Vu la requête, enregistrée le 15 janvier 2014, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par Me Poulard, avocat ; M. B...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1304537 du 17 septembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de la préfète de la Mayenne du 3 mai 2013 porte refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Mayenne, de lui délivrer un titre de séjour, ou à défaut de réexaminer sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au profit de Me Poulard, qui renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
il soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les articles L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'exception d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour entraine le constat de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est intervenue en méconnaissance du principe général du droit à une bonne administration et au respect des droits de la défense tel que garanti par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 mai 2014, présenté par la préfète de la Mayenne, qui conclut au rejet de la requête ;
elle soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour ne méconnaît pas l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans la mesure où il existe un traitement disponible au Cameroun pour le traitement de l'épilepsie ;
- la décision portant refus de titre de séjour ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le moyen d'exception d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour invoqué à l'appui de la contestation de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas fondé ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnait pas le principe général du droit à une bonne administration et au respect des droits de la défense tel que garanti par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la décision fixant le pays de renvoi ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le mémoire, enregistré le 4 juin 2014 présenté pour M. B... qui conclut aux mêmes fins que la requête ;
il ajoute que :
- il a été hospitalisé à plusieurs reprises en raison de crises d'épilepsie ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la décision de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes en date du 17 décembre 2013 admettant M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale au titre de cette instance et désignant Me Poulard pour le représenter ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 juin 2014 le rapport de M. Monlaü, premier conseiller ;
1. Considérant que M. B..., ressortissant camerounais, relève appel du jugement en date du 17 septembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de la préfète de la Mayenne du 3 mai 2013 porte refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. Considérant, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. (...) " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, que la décision du 3 mai 2013 par laquelle le préfet de la Mayenne a rejeté la demande présentée par M. B... sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été prise au vu d'un avis médical du 4 avril 2013, par lequel le médecin de l'agence régionale de santé des pays de la Loire a estimé que l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale pour une durée de un an dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existait pas de traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé pour sa prise en charge médicale ; qu'il appartenait alors au préfet de démontrer qu'il existe au Cameroun un système de soins appropriés à l'état de santé du requérant ; qu'en l'espèce, le préfet de la Mayenne, qui se limite, en se référant au document réalisé avec l'appui de l'Organisation mondiale de la santé en 2006 dressant une simple liste des médicaments et autres produits pharmaceutiques essentiels disponibles dans ce pays, à soutenir qu'il existe un traitement approprié à la pathologie de M.B..., victime de crises d'épilepsie, ne saurait être regardé comme démontrant, à la date de la décision contestée, l'existence de soins appropriés à l'état de santé du requérant alors surtout que ce dernier produit un certificat médical du 6 septembre 2012 indiquant différentes prescriptions médicamenteuses devant être suivie pour le traitement de l'affection dont il est victime ne figurant pas dans la liste mentionnée ci-dessus ; que, dans ces conditions, le préfet de la Mayenne ne peut être regardé comme établissant, contrairement à l'avis du médecin de l'agence régionale de santé publique, l'existence au Cameroun d'un traitement adapté à l'affection neurologique lourde dont est atteint M. B... ; que ce dernier est, dès lors, fondé, à soutenir que la décision portant refus de titre de séjour a été prise en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
5. Considérant que le présent jugement implique nécessairement, eu égard aux motifs de l'annulation prononcée, qu'il soit enjoint à la préfète de la Mayenne de délivrer à M. B..., dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction de l'astreinte sollicitée ;
Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :
6. Considérant que M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Poulard, avocat de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Poulard de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du 17 septembre 2013 du tribunal administratif de Nantes et l'arrêté de la préfète de la Mayenne du 3 mai 2013 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Mayenne de délivrer à M. B...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Sous réserve que Me Poulard, avocat de M.B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Poulard de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Une copie sera transmise à la préfète de la Mayenne.
Délibéré après l'audience du 19 juin 2014, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- M. Monlaü, premier conseiller,
Lu en audience publique le 10 juillet 2014.
Le rapporteur,
X. MONLAÜLe président,
H. LENOIR
Le greffier,
C. CROIGER
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT00065