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28/11/2014 | FRANCE | N°14NT01379

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 28 novembre 2014, 14NT01379


Vu la requête, enregistrée le 26 mai 2014, présenté pour M. A... B..., demeurant..., par Me Bonnot, avocat, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200420 du 26 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 juillet 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a rejeté sa demande de naturalisation ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir cette décision ;

il soutient que :

- la décision du ministr

e n'est pas motivée, en méconnaissance des dispositions de l'article 3 de la loi du 11 j...

Vu la requête, enregistrée le 26 mai 2014, présenté pour M. A... B..., demeurant..., par Me Bonnot, avocat, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200420 du 26 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 juillet 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a rejeté sa demande de naturalisation ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir cette décision ;

il soutient que :

- la décision du ministre n'est pas motivée, en méconnaissance des dispositions de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979, et ses termes sont stéréotypés ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et d'erreur de fait dès lors que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas démontrés, qu'aucun élément probant n'est produit, qu'il dément avoir tenu les propos relatés dans la note, lesquels ne rendent pas compte de la teneur exacte de ses paroles, que le ministre devait procéder à un complément d'enquête conformément aux dispositions de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 ;

- son loyalisme et son intégration en France contredisent les faits qui lui sont reprochés,

il réside en France depuis plus de quarante quatre ans et est en droit d'obtenir la nationalité française eu égard à l'intensité de ses attaches privées et familiales en France ;

Vu le jugement attaqué et la décision contestée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2014, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;

il fait valoir que :

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 doit être écarté dès lors que la décision contestée n'entre pas dans son champ d'application ;

- il est fondé à se prévaloir des éléments de la note du 1er février 2010 des services spécialisés à l'encontre desquels le requérant n'apporte aucun élément de preuve, et qui a été débattue dans le cadre d'une instruction contradictoire, et alors même que le compte rendu de l'entretien n'a pas été versé aux débats, dès lors que les faits reprochés au requérant ne permettent pas de s'assurer de son entier loyalisme ;

Vu la décision du 4 août 2014 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes a accordé à M. B... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié, portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 novembre 2014 :

- le rapport de Mme Piltant, premier conseiller ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret susvisé du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française : " Dès réception du dossier, le ministre chargé des naturalisations procède à tout complément d'enquête qu'il juge utile, portant sur la conduite et le loyalisme de l'intéressé (...) si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande (...) " ; qu'aux termes de l'article 49 du même décret : " Toute décision (...) rejetant une demande de naturalisation (...) prise en application du présent décret est motivée conformément à l'article 27 de la loi n° 98-170 du 16 mars 1998 relative à la nationalité " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ;

2. Considérant que, pour rejeter, par décision du 21 juillet 2011, la demande d'acquisition de la nationalité française présentée par M. B..., le ministre chargé des naturalisations s'est fondé sur les affirmations de l'intéressé, lors de son entretien avec les services de sécurité, et sur le fait qu'il avait nié, lors de cet entretien, sa proximité avec un membre du " Groupe Islamique Combattant Marocain ", organisation extrémiste responsable d'attentats ;

3. Considérant, d'une part, que les décisions rejetant une demande de naturalisation devant être motivées en application des dispositions précitées de l'article 49 du décret du 30 décembre 1993, le moyen tiré de ce que la décision méconnait l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 est inopérant ; que la décision contestée du 21 juillet 2001 précise qu'elle a été prise en application de l'article 49 du décret du 30 décembre 1993 et qu'elle est fondée sur les faits mentionnés au point 2 ; que, contrairement à ce que soutient M. B..., les termes de cette décision ne sont pas stéréotypés ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait ;

4. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des termes mêmes de la note du 1er février 2010 que le ministre a sollicité l'avis du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales suite à la demande d'acquisition de la nationalité française déposée par M. B... le 20 octobre 2008, en application des dispositions précitées de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le ministre devait procéder à un complément d'enquête ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de la note du 1er février 2010 du directeur des libertés publiques et des affaires juridiques du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, que M. B... est connu des services en raison de sa proximité avec un membre du " Groupe Islamique Combattant Marocain ", organisation extrémiste responsable, en 2003, des attentats de Casablanca au Maroc, et démantelée en avril 2004 ; que, lors de son entretien, M. B... n'a pas reconnu sa relation avec cet individu, qu'il a prétendu qu'Al Quaïda est une organisation fabriquée, que Ben Laden ne vit pas " dans les montagnes " et a affirmé ne connaitre ni l'association " Participation et Spiritualité Musulmanes " ni le mouvement " Justice et Bienfaisance ", témoignant ainsi de sa volonté de dissimuler des informations ; qu'en se bornant à faire valoir que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas démontrés, et en démentant avoir tenu les propos relatés dans la note, M. B... ne conteste pas sérieusement la réalité des éléments circonstanciés contenus dans la note en question ; qu'il ne ressort pas, par ailleurs, des pièces du dossier que l'administration se soit fondée sur des faits matériellement inexacts ; qu'en conséquence, en se fondant sur ces faits pour rejeter la demande de l'intéressé, le ministre, eu égard au large pouvoir d'appréciation dont il dispose pour accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite, n'a entaché sa décision ni d'erreur de fait ni d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors que la nationalité française ne constitue pas un droit pour l'étranger qui la sollicite ; que les circonstances que M. B... réside en France depuis de nombreuses années, qu'il y travaille et que ses quatre enfants sont français sont sans incidence sur la légalité de la décision contestée ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Nantes a estimé que la décision rejetant la demande de M. B... n'était entachée ni d'erreur de fait ni d'erreur manifeste d'appréciation ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 juillet 2011 rejetant sa demande de naturalisation ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président,

- M. Francfort, président-assesseur,

- Mme Piltant, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 novembre 2014.

Le rapporteur,

Ch. PILTANT Le président,

H. LENOIR

Le greffier,

F. PERSEHAYE

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N° 14NT01379 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01379
Date de la décision : 28/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: Mme Christine PILTANT
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : BONNOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-11-28;14nt01379 ?
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