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12/12/2014 | FRANCE | N°14NT00304

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 12 décembre 2014, 14NT00304


Vu la requête, enregistrée le 7 février 2014, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Letrouit, avocat au barreau du Mans ; M. A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1307084 du 8 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 août 2013 par lequel le préfet de la Sarthe lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir

, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe de lui délivrer une carte de...

Vu la requête, enregistrée le 7 février 2014, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Letrouit, avocat au barreau du Mans ; M. A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1307084 du 8 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 août 2013 par lequel le préfet de la Sarthe lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer son dossier et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans le même délai et sous la même astreinte ;

il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'il n'établissait pas avoir résidé en France entre 2004 et 2008 ; il n'a pas déclaré être entré en France en 2012 ; l'attestation de la caisse d'assurance-maladie du département de la Seine-Saint-Denis qu'il produit en appel prouve qu'il a été affilié à cet organisme entre le 7 décembre 2004 et le 31 octobre 2009 ; il entretient une relation amoureuse avec une française depuis début 2012 ; il occupe un logement avec sa compagne depuis le 1er mai 2012 et a conclu avec elle un pacte civil de solidarité le 6 novembre 2012 ;

- le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il a sollicité le statut de réfugié mais a égaré les documents l'établissant ;

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire litigieuse est insuffisamment motivée ;

- l'exception d'illégalité du titre de séjour entraine l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire méconnait les stipulations de l'article 3 et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 août 2014, présenté par le préfet de la Sarthe, qui conclut au rejet de la requête ;

il fait valoir que :

- la décision portant refus de titre de séjour est suffisamment motivée ; il a pris en compte la situation particulière de l'intéressé ;

- le refus de titre de séjour ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale du requérant ; son entrée en France est très récente et il est sans charge de famille ; l'intéressé ne démontre pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu trente quatre ans ; M. A... ne remplit pas les conditions posées par la circulaire du 30 octobre 2004 ; les attestations qu'il produit sont dépourvues de valeur juridique ;

- le refus de titre de séjour ne méconnait pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; l'intéressé n'a pas sollicité son admission au séjour au titre de l'asile, ni sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- en refusant de délivrer un titre de séjour à M. A..., il n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation ; l'intéressé ne peut sérieusement alléguer être inséré socialement alors qu'il est pris en charge financièrement par sa compagne ;

- l'obligation de quitter le territoire français n'avait pas à faire l'objet d'une motivation spécifique ;

- la décision portant refus de titre de séjour étant légale, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de ce refus à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français devra être écarté ;

- s'agissant des moyens tirés de la méconnaissance des stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et de l'erreur manifeste d'appréciation affectant l'obligation de quitter le territoire, il s'en rapporte aux arguments qu'il a développés en ce qui concerne la légalité du refus de titre de séjour ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 novembre 2014 :

- le rapport de M. Millet, président-rapporteur ;

1. Considérant que M. A..., ressortissant congolais, relève appel du jugement du 8 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 août 2013 par lequel le préfet de la Sarthe lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, et d'une part, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ; qu'aux termes de l'article 12 de la loi du 15 novembre 1999 : " La conclusion d'un pacte civil de solidarité constitue l'un des éléments d'appréciation des liens personnels en France, au sens du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, pour l'obtention d'un titre de séjour " ; qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les débats parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi du 15 novembre 1999, que si la conclusion d'un pacte civil de solidarité par un étranger soit avec un Français soit avec un étranger en situation régulière, n'emporte pas, à elle seule, délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire, la conclusion d'un tel pacte constitue toutefois un élément de la situation personnelle de l'intéressé, dont l'autorité administrative doit tenir compte pour apprécier si un refus de délivrance de carte de séjour n'entraînerait pas une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

4. Considérant que M. A... fait valoir qu'il réside en France depuis 2004, et qu'il entretient une relation avec une ressortissante française avec laquelle il est lié depuis le 6 novembre 2012 par un pacte civil de solidarité ; que, toutefois, les pièces du dossier ne permettent pas d'établir la résidence habituelle en France de l'intéressé avant l'année 2012 et ne justifient de la vie commune avec sa compagne qu'à compter du début de cette même année ; qu'en outre, le requérant n'allègue pas être dépourvu de tous liens familiaux dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le préfet de la Sarthe n'a méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de son arrêté sur la situation personnelle de l'intéressé ;

5. Considérant, en second lieu, que, si M. A... entend invoquer le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, un tel moyen est, en tout état de cause, inopérant à l'encontre d'une décision de refus de titre de séjour ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que la mesure d'obligation de quitter le territoire français dont le préfet de la Sarthe a assorti sa décision de refus de titre de séjour n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte dès lors que le refus de titre de séjour était, lui-même, suffisamment motivé ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que la décision de refus de titre de séjour n'étant pas illégale, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas privée de base légale ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'eu égard à ce qui a été indiqué au point 4, la décision contestée portant obligation de quitter le territoire français n'a pas porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

9. Considérant, en quatrième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas utilement invoqué à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

10. Considérant, en dernier lieu, que M. A... soutient que la décision de refus de séjour méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; que ce moyen est toutefois dépourvu de toute précision permettant à la cour d'en apprécier le bien fondé, alors d'ailleurs que M. A... n'a pas d'enfant mineur ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

12. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par M. A... ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Une copie sera transmise au préfet de la Sarthe.

Délibéré après l'audience du 18 novembre 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Millet, président,

- Mme Buffet, premier conseiller,

- M. Pouget, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 décembre 2012.

L'assesseur le plus ancien

dans l'ordre du tableau,

C. BUFFET

Le président-rapporteur,

J-F. MILLET Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT003042


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT00304
Date de la décision : 12/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MILLET
Rapporteur ?: M. Jean-Frédéric MILLET
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : LETROUIT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-12-12;14nt00304 ?
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