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17/01/2014 | FRANCE | N°13NT00717

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 17 janvier 2014, 13NT00717


Vu le recours, enregistré le 4 mars 2013, présenté par le ministre de l'intérieur, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105069 du 28 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration en date du 24 mars 2011 rejetant la demande d'acquisition de la nationalité française présentée par M. A... ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Nantes ;

il soutient que :

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Vu le recours, enregistré le 4 mars 2013, présenté par le ministre de l'intérieur, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105069 du 28 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration en date du 24 mars 2011 rejetant la demande d'acquisition de la nationalité française présentée par M. A... ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Nantes ;

il soutient que :

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

- les premiers juges ont méconnu l'étendue de leur contrôle en la matière ;

- subsidiairement, il y aurait lieu de procéder à une substitution de motifs, en raison du comportement fiscal sujet à critique du postulant ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 mai 2013, présenté pour M. A... par Me N'Demazou, avocat au barreau de la Seine-Saint-Denis, qui conclut au rejet du recours et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il fait valoir que :

- les faits délictueux sont anciens et le postulant justifie d'une bonne moralité ;

- le tribunal s'est livré à une exacte appréciation des circonstances de l'espèce ;

- la demande de substitution de motifs ne peut être accueillie ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 18 juin 2013, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut aux mêmes fins que son recours, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie ;

Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 décembre 2013 :

- le rapport de M. Durup de Baleine, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;

1. Considérant que, par une décision du 8 octobre 2010, le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire a rejeté la demande de naturalisation présentée par M. A..., ressortissant ivoirien né en 1974 ; que le ministre de l'intérieur relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 24 mars 2011 par laquelle le ministre chargé des naturalisations a rejeté le recours dirigé par M. A... contre la décision du 8 octobre 2010 ;

Sur le recours du ministre de l'intérieur :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 49 du décret du 30 décembre 1993 : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient au postulant, s'il le juge opportun, de formuler une nouvelle demande. Ces décisions motivées sont notifiées à l'intéressé " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut, notamment, prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ;

3. Considérant que, pour rejeter la demande d'acquisition de la nationalité française présentée par M. A..., le ministre chargé des naturalisations s'est fondé sur la circonstance que le postulant a fait l'objet le 22 juin 2001 à Gennevilliers (Hauts-de-Seine) d'une procédure pour détention et usage d'un document administratif falsifié, en l'espèce un faux titre de séjour ;

4. Considérant que la matérialité de la détention et de l'usage d'un faux titre de séjour par M. A... en 2001 n'est pas contestée ; qu'en dépit de leur ancienneté, ces faits, revêtent un caractère certain de gravité ; qu'ainsi, et alors même que l'intéressé se prévaut des circonstances qui l'ont, selon lui, conduit à détenir et utiliser un tel document falsifié ainsi que de l'évolution favorable de sa situation personnelle depuis cette époque, et que ne ressortent pas du dossier d'autres renseignements défavorables le concernant, le ministre n'a, dans l'exercice du large pouvoir dont il dispose pour apprécier l'opportunité d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite, pas commis d'erreur manifeste ; que, dès lors, le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir qu'à tort et pour n'annuler d'ailleurs que la décision du 24 mars 2011 mais non celle du 8 octobre 2010, les premiers juges ont estimé qu'avait été commise une telle erreur manifeste d'appréciation ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... ;

6. Considérant que, si M. A... se prévaut des circonstances qu'il a été déjà jugé et a payé l'amende qui lui avait été infligée en raison de la détention et de l'usage d'un titre de séjour falsifié, ce moyen est toutefois sans incidence sur l'appréciation de la légalité de la décision contestée, qui est seulement fondée sur la matérialité des faits de détention et usage d'un faux titre de séjour ; qu'en outre, si l'intéressé soutient que la condamnation prononcée à son encontre aurait été, selon lui, couverte par une loi d'amnistie, cette circonstance, en tout état de cause, n'interdisait pas au ministre de tenir compte de tels faits dans son appréciation du comportement général du postulant à l'occasion de l'examen de sa demande de naturalisation ;

7. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 24 mars 2011 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée à ce titre par M. A... ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 28 décembre 2012 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Nantes ainsi que ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B... A....

Délibéré après l'audience du 20 décembre 2013, à laquelle siégeaient :

- M. Iselin, président de chambre,

- M. Millet, président-assesseur,

- M. Durup de Baleine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 janvier 2014.

Le rapporteur,

A. DURUP de BALEINE Le président,

B. ISELIN

Le greffier,

F. PERSEHAYE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT00717 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT00717
Date de la décision : 17/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ISELIN
Rapporteur ?: M. Antoine DURUP de BALEINE
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : N'DEMAZOU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-01-17;13nt00717 ?
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