Vu la requête, enregistrée le 3 mai 2013, présentée pour la société Parc Résidentiel de Coat Moor, dont le siège est zone d'activités Kermaria 2 à Pont-L'abbé (29120), par Me Bois, avocat au barreau de Rennes ; la société Parc Résidentiel de Coat Moor demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1001534 du 15 mars 2013 du tribunal administratif de Rennes en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre le titre de recettes émis le 15 septembre 2009 par le maire de Pont-l'Abbé, contre le bien-fondé de l'obligation de payer résultant du commandement de payer du 8 février 2010 émis par la trésorerie de Pont-l'Abbé et contre la décision du maire de Pont-l'Abbé du 23 mars 2010 ;
2°) d'annuler le titre de recettes du 15 septembre 2009 ;
3°) de la décharger de l'obligation de payer la somme de 98 550 euros ;
4°) à titre subsidiaire, de dire que le montant de la participation à sa charge s'élève à la somme de 51 027,34 euros ;
5°) de mettre à la charge de la commune de Pont-l'Abbé une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
elle soutient que :
- sa requête devant le tribunal administratif était recevable ;
- l'arrêté du 30 mai 2006 est illégal dès lors que, contrairement aux dispositions de l'article L. 332-8 du code de l'urbanisme, il a été pris sans l'accord du conseil général du département ;
- le titre de recette et le commandement de payer méconnaissent l'article 4 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 dès lors qu'ils ne comportent ni la signature, ni le prénom, ni le nom ni la qualité de leur auteur et que le bordereau-journal des titres de recette produit par la mairie ne comporte pas non plus ces indications ;
- le titre de recette qui ne mentionne pas les bases de liquidation, est illégal ;
- la participation n'est pas applicable à un programme d'habitation, ce qui est le cas du parc résidentiel de Coat Moor, résidence privée à usage exclusif d'habitation qui ne présente pas un caractère commercial dès lors qu'il n'est pas ouvert au public, qu'il est réservé aux résidents et à leur habitation et que chaque résident s'engage à devenir propriétaire d'un lot ;
- le tourne-à-gauche ne présente pas le caractère d'un équipement routier exceptionnel, mais celui d'un aménagement courant ;
- le montant des travaux a augmenté en raison de travaux supplémentaires sans lien avec son projet ;
- cet équipement ne répond pas aux besoins exclusifs de la société, mais également à celui d'un camping ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 juillet 2013, présenté par le centre des finances publiques de Pont-l'Abbé, qui conclut au rejet de la requête ;
il soutient que la requête est irrecevable, la régularité du commandement de payer émis par la trésorerie de Pont-l'Abbé ne relevant pas du juge administratif ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 juillet 2013, présenté par la commune de Pont-l'Abbé, représentée par son maire, par Me Bernot, avocat au barreau de Rennes, qui conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de la société Parc Résidentiel de Coat Moor une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
elle soutient que :
- la requête est irrecevable en tant qu'elle concerne la régularité du commandement de payer, dont la compétence ne ressortit pas à la juridiction administrative ;
- le moyen tiré de ce que l'avis du département du Finistère, gestionnaire de la route départementale n° 44 (RD 44), n'aurait pas été recueilli préalablement manque en fait, l'agent technique départementale de Pont-l'Abbé n'étant pas une personne morale distincte du conseil général du Finistère, et le conseil général, dont l'accord n'était pas requis, s'étant prononcé par courrier à deux reprises sur l'aménagement de cette route aux fins de desserte du projet de parc résidentiel de loisirs, et ayant donné un accord de principe au projet ;
- le bordereau-journal des titres de recettes et le titre de recettes comportent les mentions nécessaires ;
- le titre de recettes mentionne les bases de liquidation par référence à l'autorisation d'aménager, qui en est le fondement ; le montant réclamé correspond au montant exigible en
vertu de l'article 5 de l'arrêté du 30 mai 2006 ;
- le parc résidentiel de loisirs entre dans le champ d'application des dispositions de l'article L. 332-8 du code de l'urbanisme ;
- la qualification du projet au regard de l'article L. 332-8 s'apprécie lors de la demande de permis d'aménager, qui a été, en l'espèce, présentée par la société requérante, laquelle est une société commerciale, en vue de la réalisation d'un parc résidentiel de loisirs qui a par nature un caractère commercial de sorte qu'en conséquence la société requérante a réalisé une opération commerciale ;
- la réalisation du tourne-à-gauche présente le caractère d'un équipement public exceptionnel dès lors qu'il était nécessaire à la délivrance du permis d'aménager ;
- le fait que le camping voisin bénéficie de l'aménagement en cause est sans incidence sur la nécessité de l'aménagement du carrefour de la RD 44 pour la réalisation du parc résidentiel de loisirs ;
- le projet d'aménagement du carrefour était effectivement envisagé depuis 2004, année d'origine du projet de parc résidentiel de loisirs ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 18 novembre 2013, présenté par la société Parc Résidentiel de Coat Moor, par Me Bois, avocat au barreau de Rennes, qui tend aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;
elle soutient en outre que :
- en tant qu'autorité gestionnaire de l'équipement, le département devait donner son accord pour sa réalisation, ce qu'il n'a fait ni dans le courrier du 30 mars ni dans celui du 27 juillet 2005 ;
- le titre de recettes ne contient pas avec précision les bases de la liquidation dès lors que la délibération du 29 janvier 2009 mentionne la somme de 51 027,34 euros et que le titre de recettes ne mentionne ni l'augmentation du montant à verser, porté à 95 680 euros, ni le caractère hors taxes ou toutes taxes comprises ;
- le recours dirigé contre le titre exécutoire devant s'apprécier à la date à laquelle statue le juge, la qualification de l'opération au moment du dépôt de la demande est indifférente ; l'aménagement en cause étant un programme d'habitation, elle doit être déchargée de cette participation, conformément à la doctrine de l'administration ;
- le tourne à gauche, dont la réalisation était nécessaire indépendamment du projet, notamment en raison de la dangerosité du débouché du camping des Châtaigniers sur la route, est un aménagement public courant hors du champ d'application de l'article L. 332-8 du code de l'urbanisme ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er juillet 2014 :
- le rapport de Mme Piltant, premier conseiller ;
- les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;
- les observations de Me A..., substituant Me Bois, avocat de la société Parc Résidentiel de Coat Moor ;
- et les observations de MeB..., substituant Me Bernot, avocat de la commune de Pont-l'Abbé ;
1. Considérant que, par arrêté du 30 mai 2006, le maire de la commune de Pont-l'Abbé a autorisé la société Parc Résidentiel de Coat Moor, venant au droit de la société Coat Moor, à aménager un parc résidentiel de loisirs de 65 emplacements sur des parcelles d'une superficie totale de 31 715 m² situées au lieu-dit Kerséoc'h sur la commune de Pont-l'Abbé ; que ce projet nécessitant la réalisation d'un équipement public exceptionnel sur la route départementale n° 44, l'article 5 de cet arrêté prévoit qu'une participation spécifique de 80 000 euros hors taxes sera exigée du bénéficiaire de cette autorisation ; que la société Parc Résidentiel de Coat Moor s'est vu notifier un titre de recettes exécutoire émis par la commune le 15 septembre 2009 pour la somme de 95 680 euros et que, le 8 février 2010, le comptable du trésor de Pont-l'Abbé a émis à l'encontre de la société requérante un commandement de payer d'un montant de 98 550 euros ; que la société Parc Résidentiel de Coat Moor relève appel du jugement du 15 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa requête tendant à l'annulation du titre exécutoire et du commandement de payer et à la décharge, ou à titre subsidiaire, à la réduction, de l'obligation de payer ;
Sur la compétence du juge administratif :
2. Considérant que le moyen tiré de ce que le commandement de payer ne comporterait pas la signature, le nom, le prénom et la qualité de son auteur porte sur la régularité en la forme de cet acte, et ne saurait, dès lors, ressortir à la compétence du juge administratif ;
Sur la fin de non recevoir opposée par la commune de Pont-l'Abbé :
3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. (...) " ; que la requête de la société Parc Résidentiel de Coat Moor, dirigée contre un acte tendant à percevoir une somme destinée au financement de travaux publics, constitue une demande présentée en matière de travaux publics ; que la condition de délai posée par l'article R. 421-1 du code de justice administrative ne lui est donc pas opposable ; que, par suite, la fin de non recevoir doit être écartée ;
Sur le titre de recettes et sur la décharge de l'obligation de payer :
4. Considérant que la société Parc Résidentiel de Coat Moor fait valoir que le titre de recettes méconnait l'article 4 de la loi du 12 avril 2000, en ce qu'il ne comporte ni la signature, ni le prénom, ni le nom ni la qualité de son auteur, et que le bordereau-journal des titres de recettes ne comporte pas non plus ces indications ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : " Sont considérées comme autorités administratives au sens de la présente loi les administrations de l'Etat, les collectivités territoriales (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de la même loi : " (...) Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci " ; qu'aux termes de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction alors applicable : " (...) 4° Le titre de recettes individuel ou un extrait du titre de recettes collectif est adressé aux redevables sous pli simple (...) / En application de l'article 4 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif mentionne les nom, prénoms et qualité de la personne qui l'a émis ainsi que les voies et délais de recours. / Seul le bordereau de titres de recettes est signé pour être produit en cas de contestation (...) " ; qu'un titre de recettes émis par le maire d'une commune constitue une décision administrative au sens de l'article 1er de la loi du 12 avril 2000 ; qu'en application des dispositions de l'article 4 de cette loi, selon lesquelles le destinataire d'une décision administrative doit pouvoir constater que son auteur l'a signée, combinées avec l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, il appartient à l'autorité administrative concernée, dans le cas où, comme en l'espèce, le titre de recettes reçu par son destinataire n'est pas signé et n'indique pas le nom, le prénom et la qualité de son auteur, de justifier que le bordereau de titre de recettes a été signé et comporte les mentions requises par la loi ;
6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, si le titre de recettes en date du 15 septembre 2009 comporte les mentions " l'ordonnateur ", et " le maire ", mais ne comporte ni la signature ni l'indication de l'identité de son auteur, le bordereau-journal des titres de recettes produit par la commune de Pont-l'Abbé est revêtu d'une signature manuscrite, d'un cachet et des mentions " l'ordonnateur ", et " le maire " ; qu'ainsi, il n'en résultait pour la société Parc Résidentiel de Coat Moor aucune ambigüité quant à l'identité du signataire de cet acte ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du titre de recettes doit être écarté ;
7. Considérant toutefois qu'aux termes de l'article L. 332-8 du code de l'urbanisme : " Une participation spécifique peut être exigée des bénéficiaires des autorisations de construire qui ont pour objet la réalisation de toute installation à caractère industriel, agricole, commercial ou artisanal qui, par sa nature, sa situation ou son importance, nécessite la réalisation d'équipements publics exceptionnels. / Lorsque la réalisation des équipements publics exceptionnels n'est pas de la compétence de l'autorité qui délivre le permis de construire, celle-ci détermine le montant de la contribution correspondante, après accord de la collectivité publique à laquelle incombent ces équipements ou de son concessionnaire " ;
8. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du courrier du 14 mai 2004 adressé par la direction départementale de l'équipement du Finistère au géomètre-expert, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté, que la circulation sur la route départementale n° 44 est très forte et que le débouché sur cette route est extrêmement dangereux ; que si les travaux envisagés sur cette route, qui consistent en l'aménagement d'un tourne-à-gauche, ont effectivement pour effet d'améliorer les conditions d'accès au parc résidentiel, ils profitent à l'ensemble des usagers de cette route ; qu'ils ont le caractère d'aménagements courants de la voirie et ne peuvent être regardés, eu égard à leur localisation, leur importance et leur coût, comme se rapportant à la réalisation d'équipements publics exceptionnels au sens des dispositions précitées de l'article L. 332-8 du code de l'urbanisme ; que, par suite, la société Parc Résidentiel de Coat Moor est fondée à soutenir que ces travaux n'entraient pas dans le champ d'application des dispositions de l'article L.332-8 du code de l'urbanisme ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Parc Résidentiel de Coat Moor est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la décharge de la participation spécifique mise à sa charge en exécution de l'arrêté du 30 mai 2006 du maire de la commune de Pont-l'Abbé l'autorisant à aménager un parc résidentiel de loisirs ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la société Parc Résidentiel de Coat Moor, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme sollicitée par la commune de Pont-l'Abbé au titre des frais exposée par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Pont-l'Abbé le versement de la somme de 2 000 euros à la société Parc Résidentiel de Coat Moor au même titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rennes du 15 mars 2013 est annulé.
Article 2 : Le titre de recettes émis le 15 septembre 2009 par le maire de Pont-l'Abbé est annulé.
Article 3 : La société Parc Résidentiel de Coat Moor est déchargée de la participation spécifique mise à sa charge au titre de l'autorisation d'aménager un parc résidentiel de loisirs délivrée le 30 mai 2006 et de l'obligation de payer la somme correspondant au montant de cette participation.
Article 4 : La commune de Pont-l'Abbé versera à la société Parc Résidentiel de Coat Moor une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Parc Résidentiel de Coat Moor est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Parc Résidentiel de Coat Moor, à la commune de Pont-l'Abbé et au directeur départemental des finances publiques des Côtes d'Armor.
Une copie en sera adressée au centre des finances publiques de Pont-l'Abbé.
Délibéré après l'audience du 1er juillet 2014, à laquelle siégeaient :
- M. Bachelier, président de la Cour,
- M. Millet, président-assesseur,
- Mme Piltant, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 21 juillet 2014.
Le rapporteur,
C. PILTANT Le président,
G. BACHELIER
Le greffier,
C. GOY
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N° 13NT01351 2
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