Vu la requête, enregistrée 12 mai 2014, présentée pour Mme A... B..., demeurant..., par Me Levesque, avocat au barreau de Versailles ; Mme B... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 12-23 du 12 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 décembre 2011 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration rejetant son recours hiérarchique exercé à l'encontre de la décision du 28 septembre 2011 par laquelle le préfet du Val de Marne a rejeté sa demande de naturalisation ;
2°) d'annuler cette décision ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de faire droit à sa demande de naturalisation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique ;
elle soutient que :
- la décision du 6 décembre 2011 est insuffisamment motivée en fait et en droit ;
- elle remplit la condition de résidence habituelle en France posée par les articles 21-16 et suivants du code civil ;
- elle remplit également la condition d'assimilation posée à l'article 21-24 du même code ;
- elle n'a pas fait l'objet de l'une des condamnations visées à l'article 21-27 du code civil et remplit la condition de bonne vie et moeurs posée par l'article 21-26 de ce code, les faits de violences sur conjoint pour lesquelles elle a été condamnés s'étant produits dans un contexte conjugal dégradé imputable au comportement violent de son époux ; le ministre a donc entaché sa décision d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 juin 2014, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;
il fait valoir que :
- sa décision est suffisamment motivée en fait et en droit ;
- Mme B... ne conteste pas la réalité des faits motivant le rejet de sa demande sur le fondement des articles 45 et 48 du décret du 30 décembre 1993 ; ces faits sont graves, alors même que l'intéressée aurait elle-même été victime de violences de la part de son conjoint, et ils sont récents ; la décision n'est donc pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Vu le mémoire en production de pièces nouvelles, enregistré le 10 octobre 2014, présenté pour Mme B... ;
Vu le mémoire, enregistré le 16 octobre 2014, présenté pour le ministre de l'intérieur, qui maintient ses conclusions précédentes par les mêmes motifs ;
Vu la décision du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes en date du 7 mars 2014, admettant Mme B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993, modifié, relatif aux déclarations de nationalité aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 janvier 2015 :
- le rapport de M. Pouget, premier conseiller ;
1. Considérant que Mme B... relève appel du jugement du 12 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 décembre 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a rejeté sa demande de naturalisation ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient à l'intéressé, s'il le juge opportun, de déposer une nouvelle demande (...) " ;
3. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée du 6 décembre 2011, qui fait référence aux articles 45 et 48 du décret du 30 décembre 1993 et qui expose la raison pour laquelle le ministre a décidé de confirmer la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis du 28 septembre 2011 ayant rejeté la demande de naturalisation de Mme B..., est ainsi suffisamment motivée en fait et en droit, au regard des prescriptions de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que Mme B... ne peut utilement se prévaloir des articles 21-16 et suivants du code civil relatifs à la recevabilité des demandes de naturalisations à l'appui de sa contestation de la légalité de la décision du 6 décembre 2011, prise sur le fondement des dispositions précitées des articles 45 et 48 du décret du 30 décembre 1993, en vertu desquelles il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la sollicite ;
5. Considérant, en troisième et dernier lieu que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, le ministre peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ; que, pour rejeter la demande d'acquisition de la nationalité française présentée par Mme B..., le ministre chargé des naturalisations s'est fondé sur le motif tiré de ce qu'elle a été l'auteure, le 7 septembre 2004, de violences sur conjoint suivies d'une incapacité supérieure à 8 jours ; que Mme B..., qui ne conteste pas la matérialité des faits motivant ainsi la décision contestée, ne peut utilement se prévaloir à l'encontre de celle-ci de la réhabilitation judiciaire légale dont elle a bénéficié et de l'effacement, au bulletin n° 2 de son casier judiciaire, de la condamnation qui avait été prononcée à son encontre ; qu'alors même que les faits considérés se sont produits dans un contexte conjugal dégradé dont elle aurait également été la victime, ceux-ci présentent un caractère de gravité avéré et n'étaient pas anciens à la date à laquelle le ministre a pris la décision en litige, laquelle n'est par conséquent pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
7. Considérant que, dès lors que le présent arrêt rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête, les conclusions présentées par Mme B... à fin d'injonction et sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 6 janvier 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Millet, président,
- M. François, premier conseiller,
- M. Pouget, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 janvier 2015.
Le rapporteur,
L. POUGETLe président,
JF. MILLET
Le greffier,
S. BOYÈRE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT01252