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29/12/2014 | FRANCE | N°13NT03298

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 29 décembre 2014, 13NT03298


Vu la requête, enregistrée le 6 décembre 2013, présentée pour M. et Mme A... et ChristelleB..., demeurant..., par Me Benoit, avocat, qui demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202176 du 15 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 janvier 2012 par lequel le maire de la commune d'Artannes-sur-Indre a refusé de leur délivrer un permis de construire et de la décision du 19 juin 2012 rejetant leur recours gracieux ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 janvier 2012 et la décision

du 19 juin 2012 ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Artannes-sur-Indr...

Vu la requête, enregistrée le 6 décembre 2013, présentée pour M. et Mme A... et ChristelleB..., demeurant..., par Me Benoit, avocat, qui demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202176 du 15 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 janvier 2012 par lequel le maire de la commune d'Artannes-sur-Indre a refusé de leur délivrer un permis de construire et de la décision du 19 juin 2012 rejetant leur recours gracieux ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 janvier 2012 et la décision du 19 juin 2012 ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Artannes-sur-Indre la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de condamner la commune d'Artannes-sur-Indre aux dépens et notamment au remboursement de la contribution pour l'aide juridique ;

ils soutiennent que :

- ainsi que l'a retenu le jugement du 15 octobre 1013 pour apprécier le projet au regard de l'article N2 du règlement du plan local d'urbanisme, la construction projetée s'analyse en une restauration et non en une construction nouvelle ; que l'article N4 du règlement du plan local d'urbanisme, qui s'applique aux seules constructions nouvelles n'était donc pas opposable à leur projet ;

- qu'à supposer même que cet article N4 ait été applicable, leur projet ne requiert pas une alimentation en eau potable puisque celle-ci existe déjà grâce à un forage à proximité de la maison ; que les analyses réalisées montrent que l'eau issue de ce forage est conforme aux normes de potabilité ;

- que l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme n'est pas un obstacle à la délivrance d'un permis de construire quand aucun raccordement au réseau public d'eau potable n'est nécessaire ;

- qu'à supposer que cet article L. 111-4 soit applicable, encore faudrait-il que le maire démontre qu'il n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle entité les travaux doivent être exécutés, en recueillant pour ce faire les avis des services compétents ; que le maire n'a ici accompli aucune diligence pour recueillir les informations auprès des services compétents ;

- qu'ils ont opté pour un système d'assainissement autonome, de sorte qu'aucun raccordement n'est nécessaire en la matière ; que s'agissant du réseau électrique, les travaux ont été effectués à leur frais, de sorte que le réseau arrive désormais à quelques mètres de leur propriété ;

- que le refus de permis de construire qui leur est opposé est motivé par les liens d'amitié qui unissent le maire et l'ancien propriétaire et par le souci de préserver le territoire chasse et donc l'intérêt des chasseurs du syndicat de la chasse de la commune, dont le maire est le président ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 27 février 2014, présenté pour la commune d'Artannes-sur-Indre, par Me D..., qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. et Mme B... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle fait valoir que :

- la requête de M. et Mme B... devant le tribunal était tardive car le refus du 16 janvier 2012 est confirmatif de deux précédents refus de permis de construire, devenus définitifs, opposés par arrêtés des 8 septembre 2010 et 14 septembre 2011 ;

- compte tenu de l'ampleur des travaux, le projet s'analyse en une construction nouvelle et non en une simple restauration ;

- que contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, dès lors que les murs porteurs ne sont pas visibles dans leur intégralité, le projet n'entrait pas dans les exceptions prévues par l'article N2 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- que dès lors que le bâtiment était en ruine, les travaux ne pouvaient être regardés que comme tendant à la réalisation d'une construction nouvelle au sens de l'article N4 du plan local d'urbanisme ; qu'en vertu de cet article, le branchement sur le réseau public d'eau potable est impératif pour toute construction nouvelle à usage d'habitation, qui requiert nécessairement une alimentation en eau potable ;

- que dès lors que l'article N4 a un caractère impératif, le maire était tenu de faire application des dispositions de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme ;

- que l'arrêté attaqué n'est entaché d'aucun détournement de pouvoir ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 mai 2014, présenté, pour M. et Mme B..., par Me Benoit, qui concluent aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

ils soutiennent en outre que les dossiers de permis de construire déposés les 12 juillet 2010, 21 juillet 2011 et 25 novembre 2011 comportent des modifications substantielles, de sorte que l'arrêté attaqué ne peut être regardé comme confirmatif des précédents refus ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 juin 2014, présenté, pour la commune d'Artannes-sur-Indre, par MeD..., qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 décembre 2014 :

- le rapport de Mme Rimeu, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;

- et les observations de Me C..., substituant Me Benoit, avocat de M. et Mme B... ;

1. Considérant que, le 25 novembre 2011, M. et Mme B... ont déposé une demande de permis de construire ayant pour objet la restauration de ruines sur une parcelle cadastrée section D n° 439 située au lieudit " Le Puits Herbault " à Artannes-sur-Indre (Indre et Loire) et classée en zone N du plan local d'urbanisme de cette commune ; que par arrêté du 16 janvier 2012, le maire d'Artannes-sur-Indre a rejeté leur demande au double motif que l'opération projetée ne pouvait être qualifiée de restauration de bâtiments en ruines au sens de l'article N2 du règlement du plan local d'urbanisme et que la parcelle n'était pas raccordée au réseau public d'eau potable ; que M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 15 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans, tout en n'estimant fondé que le seul motif tiré d'une absence de desserte de la parcelle par le réseau de distribution d'eau potable, a rejeté leur demande dirigée contre l'arrêté du 16 janvier 2012 et contre la décision du 19 juin 2012 rejetant le recours gracieux formé contre cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sur la fin de non recevoir opposée à la demande de première instance :

2. Considérant que la commune d'Artannes-sur-Indre fait valoir que le refus de permis de construire opposé par l'arrêté attaqué du 16 janvier 2012 serait une décision confirmative de deux précédents refus de permis de construire des 14 septembre 2011 et 8 septembre 2010 ; que cependant, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 8 septembre 2010 retient comme motif de refus la non-conformité au plan local d'urbanisme de la commune des toits terrasses, baies vitrées et bardages bois ; que la demande de permis de construire du 21 juillet 2011 modifie le projet sur ces points ; que le refus opposé à cette demande du 21 juillet 2011 oppose quant à lui le non respect par le projet des dispositions de l'article N 11 du plan local d'urbanisme ; que la nouvelle demande du 25 novembre 2011, qui est rejetée par l'arrêté attaqué, corrige le projet sur ce point ; que par ailleurs, cette nouvelle demande comporte un plan de masse complété, des modifications dans les plans relatifs à l'insertion du projet dans son environnement, des précisons quant au raccordement au réseau électrique et au forage réalisé pour l'accès à l'eau ainsi que des fiches d'analyse techniques ; que dans ces conditions, la demande de permis de construire du 25 novembre 2011 doit être regardée comme une demande nouvelle et le refus du 16 janvier 2012 comme une décision nouvelle, qui n'est pas purement confirmative des refus opposés les 14 septembre 2011 et 8 septembre 2010 ; que par suite, la commune d'Artannes-sur-Indre n'est pas fondée à soutenir que la demande de première instance de M. et Mme B... serait tardive et par suite irrecevable ;

Sur la légalité de l'arrêté du 16 janvier 2012 :

3. Considérant en premier lieu, d'une part, que l'article N1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune prévoit que toutes les constructions et utilisations du sol sont interdites en zone N à l'exception de celles mentionnées à l'article N2 ; que ce dernier article autorise notamment la restauration des " bâtiments en ruine ", sous réserve " que la structure initiale (murs porteurs) soit apparente " ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article N4 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Artannes-sur-Indre : " (...) 4.1 - Eau potable / Le branchement sur le réseau public est obligatoire pour toute construction nouvelle qui requiert une alimentation en eau potable. (...) " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du constat d'huissier produit par les requérants, que les quatre murs porteurs du bâtiment en ruine situé sur le terrain appartenant aux requérants sont visibles au moins en partie et font apparaître la structure initiale du bâtiment ; que par suite, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif d'Orléans, le projet de M. et Mme B... constitue la restauration d'un bâtiment en ruine autorisée par l'article N2 du règlement du plan local d'urbanisme ; qu'il suit de là que l'article N4 du même règlement, qui concerne les seules constructions nouvelles au nombre desquelles ne figurent pas la construction ainsi restaurée, n'était pas applicable à ce projet ;

6. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction projetée, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte de ladite construction, le permis de construire ne peut être accordé si l'autorité qui le délivre n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public lesdits travaux doivent être exécutés " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si le réseau public d'eau potable est inexistant au droit du terrain d'implantation du projet et qu'il n'est pas prévu de réaliser les travaux nécessaires à l'extension de ce réseau, M. et Mme B... démontrent pouvoir assurer l'alimentation en eau potable de leur maison à partir d'un puits leur appartenant ; que, dans ces conditions, c'est à tort que le maire d'Artannes-sur-Indre s'est fondé sur les dispositions précitées de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme pour refuser à M. et Mme B... le permis qu'ils sollicitaient dès lors que des travaux portant sur le réseau public de distribution d'eau n'étaient pas nécessaire à la réalisation de leur construction ;

8. Considérant qu'il résulte des considérants 5 et 7 que les deux motifs qui fondent l'arrêté du 16 janvier 2012 sont illégaux ; qu'en revanche, en application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, l'autre moyen soulevé n'est pas, en l'état du dossier, susceptible de justifier l'annulation des décisions litigieuses ;

9. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. et Mme B... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 15 octobre 2013, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 janvier 2012 et de la décision du 19 juin 2012 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme B..., qui n'ont pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, la somme que la commune d'Artannes-sur-Indre demande à ce titre ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune d'Artannes-sur-Indre la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. et Mme B... et non compris dans les dépens, ainsi que la somme de 35 euros correspondant à la contribution pour l'aide juridique dont ils se sont acquittés ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 15 octobre 2013, l'arrêté du maire d'Artannes-sur-Indre du 16 janvier 2012 et sa décision du 19 juin 2012 sont annulés.

Article 2 : La commune d'Artannes-sur-Indre versera à M. et Mme B... la somme de

1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La commune d'Artannes-sur-Indre versera à M. et Mme B... la somme de 35 euros en application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... et à la commune d'Artannes-sur-Indre.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- Mme Rimeu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 décembre 2014.

Le rapporteur,

S. RIMEU Le président,

H. LENOIR

Le greffier,

C. GOY

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N° 13NT03298


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT03298
Date de la décision : 29/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: Mme Sophie RIMEU
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : BENOIT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-12-29;13nt03298 ?
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