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23/12/2014 | FRANCE | N°14NT01602

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 23 décembre 2014, 14NT01602


Vu la requête, enregistrée le 17 juin 2014, présentée pour Mme A...B...épouseC..., demeurant..., par Me Le Boulanger, avocat, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400345 du 23 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 décembre 2013 par lequel le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer un titre de séjour et assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 16 décembr

e 2013 ;

3°) d'ordonner au préfet du Calvados de lui délivrer un certificat de rés...

Vu la requête, enregistrée le 17 juin 2014, présentée pour Mme A...B...épouseC..., demeurant..., par Me Le Boulanger, avocat, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400345 du 23 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 décembre 2013 par lequel le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer un titre de séjour et assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 16 décembre 2013 ;

3°) d'ordonner au préfet du Calvados de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à rendre ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

elle soutient que :

- le refus de séjour méconnaît le § 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le § 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'obligation de quitter le territoire français procède d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu la décision du 4 août 2014 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes a admis Mme B...épouse C...au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2014, présenté par le préfet du Calvados, qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir s'en remettre au dossier de première instance ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 novembre 2014, présenté pour Mme B...épouseC..., qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 décembre 2014 le rapport de M. Durup de Baleine, premier conseiller ;

1. Considérant que MmeB..., ressortissante algérienne née en 1980, s'est maintenue irrégulièrement en France à l'issue de la durée de validité du visa de court séjour avec lequel elle y était entrée le 8 décembre 2012 et, le 16 mars 2013, s'est mariée avec un compatriote titulaire d'un certificat de résidence d'une durée de dix ans ; qu'elle a sollicité, par courrier du 3 juin 2013, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des stipulations du § 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ; qu'elle relève appel du jugement du 23 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 décembre 2013 par lequel le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer un titre de séjour et assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " I. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / (...) " ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de refus " ;

3. Considérant, en premier lieu, que le séjour en France de la requérante est très récent et qu'il en va de même de son mariage ; qu'en outre, la requérante, épouse d'un ressortissant algérien résidant régulièrement en France, relève d'une catégorie ouvrant droit au regroupement familial et, par suite, ne peut prétendre au bénéfice des stipulations du § 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien précité ; qu'elle dispose de nombreuses attaches familiales en Algérie, où elle a vécu pendant 32 ans ; que le refus de lui délivrer un titre de séjour est, par lui-même, sans incidence sur la grossesse dont elle fait état ; qu'ainsi, compte tenu de la durée et des conditions du séjour de l'intéressée en France, le préfet du Calvados n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée en refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'aux termes de l'article 7 : " L'enfant est enregistré aussitôt sa naissance et a dès celle-ci le droit à un nom, le droit d'acquérir une nationalité et, dans la mesure du possible, le droit de connaître ses parents et d'être élevé par eux. Les Etats parties veillent à mettre ces droits en oeuvre conformément à leur législation nationale et aux obligations que leur imposent les instruments internationaux applicables en la matière (...). " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que, si la requérante se prévaut de la circonstance qu'elle est enceinte, la naissance de l'enfant étant prévue au mois de juillet 2014, rien ne fait obstacle à ce que cet enfant puisse naître ailleurs qu'en France ; que, ni le refus de titre de séjour opposé à la requérante, ni l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, ne font obstacle à ce que cet enfant connaissent ses parents et soit élevé par eux, la requérante ayant précisé, dès sa demande épistolaire du 3 juin 2013, que son époux, qui n'a toutefois sollicité aucune autorisation de regroupement familial, satisfaisait aux conditions auxquelles est subordonné un tel regroupement ; que, dès lors, le préfet du Calvados n'a pas méconnu les stipulations précitées de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

5. Considérant, en troisième et dernier lieu, que, si la requérante soutient, en se prévalant d'un certificat médical postérieur de plus de trois semaines à l'arrêté contesté, que les déplacements lui seraient " actuellement relativement contre-indiqués ", il ne ressort toutefois pas du dossier que le préfet du Calvados, en décidant d'assortir le refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, aurait, à la date de l'arrêté contesté, commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences d'une telle obligation sur la situation personnelle de l'intéressée ;

6. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme B...épouse C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête, n'implique aucune mesure d'exécution et que, dès lors, les conclusions de Mme C...tendant à ce qu'il soit ordonné au préfet du Calvados de lui délivrer un titre de séjour ne sauraient être accueillies ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par la requérante pour l'instance et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...épouse C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...épouse C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Calvados.

Délibéré après l'audience du 5 décembre 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président,

- Mme Piltant, premier conseiller,

- M. Durup de Baleine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 décembre 2014.

Le rapporteur,

A. DURUP de BALEINELe président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

F. PERSEHAYE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01602
Date de la décision : 23/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: M. Antoine DURUP de BALEINE
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : LE BOULANGER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-12-23;14nt01602 ?
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