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26/12/2014 | FRANCE | N°14NT00707

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 26 décembre 2014, 14NT00707


Vu la requête, enregistrée le 12 mars 2014, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Renard, avocat au barreau de Nantes ; M. A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 13-6391 du 20 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Vendée du 8 juillet 2013 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Vendée de lui

délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai d'un...

Vu la requête, enregistrée le 12 mars 2014, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Renard, avocat au barreau de Nantes ; M. A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 13-6391 du 20 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Vendée du 8 juillet 2013 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Vendée de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ainsi que les entiers dépens ;

il soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- le préfet s'est estimé lié par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ;

- l'avis de ce médecin est erroné et contredit par les avis des autres médecins qui ont eu à connaître de son état de santé ; il s'est fondé sur des éléments incomplets, en l'absence notamment du résultat d'une expertise psychiatrique ; une nouvelle saisine pour avis du médecin de l'agence régionale de santé s'impose donc ;

- la décision du préfet méconnaît donc les dispositions du 11° de l'article L .313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- son éloignement méconnaîtrait les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaîtrait aussi l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de renvoi doit être annulée en conséquence de l'illégalité de la mesure d'éloignement ;

- sa situation particulière n'a pas été examinée au regard des dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 mai 2014, présenté par le préfet de la Vendée, qui conclut au rejet de la requête ;

il fait valoir que :

- l'arrêté litigieux est suffisamment motivé ;

- la situation du requérant a été examinée à l'aune de sa demande d'asile et au regard de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas méconnu, ni le 10° de l'article L. 511-4 du même code ;

- les moyens tirés de l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre et de la mesure d'éloignement doivent être écartés en conséquence de ce qui est exposé par ailleurs ;

- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues ;

- la réalité des risques allégués en cas de retour en Arménie n'est pas établie ;

Vu la décision du 12 février 2014 du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Nantes accordant à M. A... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi du 11 juillet 1979 modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 décembre 2014 :

- le rapport de M. Pouget, rapporteur ;

1. Considérant que M. A..., de nationalité arménienne, relève appel du jugement du 20 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juillet 2013 du préfet de la Vendée rejetant sa demande de titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté du 8 juillet 2013 en ce qu'il porte respectivement refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi, que le requérant renouvelle en appel sans apporter aucune précision supplémentaire, doit être écarté en toutes ses branches par adoption des mêmes motifs que ceux retenus par les premiers juges ; qu'il en va de même du moyen tiré du défaut d'examen par le préfet de sa situation personnelle au regard de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3. Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...)11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée " ; que selon l'article R.313-22 de ce code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...)" ; qu'aux termes de l'article L. 511-4 du même code : "Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (...)" ;

4. Considérant, d'une part, que si le préfet de la Vendée a rappelé, dans la décision en litige, que le médecin de l'agence régionale de santé avait estimé que l'état de santé de M. A... nécessitait un traitement médical dont il pourrait disposer dans son pays d'origine, il ne ressort pas des termes de cette décision qu'il se soit senti lié par l'avis émis par cette autorité médicale ;

5. Considérant, d'autre part, que M. A... fait valoir qu'il a subi plusieurs accidents vasculaires cérébraux, qu'il a fait l'objet d'une ablation de la vésicule biliaire et d'interventions chirurgicales à l'estomac, qu'il souffre de diabète et qu'il rencontre des problèmes psychiatriques ; que ces diverses pathologies justifient selon lui la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et font obstacle à son éloignement ; que le préfet de la Vendée, en se fondant notamment sur l'avis émis le 1er octobre 2012 par le médecin de l'agence régionale de santé, a toutefois refusé de délivrer à M. A... le titre de séjour qu'il avait sollicité au motif qu'il pourrait bénéficier d'un traitement médical approprié à son état de santé dans son pays d'origine ; que si M. A... produit deux certificats médicaux datés de février 2013, dont il ressort qu'il présente une fragilité psychique et un état dépressif sévère nécessitant des soins continus, ainsi qu'une hypoglycémie, des troubles digestifs, des malaises, des céphalées et des douleurs oculaires, ces certificats sont peu circonstanciés et ne peuvent remettre en cause l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, quand bien même celui-ci n'aurait pas disposé d'une expertise psychiatrique récente ; que ce médecin, qui s'est prononcé à plusieurs reprises à intervalles de quatre mois sur l'état de santé de M. A..., a pu en effet en constater l'amélioration progressive et estimer en dernier lieu, en toute connaissance de cause, d'une part que le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et d'autre part qu'il pourrait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'à cet égard, le requérant ne conteste pas valablement, par des considérations générales sur l'état des ressources sanitaires en Arménie, ne pouvoir accéder aux soins que requiert son état ; qu'ainsi, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée aurait méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles du 10° de l'article L. 511-4 du même code ;

6. Considérant, en troisième lieu, que si la fille majeure de M. A... se trouve actuellement en France, elle vit maritalement avec un compatriote dans une autre ville que celle où réside le requérant et sa présence sur le territoire national ne peut être regardée comme pérenne dès lors qu'à la date de la décision litigieuse elle était dans l'attente de la délivrance d'un titre de séjour provisoire et que son conjoint est lui-même détenteur d'une carte de séjour temporaire ; que l'épouse de M. A... fait elle-même l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'ainsi, rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue en Arménie, où le requérant conserve des attaches familiales ; que, dans ces conditions, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le préfet de la Vendée n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de son arrêté sur la situation personnelle du requérant ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. A... n'est pas fondé à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour et celle de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

8. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à des peines ou traitements inhumains et dégradants " ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ;

9. Considérant que M. A... soutient qu'avant de fuir l'Arménie en 2006, il a fait l'objet de menaces et de violences après avoir dénoncé les illégalités commises par des collègues policiers et refusé de mettre en oeuvre des ordres illégaux de sa hiérarchie ; que, toutefois, alors que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ont successivement rejeté la demande d'asile du requérant en relevant le manque de valeur probante de ses déclarations, les allégations de M. A... ne sont étayées d'aucune pièce de nature à établir la réalité du risque personnel qu'il invoque ; que, dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que la décision par laquelle le préfet a décidé de son éloignement à destination de l'Arménie méconnaîtrait les stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

11. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par M. A..., ainsi que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, et celles tendant à ce que les dépens soient mis à la charge de l'Etat ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur.

Une copie sera adressée au préfet de la Vendée.

Délibéré après l'audience du 2 décembre 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président,

- M. François, premier conseiller,

- M. Pouget, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 décembre 2014.

Le rapporteur,

L. POUGET Le président,

A. PÉREZ

Le greffier,

S. BOYÈRE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT007072

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT00707
Date de la décision : 26/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : RENARD OLIVIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-12-26;14nt00707 ?
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