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28/11/2014 | FRANCE | N°14NT00645

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 28 novembre 2014, 14NT00645


Vu la requête, enregistrée le 12 mars 2014, présentée pour Mme B... A..., demeurant..., par Me Sylla, avocat au barreau de Paris ; Mme A... C...ssdemande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-9760 du 3 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 juillet 2011 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, prise sur recours hiérarchique, ajournant à deux ans sa demande de naturalisation ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette d

écision ;

elle soutient que :

- sa situation a été appréciée de manière m...

Vu la requête, enregistrée le 12 mars 2014, présentée pour Mme B... A..., demeurant..., par Me Sylla, avocat au barreau de Paris ; Mme A... C...ssdemande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-9760 du 3 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 juillet 2011 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, prise sur recours hiérarchique, ajournant à deux ans sa demande de naturalisation ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

elle soutient que :

- sa situation a été appréciée de manière manifestement erronée ; elle a pu bénéficier d'un congé parental d'éducation parce qu'elle justifiait d'un contrat de travail stable et plus précisément d'un contrat à durée indéterminée ; ses ressources n'étaient pas principalement constituées de prestations sociales lorsqu'elle était en congé parental d'éducation ; elle était rémunérée à hauteur de 1 300 euros lorsqu'elle effectuait des missions intérimaires ;

- la circulaire ministérielle du 16 octobre 2012, antérieure au jugement attaqué, prévoit que c'est l'ensemble de la carrière professionnelle du postulant qui doit être apprécié et non pas sa situation au moment précis où il présente sa demande de naturalisation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 27 mai 2014, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;

il fait valoir que :

- le motif tiré du défaut d'insertion professionnelle et d'autonomie matérielle de la requérante manque en fait mais il peut lui être substitué un motif tenant aux renseignements défavorables recueillis sur le comportement de la postulante ; en effet, l'intéressée n'a pas déclaré à la caisse d'allocations familiales qu'elle exerçait une activité intérimaire lorsqu'elle était en congé parental d'éducation et elle a ainsi indûment bénéficié du complément de libre choix d'activité à taux plein en méconnaissance de l'article L. 531-4 du code de la sécurité sociale ;

- Mme A... ne peut valablement se prévaloir de la circulaire du 16 octobre 2012, dépourvue de caractère réglementaire ;

Vu la décision du 25 août 2014 par laquelle la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes a accordé à Mme A... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 modifié, relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 novembre 2014 :

- le rapport de M. Pouget, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Delesalle, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme A... relève appel du jugement du 3 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 juillet 2011 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, prise sur recours hiérarchique, ajournant à deux ans sa demande de naturalisation ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger. " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions (...) " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre chargé des naturalisations de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ;

3. Considérant que l'administration peut faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que, dans l'affirmative, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué, le juge peut procéder à la substitution demandée ;

4. Considérant que, pour ajourner à deux ans la demande de naturalisation de Mme A..., le ministre chargé des naturalisations s'est initialement fondé sur le caractère incomplet et la précarité de son insertion professionnelle ; qu'en appel le ministre reconnaît toutefois, dans son mémoire en défense communiqué à Mme A..., que ce motif est entaché d'une erreur de fait et indique qu'il entend y substituer le motif tiré de ce que la postulante a indûment perçu le complément de libre choix d'activité à taux plein, au titre de la prestation d'accueil du jeune enfant, et a ainsi méconnu la législation en matière sociale ;

5. Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 531-4 du code de la sécurité sociale, le complément de libre choix d'activité est versé à taux plein à la personne qui choisit de ne plus exercer d'activité professionnelle pour s'occuper d'un enfant ; que le ministre chargé des naturalisations, qui fait valoir qu'il résulte d'un courrier de la caisse d'allocations familiales des Hauts de Seine du 10 septembre 2010 que Mme A... a perçu au titre du mois d'août 2010 le taux plein du complément de libre choix d'activité, en déduit que l'intéressée, qui reconnaît elle-même avoir exercé des missions d'intérim au cours de son congé parental d'activité, se serait abstenue de déclarer celles-ci à la caisse ; que, toutefois, ni les feuilles de paye de Mme A... figurant au dossier, dont la plus ancienne est relative au mois d'octobre 2010, ni les déclarations de la requérante, dont le congé parental d'activité s'est prolongé jusqu'en octobre 2011, ne permettent de tenir pour établi qu'elle aurait exercé une activité professionnelle dès le mois d'août 2010 en s'abstenant d'en faire la déclaration à la caisse d'allocations familiales des Hauts de Seine, ou qu'elle aurait par la suite continué à percevoir indûment le taux plein du complément de libre choix d'activité ; que, dès lors, en décidant, pour le motif substitué à celui figurant dans la décision litigieuse du 4 juillet 2011, de maintenir l'ajournement à deux ans de la demande de naturalisation de Mme A..., le ministre chargé des naturalisations a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 3 janvier 2014 et la décision du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration du 4 juillet 2011 sont annulés.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 4 novembre 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme Buffet, premier conseiller,

- M. Pouget, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 novembre 2014.

Le rapporteur,

L. POUGET Le président,

A. PÉREZ

Le greffier,

S. BOYÈRE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT006452

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N° 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT00645
Date de la décision : 28/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : SYLLA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-11-28;14nt00645 ?
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