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10/02/2015 | FRANCE | N°14NT02952

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 10 février 2015, 14NT02952


Vu la requête, enregistrée le 21 novembre 2014, présentée pour la société d'intérêt collectif agricole (SICA) Conserves du Blaisois, dont le siège se situe 7, rue Nicolas Appert, ZI, à Contres (41700), représentée par son directeur général délégué, par Me Rey, avocat au barreau de Blois; la société Conserves du Blaisois demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1402485 du 25 septembre 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 28 avril 2014 du directeur régional des entreprises, de la

concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Centre ...

Vu la requête, enregistrée le 21 novembre 2014, présentée pour la société d'intérêt collectif agricole (SICA) Conserves du Blaisois, dont le siège se situe 7, rue Nicolas Appert, ZI, à Contres (41700), représentée par son directeur général délégué, par Me Rey, avocat au barreau de Blois; la société Conserves du Blaisois demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1402485 du 25 septembre 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 28 avril 2014 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Centre portant refus d'homologation du document unilatéral constituant le plan de sauvegarde de l'emploi de cette société ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) d'homologuer ce document unilatéral, à défaut, de demander à l'administration de procéder à une nouvelle instruction de sa demande d'homologation " en tenant compte de l'autorité de la chose jugée " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- le tribunal administratif d'Orléans n'a pas procédé à la vérification du caractère proportionné des mesures prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi au regard des moyens du groupe Cecab auquel elle appartient ;

- la décision contestée est entachée d'un défaut de motivation et méconnaît donc les dispositions de l'article L. 1233-57-4 du code du travail ; le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi n'indique pas, notamment, avoir vérifié les moyens dont disposait le groupe auquel elle appartient pour apprécier le caractère proportionné du plan de sauvegarde de l'emploi ; il n'a procédé à aucune appréciation au regard des moyens du groupe Cecab et n'a visé que les moyens de l'entreprise ; il appartenait à l'administration d'indiquer et de caractériser l'insuffisance du projet ; le directeur régional n'a pas précisé l'état de l'emploi dans le département du Loir-et-Cher, ni le montant des aides à la création d'entreprise proposées, dans ce département, par les autres plans de sauvegarde de l'emploi ;

- le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ne pouvait refuser l'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi en invoquant des motifs non formulés préalablement, lors de la transmission de ses avis et observations sur le projet de plan ; ces motifs n'ayant pas été portés à la connaissance de l'entreprise, le directeur régional devait être regardé comme ayant renoncé à les lui opposer de sorte qu'ils ne pouvaient servir de fondement à la décision de refus d'homologation ; l'instruction du 19 juillet 2013 précise que le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi doit faire preuve d'une implication précoce de nature à permettre le dialogue social ; le dispositif d'avis et d'observations mis en place par la loi de sécurisation de l'emploi est destiné à éviter cette situation ;

- dans sa décision, le directeur régional ne s'est pas livré à une appréciation globale des mesures prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi ; compte tenu de la qualité du plan, il ne pouvait se borner à relever les prétendues insuffisances de quatre mesures prises isolément ; l'instruction du 19 juillet 2013 rappelle que la décision d'homologation doit reposer sur une appréciation globale du projet de licenciement ; les salariés dont le licenciement est envisagé, qui ont refusé la modification de leur contrat de travail pour motif économique et occupaient précédemment un poste au sein de la société Maingourd à la Chapelle-Saint-Mesmin, se voient proposer 47 postes au titre du reclassement dans cette dernière société, outre 18 postes au sein de la société Conserves du blaisois, et un total de 572 postes au sein du groupe ;

- le directeur régional a commis plusieurs erreurs dans l'appréciation des mesures proposées par le plan de sauvegarde de l'emploi ; les mesures relatives au différentiel de rémunération, qui ne sont susceptibles de concerner que deux salariés, et à l'exclusion du bénéfice de l'indemnité de mobilité interne sont justifiées ; elles ne présentent pas un caractère discriminatoire et n'entrent pas dans le champ d'application de l'article L. 1132-1 du code du travail; elles visent à éviter la création d'un effet d'aubaine de la part des salariés qui ont refusé le dispositif de redéploiement initialement proposé sur le site de la société Maingourd à la Chapelle-Saint-Mesmin ; elle vise également à éviter une situation inéquitable entre les anciens salariés de la société Maingourg ; ces mesures ont été validées par le comité d'entreprise ; la durée de 9 mois du congé de reclassement n'est pas insuffisante ; les comparaisons avec la durée de 12 mois prévue pour le site de Val d'Aucy ou encore avec la durée du contrat de sécurisation professionnelle ne sont pas pertinentes ; s'agissant des aides à la formation, la mutualisation de l'enveloppe des formations a été portée à 3 500 euros à la suite des observations de la direction régionale, et non d'ailleurs à 3 000 euros, et a reçu l'avis favorable du comité d'entreprise ; il n'a pas été tenu compte du niveau des actions de formation mises en oeuvre dans les mois précédant le projet de licenciement collectif et de l'engagement général de l'employeur dans ce domaine ; le montant de 5 000 euros proposé pour les aides à la création ou à la reprise d'une entreprise, qui a été validé par le comité d'entreprise, n'est pas insuffisant ; il s'accompagne d'un soutien technique apporté par un consultant spécialisé ; au total, l'aide de l'employeur à ce titre s'élève à 8 500 euros ;

- aucune insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi n'avait été relevée lors du précédent plan de sauvegarde de l'emploi établi en 2013, qui contient pourtant des mesures identiques et même d'un niveau inférieur, et qui a été validé par une ordonnance du 23 juillet 2013 du tribunal de grande instance de Blois ;

- les mesures prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi sont proportionnées aux moyens du groupe auquel elle appartient ; le directeur régional n'a pas procédé à cette vérification alors qu'il s'agit d'une obligation légale ; ni la société, ni le secteur d'activité, ni le groupe ne disposent de moyens suffisants pour compléter les mesures d'accompagnement et de reclassement proposées ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance du 12 décembre 2014 du président de la 2ème chambre, prise en application des articles R. 611-11 et R. 611-18 du code de justice administrative, fixant la clôture d'instruction au 12 janvier 2014 à 12 heures ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 décembre 2014, présenté par le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que les moyens invoqués par la société Conserves du Blaisois ne sont pas fondés ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 12 janvier 2014, présenté pour la société Conserves du Blaisois, devenue société D'Aucy Long Life Logistic, qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens qu'elle développe ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Buffet, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Delesalle, rapporteur public ;

- et les observations de Me Rey, avocat de la société D'Aucy Long Life Logistic ;

1. Considérant que la société Conserves du Blaisois, devenue société D'Aucy Long Life Logistic, relève appel du jugement du 25 septembre 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 28 avril 2014 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Centre portant refus d'homologation de l'acte unilatéral, élaboré en application des dispositions de l'article L. 1233-24-4 du code du travail, constituant le plan de sauvegarde de l'emploi de cette société ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs des premiers juges, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision contestée que la société Conserves du Blaisois réitère en appel sans apporter de précisions nouvelles ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 1233-24-1 du code du travail : " Dans les entreprises de cinquante salariés et plus, un accord collectif peut déterminer le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63 ainsi que les modalités de consultation du comité d'entreprise et de mise en oeuvre des licenciements. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-24-4 de ce code : " A défaut d'accord mentionné à l'article L. 1233-24-1, un document élaboré par l'employeur après la dernière réunion du comité d'entreprise fixe le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi et précise les éléments prévus aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, dans le cadre des dispositions légales et conventionnelles en vigueur. " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-57 de ce code : " L'autorité administrative peut présenter toute proposition pour compléter ou modifier le plan de sauvegarde de l'emploi, en tenant compte de la situation économique de l'entreprise. / Ces propositions sont formulées avant la dernière réunion du comité d'entreprise. Elles sont communiquées à l'employeur et au comité d'entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel. L'employeur adresse une réponse motivée à l'autorité administrative (...) ; qu'aux termes de l'article L. 1233-57-6 de ce code : " L'administration peut, à tout moment en cours de procédure, faire toute observation ou proposition à l'employeur concernant le déroulement de la procédure ou les mesures sociales prévues à l'article L. 1233-32 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-57-3 de ce code : " En l'absence d'accord collectif (...), l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise et, le cas échéant, du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et de l'instance de coordination mentionnée à l'article L. 4616-1, et le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe ; / 2° Les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement ; / 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1. / (...) Elle s'assure que l'employeur a prévu le recours au contrat de sécurisation professionnelle mentionné à l'article L. 1233-65 ou la mise en place du congé de reclassement mentionné à l'article L. 1233-71. " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-61 de ce code : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. Ce plan intègre un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile. " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-62 de ce code : " Le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit des mesures telles que : 1° Des actions en vue du reclassement interne des salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d'emplois ou équivalents à ceux qu'ils occupent ou, sous réserve de l'accord exprès des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure ; 2° Des créations d'activités nouvelles par l'entreprise ; 3° Des actions favorisant le reclassement externe à l'entreprise, notamment par le soutien à la réactivation du bassin d'emploi ; 4° Des actions de soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités existantes par les salariés ; 5° Des actions de formation, de validation des acquis de l'expérience ou de reconversion de nature à faciliter le reclassement interne ou externe des salariés sur des emplois équivalents ; 6° Des mesures de réduction ou d'aménagement du temps de travail ainsi que des mesures de réduction du volume des heures supplémentaires réalisées de manière régulière lorsque ce volume montre que l'organisation du travail de l'entreprise est établie sur la base d'une durée collective manifestement supérieure à trente-cinq heures hebdomadaires ou 1 600 heures par an et que sa réduction pourrait préserver tout ou partie des emplois dont la suppression est envisagée. " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-4 de ce code : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient. (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative chargée d'homologuer le document élaboré par l'employeur en application des dispositions de l'article L. 1233-24-4 du code du travail, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les mesures prévues par les dispositions des articles L. 1233-61 et L. 1233-62 du code du travail, contenues dans le plan de sauvegarde de l'emploi, sont de nature à éviter les licenciements ou à en limiter le nombre et, notamment, de s'assurer qu'elles facilitent le reclassement des salariés intéressés dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel elle appartient et que les efforts de formation et d'adaptation présentent un caractère suffisant ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société Conserves du Blaisois, implantée à Contres dans le Loir-et-Cher, comptait au 31 décembre 2013, 76 salariés et exerçait une activité de transformation et de mise en conserve de légumes et d'aliments pour animaux ; que cette société appartient au groupe agroalimentaire Cecab qui comprend 10 autres entreprises parmi lesquelles la société Maingourd implantée à La-Chapelle-Saint-Mesmin, dans le Loiret, distante de 70 km environ de la société Conserves du Blaisois ; que le groupe Cecab a entrepris, en 2012, de réorganiser ses activités, notamment, de spécialiser l'activité de ses différents sites de production ; qu'à la suite de cette réorganisation, la société Conserves du Blaisois a cessé, en janvier 2013, son activité de fabrication de conserves de légumes et d'aliments pour animaux, activité désormais exercée par la société Maingourd, cette dernière lui cédant en contrepartie son activité de conditionnement et de logistique ; que les salariés occupant, dans la société Maingourd, les emplois correspondant à cette activité se sont vu proposer, sur place, des postes dits de " redéploiement interne " ; que 14 salariés ayant refusé ces propositions, leurs contrats de travail ont été transférés à la société Conserves du Blaisois ; que 11 d'entre eux ont refusé la modification de leur contrat relative au changement de lieu de travail ; qu'une procédure de licenciement collectif pour motif économique a alors été engagée par la société Conserves du Blaisois ; que, par la décision contestée, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Centre a refusé d'homologuer l'acte unilatéral, élaboré en application des dispositions de l'article L. 1233-24-4 du code du travail, constituant le plan de sauvegarde de l'emploi de cette société ; que cette décision de refus est fondée, d'une part, sur ce que les mesures sociales du plan de sauvegarde de l'emploi relatives aux modalités de compensation des baisses de rémunération et à l'indemnité d'incitation à la mobilité interne sont de nature à compromettre les possibilités de reclassement interne des salariés concernés, d'autre part, sur les insuffisances de ce plan en matière de reclassement externe, s'agissant du congé de reclassement, des aides à la formation, et des aides à la création ou à la reprise d'entreprise ;

6. Considérant que le plan de sauvegarde de l'emploi présenté par la société Conserves du Blaisois prévoit, en cas de reclassement à l'intérieur du groupe Cecab " hors poste déjà proposé au salarié par la société Maingourd " au titre du " redéploiement interne " mentionné au point 5, pour les salariés reclassés dans la même catégorie, le maintien de leur salaire pendant 24 mois puis le versement d'une indemnité destinée à compenser le différentiel de rémunération dans la limite de 150 euros pendant un an, et pour les salariés reclassés dans une catégorie inférieure, le versement d'une indemnité différentielle de rémunération pendant 36 mois, plafonnée respectivement, sur chacune des trois années, à 450 euros, 300 euros puis 150 euros mensuels ; que, toutefois, le plan prévoit qu'en cas d'acceptation d'un reclassement sur un poste antérieurement proposé par la société Maingourd dans le cadre du " redéploiement interne ", cette indemnité sera limitée à 100 euros mensuels ; que ce plan prévoit, également, que sont exclus du bénéfice de l'indemnité, d'un montant compris entre 1 500 et 2 000 euros, d'incitation à la mobilité interne qu'il propose, les salariés dont le contrat de travail a été transféré à la société Conserves du Blaisois qui accepteraient une proposition de reclassement au sein de la société Maingourd ; que ces mesures qui sont de nature à limiter fortement les possibilités de reclassement interne dans la société Maingourd dont le site est le plus proche et le plus attractif, sont contraires à l'objectif fixé par les dispositions de l'article L. 1233-61 du code du travail qui vise à éviter les licenciements ou en limiter le nombre, alors même que le plan proposé par la société comporterait, par ailleurs, d'autres mesures, au demeurant, pour certaines d'entre elles, imposées par les dispositions de l'article L. 1233-62 précité, dont elle soutient qu'elles seraient exemptes de toute critique ; qu'elle ne saurait, pour justifier ces mesures, se fonder sur ce que les salariés concernés par le plan de sauvegarde de l'emploi ont déjà refusé les postes qui leur étaient proposés dans le cadre de l'opération de redéploiement interne menée dans la société Maingourd, dès lors que cette opération est distincte de la procédure de licenciement collectif objet du présent litige ; que la société requérante ne peut, par ailleurs, utilement invoquer l'article L. 1132-1 du code du travail relatif au principe de non-discrimination sur lequel la décision contestée n'est pas fondée ;

7. Considérant que le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit, également, s'agissant des mesures destinées à faciliter le reclassement externe, un congé de reclassement d'une durée de 9 mois, des aides à la formation comprises entre 2 500 et 4 500 euros, majorées de 500 euros dans certains cas particuliers, et des aides à la création ou à la reprise d'entreprise de 5 000 euros ; que la société requérante n'apporte pas d'éléments permettant d'établir que ces dispositifs seraient suffisants alors que le ministre fait valoir que des mesures plus avantageuses ont été prises dans d'autres sites du groupe, que le coût réel des actions de formation est supérieur au montant des aides accordées et qu'il n'est pas contesté que certains des salariés concernés ne disposent pas d'une qualification professionnelle suffisante ; que si la société requérante soutient que la décision contestée ne prend pas en compte " l'engagement général de l'employeur en matière de formation ", il n'est pas établi, en tout état de cause, qu'elle aurait mené, dans les mois précédant le projet de licenciement collectif, des actions de formation telles que les mesures proposées pourraient être regardées comme suffisantes ;

8. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le groupe Cecab, dont l'acte unilatéral précise, au demeurant, qu'il " compte 9 000 adhérents en Bretagne et 51 unités industrielles dans le monde pour la transformation des productions agricoles " et " a généré un chiffre d'affaires consolidé de 2 milliards d'euros au cours de l'exercice 2012 pour un effectif de 6 535 personnes " et la société requérante ne disposeraient pas de moyens suffisants pour compléter les mesures proposées, qui ne sont susceptibles de concerner, au plus, que 11 salariés et qui, s'agissant plus particulièrement des mesures de reclassement interne, ont d'ailleurs été prévues par la société, elle-même, dans son plan, ainsi qu'il a été dit au point 6, dans le cas de reclassement à l'intérieur du groupe Cecab " hors poste déjà proposé au salarié par la société Maingourd " ; que, pour ce même motif, le moyen tiré de ce que les mesures prévues par ce plan seraient proportionnées aux moyens du groupe auquel elle appartient ne peut qu'être écarté ;

9. Considérant que la circonstance, au demeurant non établie, que le comité d'entreprise de la société Conserves du Blaisois aurait émis un avis favorable à certaines des mesures proposées et remises en cause par l'autorité administrative est sans influence sur la légalité de la décision contestée ; que, de même, est sans incidence sur le présent litige, la circonstance alléguée par la société requérante qu'aucune insuffisance n'aurait été relevée lors du précédent plan de sauvegarde de l'emploi établi en 2013, qui a été validé par une ordonnance du 23 juillet 2013 du tribunal de grande instance de Blois ;

10. Considérant, enfin, que, contrairement à ce que soutient la société requérante, si les articles L. 1233-57 et L. 1233-57-6 du code du travail prévoient que l'autorité administrative peut présenter toute observation ou proposition, notamment, pour compléter ou modifier le plan de sauvegarde de l'emploi, ni ces dispositions, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire ne font obstacle à ce que l'autorité administrative oppose dans sa décision de refus d'homologation des motifs autres que ceux qu'elle aurait préalablement énoncés dans ces observations ou propositions alors, en outre, qu'il ressort des pièces du dossier qu'au cas particulier, certaines des mesures litigieuses avaient fait l'objet d'observations précises de la part de l'administration dans son courrier du 14 février 2014 ; que, par suite, les moyens tirés de ce que le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ne pouvait refuser l'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi en invoquant des motifs non formulés préalablement, lors de la transmission de ses avis et observations sur le projet de plan, et que ces motifs n'ayant pas été portés à la connaissance de l'entreprise, le directeur régional devait être regardé comme ayant renoncé à les lui opposer de sorte qu'ils ne pouvaient servir de fondement à la décision de refus d'homologation, ne peuvent qu'être écartés ; que la société requérante ne peut utilement se prévaloir, sur ce point, de l'instruction DGEFP/DGT n° 2013/13 du 19 juillet 2013, qui est dépourvue de caractère réglementaire, et qui se borne, en tout état de cause, à invoquer " une implication précoce de l'autorité administrative dès le démarrage de la procédure " permettant de favoriser " le dialogue social " et une appréciation globale du projet de licenciement économique collectif au regard " de la régularité et de la qualité du dialogue social " et " de la qualité des mesures sociales d'accompagnement " ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Conserves du Blaisois, devenue société D'Aucy Long Life Logistic, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

12. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction qu'elle présente ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Conserves du Blaisois, devenue société D'Aucy Long Life Logistic, est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société D'Aucy Long Life Logistic et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Délibéré après l'audience du 3 février 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme Buffet, premier conseiller,

- M. Pouget, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 février 2015.

Le rapporteur,

C. BUFFETLe président,

A. PÉREZ

Le greffier,

S. BOYÈRE

La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT02952 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT02952
Date de la décision : 10/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Catherine BUFFET
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : CABINET FIDAL (BLOIS)

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-02-10;14nt02952 ?
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