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18/09/2014 | FRANCE | N°14NT00400

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 18 septembre 2014, 14NT00400


Vu la requête, enregistrée le 19 février 2014, présentée pour M. et Mme B... et Isabelle C..., demeurant..., par Me D... du Lou, avocat au barreau d'Angers ; M. et Mme C... demandent à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 13-7886 du 5 février 2014 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la communauté de communes du Haut Anjou à leur verser la somme globale de 320 000 euros à titre de provision à valoir sur la réparation des conséquences dommageables de l'accident de moto dont M. C... a

été victime le 28 mai 2010 ;

2°) de condamner solidairement la communa...

Vu la requête, enregistrée le 19 février 2014, présentée pour M. et Mme B... et Isabelle C..., demeurant..., par Me D... du Lou, avocat au barreau d'Angers ; M. et Mme C... demandent à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 13-7886 du 5 février 2014 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la communauté de communes du Haut Anjou à leur verser la somme globale de 320 000 euros à titre de provision à valoir sur la réparation des conséquences dommageables de l'accident de moto dont M. C... a été victime le 28 mai 2010 ;

2°) de condamner solidairement la communauté de communes du Haut Anjou et la société Groupama Loire Bretagne à leur verser une provision totale de 320 000 euros en réparation de leurs préjudices ;

3°) de mettre à la charge solidaire de la communauté de communes du Haut Anjou et de la société Groupama Loire Bretagne la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative pour les frais de première instance ainsi que la somme de 1 500 euros pour les frais exposés en appel ;

ils soutiennent :

- que l'ordonnance sera confirmée en ce que le juge des référés a constaté que la chaussée empruntée lors de l'accident était en très mauvais état et a reconnu un défaut d'entretien normal de l'ouvrage public ; que l'absence de signalisation n'est pas davantage contestée ;

- que le lien de causalité entre l'état de l'ouvrage et l'accident est établi dès lors qu'il empruntait cette voie dont le défaut d'entretien est démontré ; que la chute s'est produite devant un témoin ;

- que le juge des référés a renversé la charge de la preuve dans la mesure où ces seuls éléments sont suffisants à établir le lien de causalité entre le dommage et le défaut d'entretien ; que ses déclarations, corroborées par le procès-verbal de gendarmerie, suffisent à établir les circonstances de l'accident ; que le dommage de travaux public constaté en l'espèce fait peser sur la communauté de communes une présomption de responsabilité dont elle ne peut s'exonérer puisqu'elle a elle-même reconnu le mauvais état de la chaussée, qui a également été constaté par les gendarmes ;

- que les défendeurs ont mis en avant une faute de sa part du seul fait de l'accident sans que celle-ci soit corroborée par aucun élément ; qu'ils ont d'ailleurs reconnu qu'elle ne les exonérait que partiellement ; que les contestations de la communauté de communes et de son assureur ne sont pas sérieuses ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 mars 2014, présenté pour la communauté de communes du Haut Anjou, représentée par son président en exercice, et la caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles Bretagne Pays de la Loire, dite Groupama Loire Bretagne, par Me Huvey, avocat au barreau d'Angers, qui conclut au rejet de la requête, et à titre subsidiaire, à ce que la SAS Juge Camille les garantissent de toutes condamnations prononcées à leur encontre et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge des consortsC..., ou de tout défaillant, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elles soutiennent :

- que le juge des référés s'est borné à constater un trafic inhabituel sur la voie en raison d'une déviation ; que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, il n'a pas constaté de défaut d'entretien normal de l'ouvrage mais au contraire a relevé que les circonstances et la cause précises de l'accident et partant son lien de causalité avec l'entretien de la voie étaient en l'état de l'instruction sérieusement contestables ;

- qu'aucun témoin n'était présent au moment de l'accident ; que ni le procès-verbal de gendarmerie, ni les autres pièces du dossier ne permettent de constater qu'il y avait un trou dans la chaussée ;

- qu'en faisant réaliser des travaux sur cette voie quelques jours avant l'accident la communauté de communes a fait preuve d'une diligence normale ;

- que M. C... avait une connaissance des lieux, et savait que la voie était provisoirement utilisée de façon importante et qu'elle avait fait l'objet de travaux ; que le danger n'était pas totalement imprévisible ; que la signalisation ne pouvait être continue ; que la vitesse à laquelle roulait M. C... était probablement excessive ; que ces éléments laissent apparaître des fautes qui ne peuvent qu'exclure sinon limiter toute obligation à indemnisation ;

- que les requérants font état de préjudices qui ne sont pas établis ; que Mme C... n'est pas une victime directe ;

- qu'il appartenait à la société Juge Camille de prendre toutes mesures pour procéder aux reprises d'éventuelles dégradations de la chaussée ; que cette société était également chargée de la signalisation et du fléchage de la déviation et de toute signalisation temporaire ; qu'il lui appartenait enfin d'informer la communauté de communes d'un risque accru de dégradation compte tenu de la météo ou du trafic ; qu'elle devra donc la garantir de toute condamnation ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 mai 2014, présenté pour M. et Mme C..., qui concluent aux mêmes fins que leur requête, par les mêmes moyens ;

ils soutiennent en outre que, contrairement à ce que prétendent la communauté de communes et son assureur, M. C... ne connaissait pas bien les lieux et empruntait rarement cette voie ;

Vu les autres pièces du dossier et notamment les photographies produites le jour de l'audience ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er septembre 2014 :

- le rapport de Mme Gélard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

- les observations de Me D...du Lou Maillard, conseil de M. et Mme C...,

- et les observations de MeA..., substituant Me Huvey, avocat de la communauté de communes du Haut Anjou et de Groupama Loire Bretagne ;

1. Considérant que M. C..., né en 1971 et exerçant la profession de plombier chauffagiste au sein de sa propre entreprise, a été victime d'un accident de la circulation le 28 mai 2010, vers 18 heures 30, en se rendant à moto au supermarché de Châteauneuf sur Sarthe, alors qu'il circulait sur la route communale reliant les routes départementales 89 et 859 ; que l'intéressé, atteint de multiples fractures et aujourd'hui paraplégique, a présenté une demande en réparation auprès de la communauté de communes du Haut Anjou, responsable de l'entretien de cette voie communale ; qu'il a saisi le 5 décembre 2012 le tribunal administratif de Nantes de conclusions indemnitaires ; que cette instance est actuellement pendante devant cette juridiction ; que, le 9 octobre 2013, M. C... et son épouse ont parallèlement saisi le juge des référés d'une demande tendant à la condamnation de la communauté de communes du Haut Anjou et de son assureur, la société Groupama Loire Bretagne, à leur verser à titre de provision la somme globale de 320 000 euros à valoir sur la réparation de leurs préjudices ; que, par une ordonnance du 5 février 2014, le juge des référés de ce tribunal a rejeté leur demande ; que les consorts C...font appel de cette ordonnance ;

Sur les conclusions dirigées contre la communauté de communes du Haut Anjou et son assureur :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie. " ;

3. Considérant qu'il appartient à l'usager, victime d'un dommage survenu sur une voie publique, de rapporter la preuve du lien de causalité entre l'ouvrage public et le dommage dont il se plaint ; que la collectivité en charge de l'ouvrage public doit alors, pour que sa responsabilité ne soit pas retenue, établir que l'ouvrage public faisait l'objet d'un entretien normal ou que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure ;

4. Considérant que, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme C..., le juge des référés du tribunal administratif de Nantes n'a pas constaté un défaut d'entretien de la voie publique mais s'est borné à relever que l'état de la route était affecté par un trafic inhabituel en raison d'une déviation mise en place pour procéder à des travaux de voirie dans le bourg de la commune de Châteauneuf sur Sarthe, précisant en outre que les circonstances et causes précises de l'accident et, par voie de conséquence, le lien de causalité entre cet accident et l'état d'entretien de la voie étaient sérieusement contestables ; qu'il résulte en effet de l'instruction, et notamment des procès-verbaux de gendarmerie établis à la suite de l'accident, que M. C... a perdu le contrôle de sa moto " en roulant sur les gravillons situés en bordure de chaussée " ; que si ce dernier soutient, quant à lui, avoir aperçu sur la voie un trou de 1,50 mètres de long et 10 centimètres de profondeur et ne pas avoir pu l'éviter, ni ces affirmations contradictoires, ni les pièces produites au dossier, et en particulier les photographies communiquées par les requérants, ne permettent de confirmer la réalité des faits ainsi invoqués et, par suite, le lien de causalité entre un éventuel mauvais état de la chaussée et l'accident ; que, dans ces conditions, et alors au surplus que la société de travaux publics Juge Camille avait été mandatée quelques jours avant l'accident par la communauté de communes pour procéder à une réfection provisoire de la chaussée, qu'elle a effectivement réalisée le 25 mai 2010 soit 3 jours avant l'accident, c'est à juste titre que le juge des référés du tribunal administratif de Nantes, qui n'a pas renversé la charge de la preuve incombant aux parties, a estimé qu'en l'état de l'instruction et à défaut de plus amples éléments suffisamment probants, la créance des consorts C...ne pouvait être regardée comme non sérieusement contestable ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions d'appel en garantie présentées par la communauté de communes du Haut Anjou contre la société Juge Camille :

6. Considérant qu'en l'absence de condamnation prononcée à leur encontre, les conclusions de la communauté de communes du Haut Anjou et de la société Groupama Loire Bretagne tendant à être garanties par la société Juge Camille sont dépourvues d'objet et ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

En ce qui concerne les frais exposés en première instance :

7. Considérant que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a rejeté les conclusions des consorts C...tendant à la condamnation de la communauté de communes du Haut Anjou et de la société Groupama Loire Bretagne à leur verser la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il a fait une exacte application de ces dispositions, lesquelles faisaient obstacle à ce que soit mise à la charge de ces deux parties, qui n'étaient pas perdantes en première instance, une somme à verser aux époux C...au titre des frais exposés par eux ; que, par suite, les intéressés ne sont pas fondés à contester le rejet devant le tribunal administratif de leurs conclusions présentées sur ce fondement ;

En ce qui concerne les frais exposés en appel :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communes de communes du Haut Anjou et de la société Groupama Loire, qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance, le versement à M. et Mme C... de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de ces derniers le versement à la communauté de communes et à son assureur de la somme qu'ils demandent au titre des mêmes frais ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées en appel par la communauté de communes du Haut Anjou et la société Groupama Loire sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... C..., à la communauté de communes du Haut Anjou, à la société Groupama Loire Bretagne et au RSI Pays de la Loire.

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2014, où siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- Mme Gélard, premier conseiller,

- M. Lemoine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 septembre 2014.

Le rapporteur,

V. GÉLARDLe président,

I. PERROT

Le greffier,

A. MAUGENDRE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT00400


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT00400
Date de la décision : 18/09/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SCP AVOCATS CONSEILS REUNIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-09-18;14nt00400 ?
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