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12/06/2014 | FRANCE | N°13NT01002

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 12 juin 2014, 13NT01002


Vu la requête, enregistrée le 25 mars 2013, présentée pour Mme A... B... et pour son fils, M. C... B..., ayant élus domicile chez Me Weben, 77 rue de Bernières à Caen (14000), par Me Weben, avocat au barreau de Caen ; Mme et M. B... demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 12-626 du 24 janvier 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Caen à réparer les préjudices subis par eux du fait de l'infection nosocomiale dont a été victime Mme A...B... dans les suites de l'in

tervention pratiquée sur elle dans cet établissement le 7 mars 2008 ;
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Vu la requête, enregistrée le 25 mars 2013, présentée pour Mme A... B... et pour son fils, M. C... B..., ayant élus domicile chez Me Weben, 77 rue de Bernières à Caen (14000), par Me Weben, avocat au barreau de Caen ; Mme et M. B... demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 12-626 du 24 janvier 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Caen à réparer les préjudices subis par eux du fait de l'infection nosocomiale dont a été victime Mme A...B... dans les suites de l'intervention pratiquée sur elle dans cet établissement le 7 mars 2008 ;

2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Caen à verser à Mme A... B...la somme totale de 18 800 euros et à M. C... B..., son fils, la somme de 3 000 euros ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Caen, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, la somme de 3 000 euros à verser à Me Weben sous réserve que celui-ci renonce à la contribution versée par l'État au titre de l'aide juridictionnelle ;

ils soutiennent :

- que la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Caen, qui n'a pas rapporté la preuve d'une cause étrangère à l'infection à E. Coli dont Maria B...a été atteinte lors de son hospitalisation, est engagée ;

- que la toux violente provoquée par cette infection est la cause de la désunion du sternum à l'origine d'une reprise chirurgicale ; que le lien de causalité entre l'infection nosocomiale et les conséquences de cette seconde intervention est donc établi ;

- que, du fait des conséquences de cette intervention, son hospitalisation a été prolongée de quinze jours, soit une incapacité temporaire totale équivalente, que les souffrances endurées ont été évaluées par l'expert à 4 sur une échelle de 7, qu'elle a subi un préjudice moral résultant de la crainte qu'une nouvelle fracture de son sternum se produise ; que le préjudice moral de son fils, M. C... B..., inquiet pour la santé de sa mère, s'élève à 3 000 euros ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 13 juin 2013, présenté pour M. C... B... qui informe la cour du décès de Maria B... le 18 avril 2013 et de ce qu'il est le seul héritier à poursuivre l'instance ;

Vu la mise en demeure adressée le 24 octobre 2013 à la caisse primaire d'assurance maladie du Calvados, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 27 novembre 2013, présenté pour le centre hospitalier universitaire de Caen, par Me Le Prado, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, qui conclut au rejet de la requête ;

il fait valoir :

- que la requête d'appel, qui ne critique pas la motivation du jugement attaqué et reproduit la demande de première instance, n'est pas recevable ;

- que le rapport d'expertise a conclu à l'absence de tout préjudice résultant de l'infection nosocomiale contractée ; qu'en particulier, la fracture sternale résulte d'une toux sans lien avec l'infection en litige ; que la patiente souffrait avant l'intervention d'une broncopneumopathie chronique obstructive sévère associée à des crises d'asthme ; que la consolidation normale du sternum exclut d'ailleurs toute origine infectieuse de sa fracture ;

- que le germe en cause étant d'origine certainement endogène, il rapporte la preuve d'une cause étrangère ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 mai 2014, présenté pour M. C... B..., qui conclut aux mêmes fins que dans sa requête, par les mêmes moyens ; il soutient en outre :

- que sa requête est recevable ;

- que Marie B...ne présentait aucune toux avant son séjour à l'hôpital ;

Vu la décision du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes en date du 23 avril 2013, admettant M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale au titre de cette instance et désignant Me Weben pour le représenter ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mai 2014 :

- le rapport de M. Lemoine, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

1. Considérant que Marie B..., alors âgée de 84 ans et qui souffrait de lourds antécédents respiratoires, a été admise au centre hospitalier universitaire de Caen pour y subir, le 7 mars 2008, une intervention de remplacement de valve aortique par une bioprothèse et une thromboendartériectomie de l'artère carotidienne droite ; que les suites de cette intervention ont été marquées par l'apparition d'une toux importante puis par une désunion sternale avec hémorragie justifiant une reprise chirurgicale qui fut effectuée le 12 mars 2008 ; que les prélèvements réalisés à cette occasion ont mis en évidence la présence d'un germe de type E. Coli nécessitant une antibiothérapie ; que Marie B...a alors saisi le juge des référés du tribunal administratif de Caen d'une requête tendant à la désignation d'un expert ; que le professeur Azarin, désigné par une ordonnance du juge des référés de ce tribunal du 31 juillet 2008, a déposé son rapport le 1er octobre 2009 ; que, sur la base des conclusions de ce rapport, le tribunal, par le jugement attaqué du 24 janvier 2013, a retenu la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Caen dans l'infection nosocomiale contractée lors de l'intervention du 7 mars 2008 mais a écarté le lien de causalité entre cette infection et la fracture du sternum dont les requérants demandaient la réparation ; qu'il a, en conséquence, rejeté les demandes indemnitaires dont il était saisi par les consortsB... ; que Marie B..., décédée au cours de la présente instance, et son fils, M. C... B..., qui déclare reprendre l'instance engagée par sa mère, ont relevé appel de ce jugement ;

Sur la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Caen :

2. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. / Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère " ; que ces dispositions font peser sur l'établissement de santé la responsabilité des dommages résultant des infections nosocomiales, qu'elles soient exogènes ou endogènes, à moins que la preuve d'une cause étrangère ne soit apportée et à condition que l'infection survenant au cours ou au décours d'une prise en charge n'ait été ni présente, ni en incubation au début de cette prise en charge ;

3. Considérant qu'il résulte du rapport de l'expertise ordonnée par le tribunal administratif de Caen que c'est au cours de son hospitalisation que Marie B...a contracté une infection à E. Coli, ce germe endogène d'origine intestinale, mis en évidence lors de la seconde intervention du 12 mars 2008, s'étant probablement propagé à l'occasion de l'intervention du 7 mars 2008 ; que l'expert a indiqué notamment que, faute de document bactériologique permettant de démontrer l'existence d'une cause étrangère, cette infection du site opératoire profond présentait un caractère nosocomial ; qu'en se bornant à invoquer sans autre élément une contamination endogène le centre hospitalier universitaire de Caen ne rapporte pas la preuve d'une cause étrangère imprévisible et irrésistible de nature à l'exonérer de sa responsabilité dans l'infection contractée par MarieB... ;

4. Mais considérant que, si les requérants soutiennent que la fracture du sternum dont a été victime Marie B... résulte de l'infection bronchique d'origine nosocomiale qui serait à l'origine des fortes toux apparues dans les suites de la première opération du 7 mars 2008, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert, que cette fracture, d'origine mécanique liée à des efforts de toux, est en lien avec l'état de santé antérieur de la patiente qui souffrait d'un asthme ancien et d'une bronchopneumopathie chronique obstructive à l'origine de cette toux, et avec son âge et la fragilité de ses os, mais ne résulte pas d'une sternite révélant une infection de cet os, et que la parfaite consolidation du sternum, sans pseudarthrose, témoigne, à distance, d'un aspect mécanique et non infectieux de la fracture constatée ; que par suite, en l'absence de lien de causalité direct et certain entre l'infection nosocomiale contractée par Marie B...et la rupture sternale ayant conduit à la reprise chirurgicale intervenue le 12 mars 2008, M. B... n'est pas fondé à demander l'indemnisation des préjudices subis tant par lui que par sa mère du fait des suites de cette seconde intervention ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B..., présentée en son nom propre et en qualité d'héritier de sa mère MariaB..., est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., au centre hospitalier universitaire de Caen et à la caisse primaire d'assurance maladie du Calvados.

Délibéré après l'audience du 27 mai 2014, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- Mme Gélard, premier conseiller,

- M. Lemoine, premier conseiller.

Lu en audience publique le 12 juin 2014.

Le rapporteur,

F. LEMOINELe président,

I. PERROT

Le greffier,

C. GUÉZO

La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT01002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT01002
Date de la décision : 12/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. François LEMOINE
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : WEBEN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-06-12;13nt01002 ?
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