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15/12/2014 | FRANCE | N°13NT01630

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 15 décembre 2014, 13NT01630


Vu la décision n° 357305, en date du 27 mai 2013, enregistrée, avec les documents visés par celle-ci, sous le n° 13NT01630, par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté pour la société par actions simplifiée (SAS) Morgère, d'une part, a annulé l'arrêt n° 10NT02481 de la cour du 29 décembre 2011 et, d'autre part, lui a renvoyé le jugement de cette affaire ;

Vu le recours, enregistré, sous le n° 10NT02481, au greffe de la cour le 1er décembre 2010, présenté par le ministre du travail, de l'emploi et de la santé ; le ministre de

mande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903311 en date du 30 septe...

Vu la décision n° 357305, en date du 27 mai 2013, enregistrée, avec les documents visés par celle-ci, sous le n° 13NT01630, par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté pour la société par actions simplifiée (SAS) Morgère, d'une part, a annulé l'arrêt n° 10NT02481 de la cour du 29 décembre 2011 et, d'autre part, lui a renvoyé le jugement de cette affaire ;

Vu le recours, enregistré, sous le n° 10NT02481, au greffe de la cour le 1er décembre 2010, présenté par le ministre du travail, de l'emploi et de la santé ; le ministre demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903311 en date du 30 septembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 13 mars 2009 modifiant la liste des établissements de la construction et de la réparation navales susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante en tant qu'il porte inscription sur cette liste de la société Morgère pour la période allant de l'année 1970 à l'année 1996 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Morgère devant le tribunal administratif de Rennes ;

il soutient que :

- le tribunal a inexactement qualifié les faits en considérant que la société Morgère n'était pas un établissement de construction et de réparation navales ;

- le tribunal a commis une erreur de droit en fondant son annulation sur le motif que les activités de réparation navale de la société Morgère n'étaient pas significatives ; la condition du caractère significatif de l'activité ne s'applique qu'à la sous-traitance ; or, la société Morgère intervenait dans le domaine de la réparation navale en tant que prestataire direct et non en qualité de sous-traitant ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 mars 2011, présenté pour la société Morgère, dont le siège est situé 10, avenue Louis Martin à Saint-Malo (35400), par la Selarl Chevallier et associés, avocat ; elle conclut au rejet du recours et à ce que l'Etat lui verse la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- l'instruction de la demande, présentée par certains de ses anciens salariés tendant à son inscription sur la liste des établissements de construction et de réparation navales susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante, a été irrégulière en raison de la méconnaissance du principe du contradictoire, du non-respect des dispositions de la circulaire n° 2004/03 du 6 février 2004 et du défaut de consultation du service de médecine du travail ;

- son activité principale de fabrication et distribution de panneaux de chaluts, exclusive de leur installation à bord, n'en fait pas un établissement de construction et de réparation navales et n'expose pas les salariés aux risques liés à l'amiante ; pour être inscrite sur la liste des établissements de la construction et de la réparation navales susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante en raison de son activité accessoire de réparation navale, il fallait que cette activité accessoire soit suffisamment significative ; tel n'est pas le cas dès lors que seuls deux salariés, sur un total de dix-sept, étaient affectés à temps partiel à cette activité accessoire, qui a représenté moins de 2 % de son chiffre d'affaires total au titre des années 1991 à 1995 ;

Vu le mémoire enregistré le 24 mars 2011 présenté par le ministre du travail, de l'emploi et de la santé qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire enregistré le 15 juillet 2011 présenté pour la société Morgère qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire enregistré le 18 décembre 2013 présenté par le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social par lequel le ministre maintient ses conclusions ;

il soutient que :

- les activités ayant exposé à l'amiante ont représenté une part significative de l'activité de l'établissement Morgère au cours de la période 1970 à 1996 ;

- l'activité principale de fabrication de chaluts et de réparation navale s'accompagnait de l'installation et de la réparation à bord des chaluts ; ces activités conduisaient à manipuler les freins de treuil, joints sur les tuyaux de vapeur et d'échappement et les cloisons et faux-plafond, qui contenaient de l'amiante ;

- ces activités ont concerné 9 personnes sur un effectif moyen de 20 à 25 personnes au cours de la période en cause ;

Vu l'ordonnance du 22 octobre 2014 fixant la clôture d'instruction au 24 novembre 2014, à 16 heures, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire enregistré le 24 novembre 2014 à 11 heures 35, présenté pour la société Morgère, par Me Robin, avocat, qui conclut au rejet du recours du ministre chargé du travail et demande que soit mise à la charge du ministre une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- les droits de la défense ont été méconnus du fait de la communication très tardive à la société Morgère du rapport de l'inspecteur du travail en date du 13 mars 2007 ;

- l'activité principale de la société Morgère, qui est la fabrication et la distribution de panneaux de chaluts, ne s'accompagne pas de leur installation à bord des navires et n'est pas une activité de construction navale ;

- l'activité accessoire de réparation navale n'a toujours représenté qu'une part dérisoire de l'activité de la société (moins de 2 % de son chiffre d'affaires total et 2 salariés affectés sur un effectif moyen de 17) ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 portant financement de la sécurité sociale pour 1999 et notamment son article 41 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 décembre 2014 :

- le rapport de Mme Loirat, président-assesseur,

- les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public,

- et les observations de Me Adam, avocat de la société Morgère ;

1. Considérant que, par arrêté interministériel du 13 mars 2009, le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville et le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ont inscrit la société par actions simplifiée (SAS) Morgère sur la liste des établissements et des métiers de la construction et de la réparation navales susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante pour la période couvrant les années 1970 à 1996 ; que le ministre chargé du travail a relevé appel du jugement du 30 septembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 13 mars 2009 au motif que l'activité de réparation navale exercée de manière accessoire par la société Morgère ne présentait pas un caractère significatif justifiant l'inscription de cette société sur cette liste ; que par un arrêt du 29 décembre 2011, la cour a censuré le motif retenu par les premiers juges et rejeté la demande de la société Morgère, motif pris de ce qu'elle devait être regardée comme un établissement de construction et de réparation navales et que ses salariés oeuvrant dans ce domaine étaient exposés à l'amiante ; que par une décision n° 357305 du 27 mai 2013, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux sur le pourvoi de la société Morgère, a, en son article 2, annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour ;

2. Considérant qu'aux termes du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, dans sa rédaction applicable à la date de la décision litigieuse : " Une allocation de cessation anticipée d'activité est versée aux salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, des établissements de flocage et de calorifugeage à l'amiante ou de construction et de réparation navales, sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle, lorsqu'ils remplissent les conditions suivantes : / 1° Travailler ou avoir travaillé dans un des établissements mentionnés ci-dessus et figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget, pendant la période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante. L'exercice des activités de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, de flocage et de calorifugeage à l'amiante de l'établissement doit présenter un caractère significatif ;(...) / 3° S'agissant des salariés de la construction et de la réparation navales, avoir exercé un métier figurant sur une liste fixée par arrêté conjoint des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société Morgère a pour principale activité la fabrication et le négoce de panneaux de chaluts et qu'elle a également exercé, à partir de son acquisition en 1980 de la société Aussan-Dufeuil, une activité accessoire de réparation navale ; que si le ministre chargé du travail soutient que l'activité de construction de panneaux de chaluts s'accompagnait de leur installation à bord, reprenant l'avis de l'inspecteur du travail dans son rapport d'enquête du 15 mars 2007, et celui de la directrice régionale de Bretagne, chargée du travail, dans son rapport complémentaire du 25 février 2011, cette allégation n'est toutefois corroborée par aucune autre des pièces du dossier ; que, par ailleurs, si le ministre soutient que, sur un effectif moyen de 20 à 25 salariés pendant la période considérée, 9 salariés auraient été affectés aux activités de réparation navale, la société Morgère a déclaré que deux salariés sur un effectif total de 17 y étaient affectés ; qu'à cet égard, le ministre se borne à produire les témoignages peu précis des 7 salariés ayant sollicité l'inscription de la société Morgère sur la liste des établissements et des métiers de la construction et de la réparation navales ainsi qu'une coupure de presse mentionnant l'intervention d'au plus 4 salariés dans les activités de réparation navale ; que la société Morgère justifie par ailleurs que cette activité accessoire a représenté moins de 2% de son chiffre d'affaires au cours des années 1991 à 1995 ; que dans ces conditions, l'activité de réparation navale ne peut être regardée comme représentant une part significative de l'activité de la société Morgère susceptible de la faire regarder comme un "établissement de construction ou de réparation navales" au sens et pour l'application du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, dans sa rédaction applicable à la date de la décision litigieuse ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre chargé du travail n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 13 mars 2009 en tant qu'il a inscrit la société Morgère sur la liste complémentaire des établissements de construction et de réparation navales susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la société Morgère de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du ministre du travail, de l'emploi et de la santé est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la société Morgère une somme de 1 500 euros par application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à la société Morgère.

Délibéré après l'audience du 4 décembre 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 décembre 2014.

Le rapporteur,

C. LOIRATLe président,

F. BATAILLE

Le greffier,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT01630


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13NT01630
Date de la décision : 15/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Cécile LOIRAT
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : LE MOIGNE-ROZEC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-12-15;13nt01630 ?
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