Vu la requête, enregistrée le 27 mai 2013, présentée pour Mme B... A...adi, demeurant ..., par Me Khadir-Cherbonnel, avocat au barreau de Marseille, qui demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1106162 du 31 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 mai 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a ajourné à deux ans sa demande de réintégration dans la nationalité française ;
2°) d'annuler la décision du préfet des Bouches-du-Rhône du 27 janvier 2011 ;
elle soutient que :
- la décision contestée procède d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- sa situation n'a pas été appréciée en son entier, tant en fait qu'en droit ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu la décision du 9 avril 2013 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille a admis Mme B... C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 février 2014, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;
il fait valoir que :
- le recours exercé devant le ministre l'a été tardivement ; par suite, la requête devant le juge est irrecevable ;
- il n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 avril 2014 :
- le rapport de M. Durup de Baleine, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;
1. Considérant que Mme C..., ressortissante comorienne née en 1973, relève appel du jugement du 31 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 mai 2011 par laquelle le ministre chargé des natutalisations a ajourné à deux ans sa demande réintégration dans la nationalité française ; que les conclusions de sa requête doivent être regardées comme dirigées contre cette décision, qui s'est substituée à celle du préfet des Bouches-du-Rhône du 27 janvier 2011 ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " Hors le cas prévu à l'article 21-14-1 l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 : " (...) Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient au postulant, s'il le juge opportun, de formuler une nouvelle demande " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre chargé des naturalisations de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la réintégration dans la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le postulant ainsi le degré d'autonomie matérielle du postulant, apprécié au regard du caractère suffisant et durable des ressources propres lui permettant de demeurer en France ;
3. Considérant que, par la décision contestée du 19 mai 2011, le ministre a ajourné à deux ans la demande de réintégration dans la nationalité française présentée par Mme B...C..., aux motifs qu'elle avait séjourné irrégulièrement sur le territoire français de 1998 à 2001 et que ses ressources, majoritairement constituées de prestations sociales, ne lui permettaient pas de garantir l'autonomie matérielle de son foyer ;
4. Considérant, en premier lieu, que si le ministre peut, sans erreur de droit, opposer le motif de l'irrégularité du séjour pour rejeter ou ajourner la demande du postulant, il ne saurait, en l'absence de toute autre circonstance, retenir ce seul motif lorsque l'ancienneté des faits est telle qu'elle est de nature à entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...C..., entrée en France le 16 janvier 1998, n'a obtenu un premier titre de séjour que le 29 août 2001 ; que, depuis cette date, elle séjourne régulièrement sur le territoire ; qu'eu égard à l'ancienneté de ces faits de séjour irrégulier, dont le terme remonte à plus de huit ans à la date de la décision contestée, le ministre ne pouvait, sans entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation, se fonder sur le motif tiré de l'irrégularité du séjour de la postulante ;
6. Considérant, toutefois et en second lieu, qu'il ressort également des pièces du dossier qu'à la date de la décision en litige, Mme B... C...exerçait à temps partiel une activité salariée d'agent d'entretien lui procurant une rémunération basée sur le salaire minimum interprofessionnel de croissance horaire ; que l'intéressée, pour subvenir à ses besoins et à ceux de ses deux enfants mineurs, percevait de la caisse d'allocations familiales des Bouches-du-Rhône diverses prestations, dont le montant s'élevait à plus du double de son salaire net mensuel ; que, dans ces conditions, le ministre, dont il résulte de l'instruction qu'il aurait pris la même décision en se fondant sur le seul motif tiré du défaut d'autonomie matérielle de la postulante, a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, ajourner à deux ans la demande présentée par Mme B...C... ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par le ministre, Mme B... C...n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B...C...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 23 avril 2014, à laquelle siégeaient :
- M. Iselin, président de chambre,
- M. Millet, président-assesseur,
- M. Durup de Baleine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 mai 2014.
Le rapporteur,
A. DURUP de BALEINE Le président,
B. ISELIN
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 13NT01470 2
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