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11/10/2013 | FRANCE | N°13NT00305

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 11 octobre 2013, 13NT00305


Vu le recours, enregistré le 31 janvier 2013, présenté par le ministre de l'intérieur ; le ministre de l'intérieur demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103837 du 5 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. B... C..., la décision du 17 mars 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a ajourné à deux ans sa demande de réintégration dans la nationalité française ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal

administratif de Nantes ;

il soutient que :

- le tribunal s'est fondé à tort su...

Vu le recours, enregistré le 31 janvier 2013, présenté par le ministre de l'intérieur ; le ministre de l'intérieur demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103837 du 5 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. B... C..., la décision du 17 mars 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a ajourné à deux ans sa demande de réintégration dans la nationalité française ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Nantes ;

il soutient que :

- le tribunal s'est fondé à tort sur la procédure du 2 février 2008, classée sans suite, alors que sa décision reposait uniquement sur la procédure intervenue le 5 février 1995 pour violences volontaires entraînant une incapacité temporaire de moins de huit jours et de dégradations de biens ;

- le postulant n'a pas sérieusement contesté la matérialité des faits pour lesquels il a été déféré devant le Parquet et qui sont d'une particulière gravité ;

- c'est donc à tort que le tribunal administratif a jugé que sa décision était entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la mise en demeure du 9 avril 2013 adressée à M. C... en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 avril 2013, présenté pour M. C..., demeurant..., par Me Aibar, avocat au barreau de Nantes ; M. C... conclut au rejet du recours du ministre, et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- le ministre s'est contenté d'interroger les seuls fichiers de police qui ne permettent pas d'établir la réalité des faits ;

- il n'a jamais été déféré devant une autorité judiciaire et conteste avoir participé aux faits, pour lesquels il a été entendu en tant que témoin ;

- ces faits, anciens de 18 ans et qui n'ont donné lieu à aucune poursuite ni condamnation, seraient insuffisants pour justifier la décision d'ajournement qui se réfère à ce seul évènement ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 22 mai 2013, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut aux mêmes fins que son recours par les mêmes moyens ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 21 février 2013 du tribunal de grande instance de Nantes, rejetant M. C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 modifié, relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 septembre 2013 :

- le rapport de M. Iselin, président-rapporteur ;

- les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;

- et les observations de Me A..., substituant Me Aibar, avocat de M. C... ;

1. Considérant que par jugement du 5 décembre 2012, le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. C..., de nationalité malgache, la décision du 17 mars 2011 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration ajournant à deux ans la demande de réintégration dans la nationalité française présentée par l'intéressé, au motif que cette décision était entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que le ministre de l'intérieur interjette appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 24-1 du code civil : " La réintégration par décret peut être obtenue à tout âge et sans condition de stage. Elle est soumise, pour le surplus, aux conditions et aux règles de la naturalisation " ; qu'aux termes de l'article 21-15 du même code : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions (...) " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre chargé des naturalisations de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ;

3. Considérant que, pour ajourner à deux ans la demande de réintégration dans la nationalité française de M. C... au motif qu'il aurait été déféré pour des faits de violences volontaires entraînant une incapacité temporaire de moins de huit jours et de dégradation de biens le 5 février 1995, le ministre s'est fondé uniquement sur un document présenté sous forme de tableau et comportant une liste de personnes et d'infractions dans laquelle figure le nom de M. C... ; que ce document, dépourvu de toute autre indication que celle mentionnée dans la décision litigieuse, ne permet pas d'identifier le service dont il émane, et ne comporte ni en-tête, ni date, ni signature ; que M. C... conteste expressément la matérialité des faits qui lui sont reprochés et soutient, sans être contredit, qu'il n'a jamais été condamné pour ces mêmes faits ; que dans le cadre de la présente instance, le ministre chargé des naturalisations, qui se borne à rappeler le contenu du tableau susvisé, qui ne revêt aucun caractère probant, n'apporte pas d'élément nouveau de nature à établir la réalité des faits allégués à l'encontre de M. C... ; que, par suite, en se fondant sur le motif susmentionné pour ajourner la demande de M. C..., le ministre doit être regardé comme ayant entaché sa décision d'une erreur de fait ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé sa décision du 17 mars 2011 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. C... et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du ministre de l'intérieur est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à M. C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B... C....

Délibéré après l'audience du 20 septembre 2013, à laquelle siégeaient :

- M. Iselin, président de chambre,

- M. Millet, président-assesseur,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 octobre 2013.

Le président-assesseur,

J.-F. MILLET

Le président-rapporteur,

B. ISELIN

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT00305


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT00305
Date de la décision : 11/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ISELIN
Rapporteur ?: M. Bernard ISELIN
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : SELARL CADRAJURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-10-11;13nt00305 ?
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