure avant que la décision contestée ne soit prise par le préfet de la région Bretagne ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire et des droits de la défense manque en fait et ne peut qu'être écarté ;
6. Considérant, en troisième lieu, que pour contester la matérialité des faits qui lui sont reprochés et qui ont justifié la sanction administrative litigieuse, la société des Transports Gilbert A...se prévaut du jugement du 14 novembre 2011 du tribunal de grande instance de Quimper relaxant M. et Mme A... des faits de falsification de documents ou de données électroniques de contrôle des conditions de travail en transport routier qui leur étaient reprochés ; que si les faits constatés par le juge pénal et qui commandent nécessairement le dispositif d'un jugement ayant acquis force de chose jugée s'imposent à l'administration comme au juge administratif, la même autorité ne saurait s'attacher aux motifs d'un jugement de relaxe tiré de ce que les faits reprochés à l'accusé ne sont pas établis ou qu'un doute subsiste sur leur réalité ; qu'il appartient, dans ce cas, à l'autorité administrative d'apprécier si la matérialité de ces faits est avérée et, dans l'affirmative, s'ils justifient l'application d'une sanction administrative ; que, par suite, la circonstance qu'une partie des faits constatés le 18 mai 2009 par le contrôleur des transports terrestres n'a donné lieu à aucune condamnation pénale, ainsi qu'en atteste l'arrêt de la cour d'appel de Rennes du 16 janvier 2014, est sans incidence sur la légalité de la décision contestée, qui, contrairement à ce que soutient la société requérante, ne méconnaît pas l'autorité de la chose jugée ;
7. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort notamment du procès-verbal de constatation des infractions établi à Quimper le 5 août 2009 par le contrôleur principal des transports terrestres que les contraventions constatées lors du contrôle ont été confirmées par la confrontation entre les documents fournis par Mme A... lors du contrôle de la société et ceux obtenus auprès de la société Perrin Pichon (PPOuest), qui avait recours aux services de la société A...pour le transport de ses marchandises, ainsi que par les fournisseurs en gasoil de la société requérante ; que si cette dernière soutient que le service de contrôle n'a pas pris en compte les 28 disques fournis et en a refusé 4 qui comprenaient de nombreux temps de repos, il est constant que ces 4 disques litigieux n'ont pas été immédiatement fournis au contrôleur le 18 mai 2009 mais seulement le 31 août 2009 lors de l'entretien sollicité par M. A... et que leur valeur probante était sujette à caution ; que, par ailleurs, si la méthode retenue par le contrôleur consistant à superposer deux disques est critiquée par la société des Transports GilbertA..., elle n'a pas été remise en cause par les membres de la commission régionale des sanctions administratives de Bretagne, laquelle comprend des professionnels du transport routier ; que les allégations de la société requérante selon lesquelles M. A..., seul chauffeur, aurait pris ses périodes de repos à Perpignan dans son camion couchette du 3 au 4 mars, du 10 au 11 mars, du 17 au 18 mars et du 24 au 25 mars ne sont corroborées par aucune pièce probante alors qu'au contraire les justificatifs produits par les sociétés avec lesquelles travaillait l'entreprise ont permis de confirmer les constatations du contrôleur et que l'utilisation de deux disques d'enregistrement par jour constitue une pratique de fraude connue dans la profession ; qu'enfin la commission régionale des sanctions administratives, si elle a émis l'avis de ne pas sanctionner la société en estimant qu'il lui était possible de se mettre en conformité avec les règlementations en vigueur tout en assurant les mêmes prestations, n'a pas remis en cause les infractions constatées et a précisé que la pratique de M. A... ne pouvait être admise ; qu'il suit de là que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la matérialité des faits ayant justifié la sanction litigieuse, qui au demeurant se limitait à un retrait de 15 jours de sa licence de transport et ne présentait aucun caractère disproportionné compte tenu tant de la gravité des faits que de leur répétition, ne serait pas établie ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société des Transports Gilbert A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la société des Transports Gilbert A...de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Transports Gilbert A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Transports Gilbert A...et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
Délibéré après l'audience du 29 janvier 2015, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- Mme Gélard, premier conseiller,
- M. Lemoine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 février 2015.
Le rapporteur,
V. GÉLARDLe président,
I. PERROT
Le greffier,
M. B...
La République mande et ordonne au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 13NT03309