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28/02/2014 | FRANCE | N°13NT00770

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 28 février 2014, 13NT00770


Vu la requête, enregistrée le 8 mars 2013, présentée pour M. D... B..., demeurant au..., par Maître Eveno, avocat au barreau de Nantes ;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1009093 en date du 2 juillet 2012 par lequel le Tribunal Administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 juin 2010, par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du consul général de France à Dakar, refusant de délivrer un visa d'entrée

et de long séjour à l'enfant AbdramaneB... ;

2°) d'annuler, pour excès de pou...

Vu la requête, enregistrée le 8 mars 2013, présentée pour M. D... B..., demeurant au..., par Maître Eveno, avocat au barreau de Nantes ;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1009093 en date du 2 juillet 2012 par lequel le Tribunal Administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 juin 2010, par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du consul général de France à Dakar, refusant de délivrer un visa d'entrée et de long séjour à l'enfant AbdramaneB... ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

il soutient que :

- le jugement du tribunal administratif est entaché d'un défaut de motivation quant à l'absence de méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par la décision contestée ;

- la commission des recours contre les refus de visa d'entrée en France a commis une erreur d'appréciation en refusant de délivrer le visa sollicité pour l'enfant AbdramaneB... ; au regard des pièces du dossier, la décision contestée ne pouvait être prise sur le seul fondement d'une radiographie du bassin ; un retard de croissance peut être imputé au manque de moyens financiers de la grand-mère paternelle en charge des deux enfants depuis le décès de leur mère ; le lien de filiation est parfaitement établi par les documents d'identité d'Abdramane B...ainsi que par une reconnaissance de paternité ;

- la décision contestée porte une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale ; les frères et soeurs, le père, et la belle-mère du demandeur de visa résident sur le territoire français ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 avril 2013, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;

le ministre soutient que :

- le jugement du tribunal administratif est régulier, dès lors que le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits et des libertés fondamentales est fondé sur le défaut de lien de filiation ;

- la demande de visa au bénéfice de l'enfant Abdramane B...constitue une tentative avérée de fraude à l'état civil ; un test osseux indique une différence entre l'âge théorique et l'âge physiologique de l'enfant ; l'identité du demandeur de visa n'est donc pas établie ;

- les dispositions de la convention européenne de sauvegarde des droits et des libertés fondamentales ne sont pas exécutoires à l'égard de l'enfant AbdramaneB..., qui n'est ni ressortissant, ni résident d'un Etat partie à la convention ;

Vu la décision du 9 janvier 2013 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes admettant M. B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 février 201 :

- le rapport de M. Millet, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;

- et les observations de M.A..., représentant le ministre de l'intérieur ;

1. Considérant que M.B..., d'origine sénégalaise, est entré en France le 25 octobre 1994 ; qu'il a obtenu la nationalité française le 1er avril 2003 ; qu'il a eu, de sa précédente union avec Mme C...B..., deux enfants, Abdramane B...né en 1992 et DembaB..., né en 1994 ; qu'à la suite de leur séparation, en 1994, la mère en a obtenu la garde ; que M. B...a reconnu ses deux enfants le 16 juin 2000 ; que le 28 février 2005, ces enfants ont été confiés à leur grand-mère paternelle, à la suite du décès de leur mère ; que M. B...a alors déposé une demande de visa de long séjour le 19 novembre 2007 auprès du consulat général de France à Dakar au bénéfice des enfants Abdramane B...et DembaB... ; que le 6 avril 2009, une radiographie du bassin a été pratiquée à la demande des autorités consulaires sur les deux enfants ; que ce même jour, un visa de long séjour a été délivré à l'enfant DembaB... ; que le 7 janvier 2010, la demande de visa présentée pour l'enfant Abdramane B...a, toutefois, été rejetée par les autorités consulaires, en référence à un rapport médical du 6 octobre 2009 mentionnant que les poids et taille de l'intéressé, ainsi que le test osseux pratiqué, révélaient un âge réel de l'enfant inférieur à celui mentionné dans les documents d'état civil remis à l'occasion de la demande de visa ; qu'à cette décision du 7 janvier 2010 s'est substituée la décision contestée de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France du 17 juin 2010 ; que M. B...relève appel du jugement du 2 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

2. Considérant que pour refuser le visa sollicité, la commission de recours s'est fondée sur les résultats d'une radiographie du bassin de l'enfant effectuée à la demande des autorités consulaires le 6 avril 2009 ; qu'il résulte de cet examen que " la maturation osseuse n'est pas encore commencée au niveau des ailerons iliaques, ce qui correspond à un âge osseux de moins de quinze ans " ; qu'un rapport médical du 6 octobre 2009 conclut que ce test osseux révèle un âge réel de l'enfant ne pouvant correspondre à l'âge de dix-sept ans mentionné dans les documents d'état civil de l'intéressé ; qu'il est, toutefois, constant que l'enfant AbdramaneB..., qui a été reconnu par M. B...le 16 juin 2000, a été confié avec son frère, dont il n'a jamais été séparé, à leur grand-mère paternelle à la suite du décès de leur mère en 2005 ; que, dès lors, la seule circonstance que l'examen osseux pratiqué par un cabinet de radiologie agréé par le consulat général de France fasse apparaître un écart d'environ deux ans entre l'âge physiologique de l'enfant, évalué suivant cette méthode, et celui résultant de l'acte de naissance, n'est pas de nature à remettre en cause le caractère authentique de la copie littérale de l'acte de naissance de l'enfant, établi par l'officier d'état civil compétent de Bakel, ni à démontrer que la demande de visa présenterait un caractère frauduleux, ou que la personne se présentant sous l'identité d'Abdramane B...serait une tierce personne ; qu'ainsi, en estimant que les documents produits étaient de nature à établir l'absence de lien de filiation entre Abdramane B...et M. D...B..., la commission a inexactement apprécié les faits de l'espèce ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 2 juillet 2012 et la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 17 juin 2010 sont annulés.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 7 février 2014, où siégeaient :

- M. Iselin, président de chambre,

- M. Millet, président-assesseur,

- M. Durup de Baleine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 février 2014.

Le rapporteur,

J. MILLETLe président,

B. ISELIN

Le greffier,

F. PERSEHAYE

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N° 13NT00770


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT00770
Date de la décision : 28/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ISELIN
Rapporteur ?: M. Jean-Frédéric MILLET
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : SCM HAJJI HENRY LARIDON CAILLAUD ALLIOUX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-02-28;13nt00770 ?
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