Vu la requête, enregistrée le 27 mai 2014, présentée pour M. A... B..., demeurant au..., par Me Leccia, avocat au barreau de Tours ; M. B... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1302645 du 13 février 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 septembre 2013 du préfet d'Indre-et-Loire portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le Mali ou tout autre pays où il est légalement admissible comme pays de destination ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet d'Indre-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat de la somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, moyennant la renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
il soutient que :
- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de
l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il participe à l'entretien et à l'éducation de son enfant de nationalité française ;
- cet arrêté méconnaît, également, les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu la mise en demeure adressée le 25 août 2014 au préfet d'Indre-et-Loire, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2014, présenté par le préfet d'Indre-et-Loire qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que les moyens invoqués par M. B... ne sont pas fondés ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 18 septembre 2014, présenté pour M. B... qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens qu'il développe;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 janvier 2015, présenté par le préfet d'Indre-et-Loire conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire en défense par les mêmes motifs qu'il développe ;
Vu la décision du 29 avril 2014 de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes accordant le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code civil ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le 20 janvier 2015 :
- le rapport de Mme Buffet, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Delesalle, rapporteur public ;
1. Considérant que M. B... relève appel du jugement du 13 février 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 septembre 2013 du préfet d'Indre-et-Loire portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le Mali ou tout autre pays où il est légalement admissible comme pays de destination ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. " ; qu'aux termes de l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. Cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l'enfant est majeur " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B... est le père d'un enfant français né le 26 décembre 2011 de son union avec une ressortissante française dont il est séparé depuis le 26 mars 2012 ; que, par une ordonnance de non conciliation du 7 décembre 2012, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Tours a accordé à M. B... l'autorité parentale conjointe sur son enfant ainsi qu'un droit de visite dans les locaux de l'association " Le Dialogue Familial", l'intéressé résidant dans un foyer de jeunes travailleurs, et a mis à sa charge le versement d'une pension alimentaire au titre de sa contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant ; qu'en application de cette ordonnance, un protocole a été mis en place pour permettre l'exercice par l'intéressé de son droit de visite ; que le " compte rendu de droit de visite " établi par l'association " Le Dialogue Familial ", versé au dossier, précise que M. B... a rencontré sa fille à douze reprises entre le 18 mai et le 7 décembre 2013 ; que si M. B..., dont il n'est pas contesté qu'il a versé, en 2012, plusieurs participations financières en vue de l'entretien et de l'éducation de son enfant, ne s'est plus acquitté du versement de la pension alimentaire à compter du mois de janvier 2013, il ressort des écritures mêmes du préfet qu'il a cessé de percevoir tout revenu en février 2013, raison pour laquelle le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Tours l'a, d'ailleurs, par une ordonnance du 12 décembre 2013, dispensé de son versement ; que, par suite, en refusant le titre de séjour sollicité par M. B... au seul motif qu'il ne pouvait être regardé comme contribuant effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant dès lors qu'il ne s'acquittait plus du versement de la pension alimentaire mise à sa charge et avait présenté au juge des affaires familiales une requête en vue de se voir dispensé de ce versement, le préfet d'Indre-et-Loire a méconnu les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;
6. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement, eu égard à ses motifs, la délivrance du titre de séjour sollicité par M.B... ; qu'il ne ressort pas de l'instruction qu'à la date du présent arrêt des éléments de droit ou de fait nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose à la demande de M. B...une nouvelle décision de refus ; qu' il y a lieu, dès lors, d'enjoindre au préfet d'Indre-et-Loire de délivrer à l'intéressé une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761 1 du code de justice administrative :
7. Considérant que M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Leccia, avocat de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au profit de cet avocat, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 13 février 2014 du tribunal administratif d'Orléans et l'arrêté du 5 septembre 2013 du préfet d'Indre-et-Loire portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le Mali ou tout autre pays où M. B... est légalement admissible comme pays de destination sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet d'Indre-et-Loire de délivrer à M. B..., une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 2 000 euros (deux mille euros) à Me Leccia, avocat de M. B..., en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761 1 du code de justice administrative, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera adressée au préfet d'Indre-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 20 janvier 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M. François, premier conseiller,
- Mme Buffet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 février 2015.
Le rapporteur,
C. BUFFET Le président,
A. PÉREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT01405 2
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