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30/04/2014 | FRANCE | N°13NT01984

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 30 avril 2014, 13NT01984


Vu la requête, enregistrée le 5 juillet 20013, présentée pour M. C... A..., demeurant..., par Me Launay, avocat au barreau de Caen, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300380 du 30 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 janvier 2013 par lequel le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer un visa de long séjour et un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination en cas d'éloignement d'

office ;

2°) d'annuler l'arrêté du 31 janvier 2013 ;

3°) d'ordonner au ...

Vu la requête, enregistrée le 5 juillet 20013, présentée pour M. C... A..., demeurant..., par Me Launay, avocat au barreau de Caen, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300380 du 30 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 janvier 2013 par lequel le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer un visa de long séjour et un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination en cas d'éloignement d'office ;

2°) d'annuler l'arrêté du 31 janvier 2013 ;

3°) d'ordonner au préfet du Calvados de lui délivrer un titre de séjour ou une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à rendre et sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

il soutient que :

- le refus de délivrance d'un visa de long séjour procède d'une erreur de droit, dès lors que le mariage n'est pas frauduleux et que le préfet s'est estimé tenu de lui refuser ce visa du seul

fait de l'entrée irrégulière ;

- le moyen tiré du défaut d'examen particulier des circonstances de l'espèce est fondé ;

- ce refus méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le refus de titre de séjour est irrégulier en l'absence d'avis de la commission du titre de séjour et de l'insuffisance de l'examen de sa situation personnelle ;

- ce refus méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence et méconnaît, en outre, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du 30 septembre 2013 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes a admis M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu l'ordonnance du 25 février 2014 fixant la clôture de l'instruction au 14 mars 2014 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 mars 2014, présenté par le préfet du Calvados, qui conclut au rejet de la requête et déclare s'en rapporter à ses écritures et pièces en première instance ;

Vu l'ordonnance du 13 mars 2014 décidant la réouverture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2014 :

- le rapport de M. Durup de Baleine, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;

1. Considérant que M. A..., ressortissant sierra-léonais né en 1993 entré en France en 2010, a demandé la reconnaissance de la qualité de réfugié, qui lui a été refusée par une décision de la cour nationale du droit d'asile du 29 août 2012 ; qu'en outre, s'étant marié le 31 mars 2012 avec une ressortissante française, il a demandé au préfet du Calvados, en sa qualité de conjoint de cette personne, la délivrance d'un visa de long séjour et d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'il relève appel du jugement du 30 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 31 janvier 2013 par lequel ce préfet a refusé de lui délivrer ce visa ainsi qu'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination en cas d'exécution d'office de cette obligation ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de délivrance d'un visa de long séjour :

2. Considérant qu'aux termes des dispositions du sixième alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet n'a compétence pour délivrer le visa de long séjour exigé par l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que lorsque sont remplies toutes les conditions qu'elles prévoient, notamment l'entrée régulière en France du demandeur, à l'exception toutefois du cas où la condition d'un séjour en France depuis plus de six mois avec le conjoint ne pourrait être satisfaite du fait d'une rupture de la vie commune en raison de violences conjugales subies de la part du conjoint ; qu'il en résulte que le préfet ne dispose pas d'un pouvoir d'appréciation en opportunité lui permettant de délivrer ce visa alors même que ces conditions ne seraient pas satisfaites ; qu'il est constant que M. A... est arrivé en France en 2010 dans des conditions irrégulières ; que, pour cette seule raison, le préfet du Calvados était tenu de lui refuser la délivrance, sur place, d'un visa de long séjour ; qu'il en résulte que les moyens de la requête tendant à l'annulation de l'article 1 de l'arrêté du 31 janvier 2013 sont inopérants ; qu'ils ne peuvent qu'être qu'écartés ;

En ce qui concerne le refus de délivrance d'un titre de séjour :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; / (...) " ; que ces dispositions ne font pas obligation au préfet de refuser le titre de séjour qu'elles prévoient à un étranger ne remplissant pas l'ensemble des conditions auxquelles elles subordonnent sa délivrance de plein droit ; que, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire qui lui est ainsi confié, il appartient au préfet d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé et des conditions non remplies, l'opportunité d'une mesure de régularisation ;

4. Considérant, en premier lieu, que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour, lorsqu'il envisage de refuser un titre de séjour mentionné à l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que du cas des étrangers qui remplissent effectivement l'ensemble des conditions de procédure et de fond auxquelles est subordonnée la délivrance d'un tel titre ; que la production d'un visa de long séjour délivré, le cas échéant, selon les modalités fixées au sixième alinéa de l'article L. 211-2-1 de ce code, est au nombre des conditions auxquelles est subordonnée la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du même code ; que, dès lors, le préfet peut refuser une telle carte de séjour en se fondant sur le défaut de production par l'étranger d'un visa de long séjour sans avoir à saisir au préalable la commission du titre de séjour ; qu'en l'espèce, M. A..., ni n'a pas présenté de visa de long séjour, ni ne conteste l'absence de vie commune avec son épouse de nationalité française ; qu'il en résulte que le préfet du Calvados n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de refuser la carte de séjour temporaire sollicitée par l'intéressé sur ce fondement ; que le moyen tiré du défaut de consultation de cette commission doit, dès lors, être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte du point 2 du présent arrêt que le refus de délivrance d'un titre de séjour qui a été opposé à M. A... n'est pas illégal en raison du refus de lui délivrer un visa de long séjour selon les modalités fixées au sixième alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant, en troisième lieu, que, contrairement à ce qui est soutenu, il ressort des motifs de l'arrêté attaqué que le préfet du Calvados ne s'est pas estimé tenu de refuser à M. A... la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française du seul fait que, ne pouvant justifier d'une entrée régulière en France, il ne justifie par suite pas davantage de la présentation d'un visa de long séjour, mais a recherché, au vu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle, notamment familiale, de l'intéressé, si, en dépit de ce que ce dernier ne remplissait pas l'ensemble des conditions mises par le 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à la délivrance du titre de séjour sollicité, il y avait néanmoins lieu de lui délivrer ce titre ; que, de même, le moyen selon lequel le préfet n'aurait pas examiné l'ensemble des circonstances de l'affaire doit être écarté ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort des termes mêmes de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la présentation par l'étranger d'un visa de long séjour est l'une des conditions légales mises à la délivrance de la carte de séjour temporaire prévue au 4° de l'article L. 313-11 du même code ; que, dès lors, en retenant qu'en l'absence d'un tel visa, M. A... ne remplit pas l'ensemble de ces conditions légales, le préfet du Calvados, qui n'a pas commis d'erreur de fait, n'a pas davantage commis une erreur de droit ;

8. Considérant, en cinquième et dernier lieu, que le mariage de M. A... avec une ressortissante française est très récent à la date de l'arrêté contesté ; qu'en outre, le requérant, qui n'est présent en France que depuis le mois d'octobre 2010, ne justifie d'aucune communauté de vie avec son épouse et n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales hors de ce pays, notamment dans son pays d'origine et ce, en dépit de la présence en France de M. B... A...que le requérant allègue être son frère ; que le requérant, en outre, ne démontre pas être dans l'impossibilité de poursuivre sa vie privée et familiale hors de France ; qu'il en résulte qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet du Calvados n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels a été prise cette décision ; que le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne saurait, par suite, être accueilli ; que le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de l'intéressé ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant que, si le requérant soutient que l'obligation qui lui est faite par l'article 3 de l'arrêté contesté de quitter le territoire français dans un délai de trente jours doit être annulée en raison de l'illégalité des refus de lui délivrer un visa de long séjour et un titre de séjour ainsi que d'une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs énoncés aux points 12 et 13 du jugement attaqué ;

En ce qui concerne le pays de destination :

10. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué comporte l'énoncé des raisons de fait et de droit sur lesquelles le préfet du Calvados s'est fondé pour décider qu'à défaut pour M. A... de quitter la France dans le délai de trente jours, il pourra être reconduit d'office à destination du pays dont il déclare posséder la nationalité ou de tout pays dans lequel il serait légalement admissible ; qu'en outre, et surabondamment, elle énonce que l'intéressé n'établit pas que, dans l'un de ces pays, sa vie ou sa liberté seraient menacées ou qu'il y serait exposé à des peines ou traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision fixant le pays de destination doit être écarté ;

11. Considérant, en second lieu, que le requérant se borne à réitérer devant le juge d'appel le moyen tiré de ce qu'il serait exposé dans son pays d'origine à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui seraient ainsi méconnues, sans apporter à l'appui de ce moyen aucune justification nouvelle ; qu'il y a lieu, par adoption des motifs énoncés au point 16 du jugement, d'écarter ce moyen ; qu'en outre, le requérant déclarant être de nationalité sierra-léonaise, le préfet du Calvados n'a pu commettre aucune erreur d'appréciation en fixant notamment la Sierra Léone comme destination d'une éventuelle reconduite d'office hors du territoire français ;

12. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

13. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions tendant à ce que, sous astreinte, soit ordonnée la délivrance à M. A... d'un titre ou d'une autorisation provisoire de séjour ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

14. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement d'une somme à ce titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 10 avril 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Iselin, président de chambre,

- M. Millet, président-assesseur,

- M. Durup de Baleine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 avril 2014.

Le rapporteur,

A. DURUP de BALEINELe président,

B. ISELIN

Le greffier,

F. PERSEHAYE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT01984 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT01984
Date de la décision : 30/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ISELIN
Rapporteur ?: M. Antoine DURUP de BALEINE
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : SELARL CHRISTOPHE LAUNAY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-04-30;13nt01984 ?
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