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31/10/2013 | FRANCE | N°12NT02174

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 31 octobre 2013, 12NT02174


Vu la requête, enregistrée le 30 juillet 2012, présentée pour M. A... B..., demeurant au..., par Me Petit-Etienne, avocat au barreau de Coutances ; M. B... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-1844 du 16 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 juin 2011 par laquelle le préfet de la Manche a prononcé le retrait des aides découplées au titre de la campagne 2010 pour les parcelles déclarées sur les communes de Créances et de Pirou, et lui a appliqué une pénalité d'un montant pr

visionnel de 2 335,50 euros, ensemble la décision de cette autorité du 11...

Vu la requête, enregistrée le 30 juillet 2012, présentée pour M. A... B..., demeurant au..., par Me Petit-Etienne, avocat au barreau de Coutances ; M. B... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-1844 du 16 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 juin 2011 par laquelle le préfet de la Manche a prononcé le retrait des aides découplées au titre de la campagne 2010 pour les parcelles déclarées sur les communes de Créances et de Pirou, et lui a appliqué une pénalité d'un montant prévisionnel de 2 335,50 euros, ensemble la décision de cette autorité du 11 juillet 2011 confirmant le retrait de ces aides ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient :

- que les mesures effectuées par télédétection ne permettent pas d'établir la non-conformité de l'entretien des parcelles ; qu'il n'a jamais donné son approbation aux constatations faites le 14 octobre 2010 lors du contrôle effectué sur place ; que le document de procédure contradictoire terrain (DPCT) établi lors de cette visite ne comportait aucune mention relative au défaut d'entretien des parcelles ou d'entretien non-conforme ; que, les lignes de ce document concernant les ilots 3 et 4 ayant été barrées, la diminution des aides ne pouvait concerner ces ilôts ; que seuls les ilots 1 et 7 étaient concernés, pour lesquels un écart inférieur à 20 % a été constaté ;

- qu'aucune obligation d'entretien ne concerne les parcelles de " landes et parcours " ; que tant ces parcelles que celles en " taillis à courte rotation ouverts au cheptel " sont éligibles aux aides découplées ; que les 115 hectares déclarés par lui devaient être retenus soit au titre de parcelles de " landes et parcours " soit au titre de " taillis à courte rotation ouverts au cheptel " ; que le constat d'huissier établi le 2 septembre 2011 démontre que ces parcelles sont enherbées, cloturées et paturées par les animaux ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 septembre 2013, présenté par le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, qui conclut au rejet de la requête ;

il fait valoir :

- que lors du contrôle sur place du 14 octobre 2010, le requérant s'est opposé à la reconnaissance des écarts constatés par télédétection sur les ilots 3 et 4 ; que les contrôleurs de l'Agence de services et de paiement et de la DDTM de la Manche ont donc réalisé une inspection physique de ces ilots, qui a confirmé les écarts de surfaces repérés par télédétection ; que la signature du rapport de contrôle par l'exploitant ne s'opposait pas à l'adoption, par le préfet de la Manche, de la décision du 10 juin 2011 ;

- que les surfaces admissibles à l'activation des DPU sont des surfaces agricoles, définies notamment dans le cadre des bonnes conditions agricoles et environnementales ; que le compte-rendu du contrôle sur place du 14 octobre 2010 indique, concernant l'ilot 3, la présence de friches et bois qui ne pouvaient pas être considérés comme des surfaces herbacées ; que le constat d'huissier produit par le requérant n'est pas de nature à remettre en cause les appréciations portées lors du contrôle sur place ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil du 19 janvier 2009 établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs, modifiant les règlements (CE) n° 1290/2005, (CE) n° 247/2006 et (CE) n° 378/2007, et abrogeant le règlement (CE) n° 1782/2003 ;

Vu le règlement (CE) n° 1120/2009 de la commission en date du 29 octobre 2009 portant modalités d'application du régime de paiement unique prévu par le titre III du règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs ;

Vu le règlement (CE) n° 1122/2009 de la Commission du 30 novembre 2009 fixant les modalités d'application du règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité, la modulation et le système intégré de gestion et de contrôle dans le cadre des régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs prévus par ce règlement ainsi que les modalités d'application du règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité dans le cadre du régime d'aide prévu pour le secteur vitivinicole ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu l'arrêté du 26 juillet 2010 du préfet de la Manche fixant les normes locales et les règles relatives aux bonnes conditions agricoles et environnementales des terres du département de la Manche ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 octobre 2013 :

- le rapport de M. Lemoine, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

1. Considérant que M. B..., exploitant agricole dans la Manche, a déposé le 3 mai 2010 une demande d'aide à la surface dans le cadre des aides de la politique agricole commune (PAC) au titre de la campagne 2010, pour 79 hectares 13 centiares sur la commune de Créances et 78 hectares 81 centiares sur la commune de Pirou ; que, des anomalies dans ses déclarations ayant été détectées à la suite d'un contrôle des surfaces par télédétection réalisé le 24 août 2010, un contrôle sur place a été effectué le 14 octobre 2010, au cours duquel un document de procédure contradictoire de terrain a été établi ; que, sur la base des relevés ainsi réalisés, le portefeuille final des droits à paiement unique (DPU) 2010, établi à hauteur d'une superficie totale de 94 hectares au lieu des 158 ha déclarés, a été notifié au requérant le 30 décembre 2010 ; que, M. B... ayant demandé, le 24 février 2011, le réexamen des DPU activés pour la campagne 2010, le préfet de la Manche a, le 20 mai 2011, rejeté ce recours gracieux et lui a adressé, le 10 juin 2011, la lettre contradictoire de fin d'instruction des surfaces et DPU 2010 récapitulant les écarts de surfaces éligibles aux aides constatés, et lui notifiant l'annulation des aides découplées et l'application d'une pénalité prévisionnelle de 2 335,50 euros en raison d'un écart entre surfaces déclarées et surfaces constatées supérieur au seuil de tolérance ; que, le nouveau recours gracieux formé par lui le 23 juin 2011 contre ces décisions du préfet de la Manche ayant été rejeté le 11 juillet 2011, M. B... a saisi le tribunal administratif de Caen le 5 septembre 2011 ; qu'il relève appel du jugement du 16 mai 2012 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision précitée du 10 juin 2011 du préfet de la Manche ainsi que de la décision de cette autorité du 11 juillet 2011 rejetant son recours gracieux ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article D. 615-50 du code rural et de la pêche maritime : " I. - Les agriculteurs qui demandent les aides mentionnées à l'article D. 615-45 sont tenus de respecter les règles d'entretien des surfaces fixées dans les conditions définies ci-dessous. (...) III. - Les règles d'entretien des terres portant des cultures annuelles, pluriannuelles ou pérennes correspondent aux règles fixées au titre IV par le règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil du 19 janvier 2009 et ses règlements d'application. " ; qu'aux termes de l'article 6 du règlement (CE) n° 73/2009 du conseil du 19 janvier 2009 : " Bonnes conditions agricoles et environnementales 1. Les États membres veillent à ce que toutes les terres agricoles, en particulier celles qui ne sont plus exploitées à des fins de production, soient maintenues dans de bonnes conditions agricoles et environnementales. Les États membres définissent, au niveau national ou régional, des exigences minimales pour les bonnes conditions agricoles et environnementales sur la base du cadre fixé à l'annexe III, en tenant compte des caractéristiques des zones concernées, y compris des conditions pédologiques et climatiques, des modes d'exploitation existants, de l'utilisation des terres, de la rotation des cultures, des pratiques agricoles et de la structure des exploitations. Les États membres ne peuvent pas définir des exigences minimales qui ne sont pas prévues dans ce cadre." ; qu'aux termes de l'article 2 du règlement n° 1120/2009 de la commission du 29 octobre 2009 portant modalités d'application du régime de paiement unique : " Définitions. Aux fins du titre III du règlement (CE) n° 73/2009 et aux fins du présent règlement, on entend par : (...) c) "pâturages permanents" : les terres consacrées à la production d'herbe et d'autres plantes fourragères herbacées (ensemencées ou naturelles) (...) à cette fin, on entend par "herbe et autres plantes fourragères herbacées", toutes les plantes herbacées se trouvant traditionnellement dans les pâturages naturels ou normalement comprises dans les mélanges de semences pour pâturages ou prairies dans l'État membre (...) d) "pâturages" : les terres arables consacrées à la production d'herbages (ensemencés ou naturels) ; aux fins de l'article 49 du règlement (CE) n° 73/2009, les pâturages comprennent également les pâturages permanents " ; qu'aux termes de l'annexe I de l'arrêté préfectoral du 26 juillet 2010 fixant les normes locales et les règles relatives aux bonnes conditions agricoles et environnementales des terres du département de la Manche : " les surfaces en herbe (prairies, (...) parcours, estives et landes) (...) sont destinées à l'alimentation des cheptels (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte des règlements communautaires susvisés applicables en matière de soutien aux agriculteurs, que l'octroi des aides instituées par ces règlements est notamment subordonné à la condition de l'exploitation effective et conforme à ces règlements des parcelles au titre desquelles l'aide est demandée et au dépôt d'une demande dans les délais prévus ; que ces dispositions ont pour objet non seulement de prévenir le versement de sommes qui ne seraient pas dues, mais aussi de pénaliser les auteurs de déclarations erronées ou frauduleuses ; que lorsque l'autorité compétente remet en cause la surface déclarée par l'exploitant pour déterminer elle-même la superficie sur la base de laquelle sera effectivement calculée l'aide, éventuellement diminuée pour tenir compte de l'importance de l'écart, elle est nécessairement conduite à apprécier si l'excès de surface déclarée est ou non en-deçà de la marge de tolérance fixée par le règlement, si les superficies prises en compte font l'objet d'une mise en culture " normale " et si l'écart entre la superficie déclarée et celle réellement éligible peut être justifié ou non par un cas de force majeure ;

4. Considérant, en premier lieu, que M. B... a déclaré pour la campagne 2010 d'aides communautaires à la surface un ilot n° 3 de 78 hectares 81 centiares de " prairies naturelles " et " landes " et un ilot n° 4 de 3 hectares 34 centiares dont 2 hectares 21 centiares de " landes et parcours " ; qu'à la suite des contrôles effectués dans les conditions rappelées au point 1, 51 hectares 90 déclarées en " prairies naturelles " pour l'ilot n° 3, ainsi qu'1 hectare 95 centiares déclaré en " landes et parcours " de l'ilot n° 4 n'ont pas été admis comme surface en herbe ; qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutient M. B..., les analyses et mesures effectuées par télédétection, confirmées lors du contrôle sur place, permettaient aisément de déterminer les surfaces admissibles de chaque catégorie de surfaces ; que l'intéressé ne peut utilement faire valoir que, lors de la signature du document de procédure contradictoire terrain (DPCT) le 14 octobre 2010 il n'aurait accepté les rectifications de ses déclarations qu'en ce qui concerne les ilots 1 et 7 ; que s'il soutient que le constat contradictoire ne portait pas sur l'entretien mais seulement sur l'étendue des surfaces en litige, il ressort au contraire des pièces du dossier que l'ensemble des contrôles et mesures effectués sur place le 14 octobre 2010 avaient pour objet de déterminer les surfaces qui ne pouvaient relever de l'aide communautaire en raison de leur défaut d'entretien ; qu'il ressort également des dispositions communautaires et nationales précitées que les agriculteurs percevant des paiements directs sont tenus de respecter les règles d'entretien des surfaces et de maintenir l'ensemble des parcelles qu'ils ont déclarées dans de bonnes conditions agricoles et environnementales ; qu'en ce qui concerne les landes et parcours, destinées à la production d'herbe et autres plantes fourragères herbacées, le maintien des bonnes conditions agricoles doit préserver le potentiel d'alimentation du cheptel et la production des plantes herbacées se trouvant traditionnellement dans les pâturages ; que l'embroussaillement des surfaces concernées dans la présente espèce, tel qu'il a été constaté par les photographies prises par l'administration et jointes au dossier, n'était pas compatible avec leur destination de production d'herbages conditionnant l'activation des DPU correspondants ; que le constat d'huissier établi à la demande du requérant le 2 septembre 2011, postérieurement aux décisions contestées, ne permet pas davantage d'établir que les parcelles en litige seraient dépourvues des plantes et taillis dont la présence, constatées par les agents chargés du contrôle, était de nature à les rendre inéligibles à l'aide communautaire ; qu'enfin, si M. B... soutient que les parcelles déclarées par lui en " landes et parcours " pouvaient être éligibles aux aides découplées à la surface en herbe au titre de " taillis à courte rotation ", il est constant, d'une part, qu'il n'a pas déclaré de surfaces dans cette dernière catégorie et, d'autre part, que les broussailles occupant celles de ses surfaces qui ont été exclues des aides ne pouvaient relever de la catégorie des " taillis à courte rotation " ; qu'ainsi, en estimant que 53ha85ca des surfaces déclarées en litige ne pouvaient être admissibles aux aides sollicitées, le préfet n'a pas commis d'erreur dans l'application des dispositions communautaires précitées ;

5. Considérant, en second lieu, que s'il a entendu revenir en appel sur le bien-fondé de l'exclusion d'une partie des surfaces correspondant aux ilots 1 et 7, M. B... n'apporte aucun élément à l'appui de sa contestation ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Délibéré après l'audience du 10 octobre 2013 à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- M. Lemoine, premier conseiller.

Lu en audience publique le 31 octobre 2013.

Le rapporteur,

F. LEMOINE

Le président,

I. PERROT

Le greffier,

A. MAUGENDRE

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 12NT02174


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 12NT02174
Date de la décision : 31/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. François LEMOINE
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : PETIT-ETIENNE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-10-31;12nt02174 ?
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