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28/02/2014 | FRANCE | N°13NT00203

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 28 février 2014, 13NT00203


Vu la requête, enregistrée le 21 janvier 2013, présentée pour M. D... B..., demeurant..., par Me Said Mohamed, avocat au barreau de Paris ;

M. B... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1009936 du 20 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours contre la décision du 23 novembre 2010 de l'ambassadeur de France en Guinée rejetant les demandes de visas d'entr

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Vu la requête, enregistrée le 21 janvier 2013, présentée pour M. D... B..., demeurant..., par Me Said Mohamed, avocat au barreau de Paris ;

M. B... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1009936 du 20 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours contre la décision du 23 novembre 2010 de l'ambassadeur de France en Guinée rejetant les demandes de visas d'entrée de long séjour présentées par Mme C...B...et M. A...B...en qualité de famille de réfugié statutaire ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'ordonner au consulat de France à Conakry de délivrer les visas sollicités dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- l'identité de Mme B...est établie par un acte de naissance authentique ; en se bornant à fonder sa décision sur les incohérences des actes de naissances de Mme B...sans prendre en compte le dossier dans son intégralité, le jugement attaqué est entaché d'une violation de la loi ;

- en vertu des dispositions de l'article 47 du code civil et de la loi du 14 novembre 2006, l'administration aurait du procéder aux vérifications des actes auprès des autorités guinéennes avant de rejeter la demande ;

- le lien marital est établi ;

- eu égard aux dispositions de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le jugement attaqué doit être annulé, en ce qu'il se borne à apprécier la validité de son mariage, sans chercher à vérifier l'intensité et la véracité des liens familiaux pourtant établies par la naissance de son fils BallaB... ;

- la filiation avec son fils Bala B...n'est pas contestée et le refus de délivrance de visa de long séjour est dès lors injustifié ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 avril 2013, présenté par le ministre de l'intérieur ;

il soutient que :

- en application de l'article 47 du code civil, le consulat général de France à Conakry a bien effectué des levées d'actes, restées sans réponse ; l'identité de Mme B...ne peut être établie, dès lors qu'elle a produit deux actes de naissances comportant des mentions contradictoires ; la production d'un faux document suffit à caractériser une menace pour l'ordre public et est de nature à justifier les refus de visas ;

- si le requérant se prévaut de l'existence d'un lien marital, ni des actes de mariage entachés d'erreurs, ni aucun élément ne permettent d'établir l'existence d'un lien juridique et d'une communauté de vie entre les époux ;

- il en va de même pour l'enfant Balla en 1998, pour lequel les deux actes de naissance produits sont irréguliers, car entachés d'erreur manifeste ;

- l'intention frauduleuse de M. et Mme B...à des fins d'installation durable sur le territoire français par tous moyens est démontrée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 février 2014 :

- le rapport de Mme Allio-Rousseau, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;

1. Considérant que M. D...B..., ressortissant guinéen bénéficiant en France depuis le 26 janvier 2005 du statut de réfugié, a déposé une demande de regroupement familial, dans le cadre de la procédure de famille rejoignante de réfugié statutaire, au profit de Mme C...B...et M. A...B..., qu'il présente respectivement comme son épouse et son fils ; que dans le cadre de cette procédure, ces derniers ont sollicité la délivrance de visa d'entrée et de long séjour auprès des autorités consulaires de Conakry ; que, par décision du 23 novembre 2010, le consul général a rejeté ces deux demandes ; qu'une décision implicite de rejet est née du silence gardé par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, à la suite du recours administratif préalable obligatoire formé contre la décision consulaire ; que. M. B...relève appel du jugement du 20 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint et aux enfants d'un réfugié statutaire les visas qu'ils sollicitent ; qu'elles ne peuvent opposer un refus à une telle demande que pour un motif d'ordre public, notamment en cas de fraude ; qu'au nombre des motifs d'ordre public de nature à fonder légalement le refus de visa figure le caractère frauduleux des actes d'état civil étrangers produits pour établir le lien de filiation, le lien matrimonial et l'identité des membres de la famille du réfugié ;

3. Considérant que, pour rejeter les demandes de visa d'entrée et de long séjour présentées par Mme C...B...et M. A...B..., la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur la circonstance que la présentation de deux actes de naissance les concernant qui mentionnent des informations contradictoires est constitutive d'une manoeuvre frauduleuse justifiant le rejet de leur demande et ne permet pas, par ailleurs, d'établir la réalité de leur identité ;

4. Considérant qu'il résulte de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil ; que si ce dernier prévoit que les actes d'état civil faits en pays étranger et selon les formes usitées dans ce pays font foi, il n'en va toutefois pas ainsi, lorsque d'autres actes ou pièces, des données extérieures ou des éléments tirés de ces actes eux-mêmes établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que ces actes sont irréguliers, falsifiés ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ;

En ce qui concerne M. A...B... :

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le ministre en charge des visas conteste l'existence d'un lien de filiation entre M. D...B...et l'enfant ; que, pour l'établir, deux actes de naissance n°64 registre n°1 du 18 février 1998 et n° 36 registre n° 1 du 19 février 1998 ont été produits ; qu'ils présentent tous deux des divergences quant à la date et au lieu de naissance de la mère de l'intéressé, qui sur le premier de ces actes est raturé, ainsi que sur leur numéro d'enregistrement ; qu'à l'appui de son recours contentieux, M. B...a produit une nouvelle copie de l'acte de naissance n° 64, faisant état d'une date de naissance modifiée de la mère de l'enfant ; que ces erreurs grossières contenues dans des extraits d'actes de naissance dressés dans des communes différentes sont de nature à remettre en cause la valeur probante des pièces d'état civil produites et ne permettent d'établir ni l'identité, ni le lien de filiation entre M. B...et l'enfant ;

En ce qui concerne Mme C...B... :

6. Considérant que les copies d'extraits d'actes de naissance concernant MmeB..., qui ont été établis dans deux communes de Guinée, en 1970 et 1982 selon leurs termes, mentionnent des dates de naissances différentes pour Mme B...et pour ses parents ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'autorité consulaire française en Guinée a, sur le fondement des dispositions de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 47 du code civil, a vainement sollicité des autorités compétentes locales une levée d'actes ; que si M. B...fait valoir que " pour des raisons inexpliquées " l'acte de naissance fourni à la sous-direction des visas dans le cadre de la procédure de regroupement familial mentionne le 3 avril 1982 comme date de naissance alors que l'intégralité des autres actes d'état civil et les documents officiels font apparaître la date du 9 août 1970, il ressort, d'une part, du formulaire renseigné le 7 novembre 2008 auprès de la sous-direction des visas qu'il a certifié que son épouse était née en 1982, et d'autre part, des actes de naissance de M. A...B..., que sa mère est née soit en 1970, soit en 1982 ; que, par ailleurs, devant les autorités en charge des visas, le requérant s'était prévalu à la fois de son mariage coutumier avec Mme B...et de son mariage civil conclu en 1998 par la production d'un acte d'état civil dont il est constant qu'il est inauthentique ; que si un mariage civil a été contracté entre le requérant et Mme C...B...le 13 octobre 2011 au Mali, soit postérieurement à la date de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, M. B...ne produit pas d'éléments probants de nature à justifier de l'existence d'un lien marital avec Mme B...à la date de la décision en litige ou d'une liaison suffisamment stable et continue avec cette dernière à la date de sa demande d'admission au statut de réfugié ; que le lien familial invoqué par le requérant, du fait de la naissance de M. A...B..., n'est pas établi ; qu'il en résulte que la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France était fondée à estimer, sans entacher sa décision d'une erreur de droit ou d'une erreur d'appréciation, que les documents produits par le requérant ne présentaient pas de caractère authentique et n'étaient pas de nature à établir l'identité de Mme B...et la réalité du lien matrimonial entre cette dernière et M.B... ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au consulat général de France de Conakry de délivrer un visa de long séjour à Mme C...B...et M. A...B...ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à M. B...de la somme de 2 500 euros demandée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 7 février 2014, où siégeaient :

- M. Iselin, président de chambre,

- M. Millet, président assesseur,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 28 février 2014.

Le rapporteur,

M-P. ALLIO-ROUSSEAULe président,

B. ISELIN

Le greffier,

F. PERSEHAYE

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N° 13NT00203


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT00203
Date de la décision : 28/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ISELIN
Rapporteur ?: Mme Marie-Paule ALLIO-ROUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : SAID MOHAMED

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-02-28;13nt00203 ?
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