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13/03/2014 | FRANCE | N°13NT01534

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 13 mars 2014, 13NT01534


Vu la requête, enregistrée le 31 mai 2013, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me Thévenard, avocat ; M. B... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1203683 en date du 28 mars 2013, par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 42 315,80 euros en réparation du préjudice subi par lui du fait de l'illégalité de la décision du 24 octobre 2007 du ministre de l'intérieur invalidant son permis de conduire ;

2°) de condamner l'

Etat à lui verser la somme de 42 315,80 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'E...

Vu la requête, enregistrée le 31 mai 2013, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me Thévenard, avocat ; M. B... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1203683 en date du 28 mars 2013, par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 42 315,80 euros en réparation du préjudice subi par lui du fait de l'illégalité de la décision du 24 octobre 2007 du ministre de l'intérieur invalidant son permis de conduire ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 42 315,80 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- l'illégalité fautive de décisions de retraits de points en raison d'un vice de procédure, est de nature à engager la responsabilité de l'administration pour faute simple, comme cela a été jugé par le tribunal dans un précédent jugement du 4 août 2009 et qu'ainsi le jugement du tribunal administratif attaqué ne pouvait pas rejeter sa demande indemnitaire au motif de l'absence de contestation des infractions qui lui étaient reprochées, alors qu'il n'est pas établi qu'il n'a pas contesté la réalité des infractions ;

- la méconnaissance de l'obligation d'information préalable est à l'origine de son préjudice, dès lors que s'il avait reçu notification des décisions de retraits de points, il aurait pu les contester et que s'il avait été informé des retraits de points, il aurait été à même de suivre un stage pour récupérer ces points, ce qui aurait évité l'annulation de son permis pour solde de points nul ;

- en raison de la faute de l'administration, il a été privé de son permis de conduire pendant 20 jours en 2007 et 73 jours en 2008, ce qui lui a causé un préjudice professionnel, qui s'élève au titre de l'année 2007 à une somme de 3 836 euros, et au titre 2008 à une somme de 18 894,38 euros, un préjudice d'agrément évalué à 4 395,43 euros résultant de ce qu'il a été contraint de demander à son épouse de le véhiculer sur les chantiers où il travaillait, et un préjudice tenant à la perte de chance sérieuse d'obtenir des commandes sur les chantiers et d'économiser des frais de carburants supplémentaires évalué à 15 000 euros ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 septembre 2013, présenté par le ministre de l'intérieur qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- l'intéressé n'apporte aucun élément de fait et de droit nouveau par rapport au litige soumis au tribunal administratif devant lequel il a produit un mémoire en défense en date du 11 mars 2012 ;

- le Conseil d'Etat juge que le vice de procédure entachant un retrait de points ne constitue pas la cause du préjudice résultant de ce retrait de points ; la jurisprudence des cours juge que lorsque la décision est justifiée au fond la réparation du préjudice est exclue ;

- le requérant n'est pas fondé à soutenir que le défaut de notification de points l'aurait privé de la possibilité d'effectuer un stage de récupération de points alors que les décisions de retraits de points lui sont notifiées ;

Vu la décision de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes en date du 29 juillet 2013 admettant M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale au titre de cette instance et désignant Me Thévenard pour le représenter ;

Vu la lettre en date du 14 février 2014 informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt à intervenir est susceptible d'être fondé sur un moyen soulevé d'office

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 février 2014 :

- le rapport de M. Monlaü, premier conseiller,

- et les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public ;

1. Considérant que M. B... relève appel du jugement en date du 28 mars 2013, par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 42 315,80 euros en réparation du préjudice subi par lui du fait de l'illégalité de la décision du 24 octobre 2007 du ministre de l'intérieur invalidant son permis de conduire ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-13 du code de justice administrative : "Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin (...) statue en audience publique et après audition du rapporteur public : (...) 7° Sur les actions indemnitaires, lorsque le montant des indemnités demandées est inférieur au montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 ; (...) 10o Sur les litiges relatifs au permis de conduire" ; qu'aux termes de l'article R. 222-14 du même code : "Les dispositions du 7° de l'article précédent sont applicables aux demandes dont le montant n'excède pas 10 000 euros" ; qu'aux termes de l'article R. 222-15 dudit code : "Ce montant est déterminé par la valeur totale des sommes demandées dans la requête introductive d'instance (...)" ;

3. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées des articles R. 222-13, R. 222-14 et R 222-15 du code de justice administrative que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans n'était pas compétent pour statuer sur la demande de M. B... tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme totale de 42 315,80 euros en réparation de ses préjudices du fait de l'illégalité des décisions de retraits de points de son permis de conduire ; que, par suite, le jugement attaqué est irrégulier et doit être annulé ;

4. Considérant qu'il y a lieu de statuer immédiatement par la voie de l'évocation sur la demande présentée par M. B... ;

Sur les conclusions tendant à la mise en jeu de la responsabilité de l'Etat pour faute :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 223-1 du code de la route : "Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire du permis a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue. (...) La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive" ;

6. Considérant que le vice de procédure entachant un retrait de points d'un permis de conduire ne constitue pas la cause du préjudice résultant de ce retrait de points dès lors que la

réalité de l'infraction commise par le titulaire du permis n'est pas contestée ;

7. Considérant en premier lieu, que le relevé d'information intégral relatif à la situation de M. B... en date du 5 février 2013, lui-même extrait du système national du permis de conduire, fait état d'une infraction du 4 avril 2006 tenant à un refus d'obtempérer à une sommation de s'arrêter ayant donné lieu à une condamnation du juge judiciaire devenue définitive le 4 janvier 2007 et à une infraction du 29 janvier 2007 tenant à un excès de vitesse inférieur à 20 km/h devenue définitive le 20 avril 2007 du fait du paiement de l'amende forfaitaire par le requérant ; que M. B... ne remet pas en cause utilement les mentions figurant sur son relevé intégral d'information en se bornant à alléguer qu'il n'est pas établi qu'il n'a pas contesté ces deux infractions ; que la réalité des infractions en cause doit ainsi être tenue pour établie conformément aux dispositions de l'article L. 223-1 du code de la route ; que, dès lors, le vice de procédure commis lors de la constatation des infractions du 4 avril 2006 et du 29 janvier 2007, n'est pas susceptible d'ouvrir un droit à réparation au profit de M. B... ;

8. Considérant en second lieu, que si M. B... soutient que la faute de l'administration l'a privé d'une chance sérieuse de suivre un stage de récupération de points et d'éviter la perte de son permis pour solde de points nuls, il ne le démontre pas ; que, par suite, le requérant n'est pas davantage fondé à soutenir qu'il aurait été privé de la possibilité de pouvoir contester des retraits de points du fait de l'absence de notification des décisions portant retraits de points dès lors que la formalité de défaut de notification de points est sans incidence sur la légalité des retraits de points ; que dans ces conditions, le lien de causalité entre l'illégalité fautive commise par l'administration et les préjudices qu'il invoque doit être écarté ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande de M. B... doit être rejetée ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement au conseil de M. B... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans en date du 15 mars 2013 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif d'Orléans et le surplus des conclusions de la requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 20 février 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Monlaü, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 mars 2014.

Le rapporteur,

X. MONLAÜ Le président,

H. LENOIR

Le greffier,

C. CROIGER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13NT01534
Date de la décision : 13/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Xavier MONLAU
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : THEVENARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-03-13;13nt01534 ?
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