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25/07/2013 | FRANCE | N°12NT01795

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 25 juillet 2013, 12NT01795


Vu le recours et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 5 juillet et 24 octobre 2012, présentés par le ministre de l'intérieur qui demande à la cour d'annuler le jugement n° 1102184 en date du 4 mai 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé sa décision en date du 5 novembre 2010 en tant qu'elle constate la perte de validité du permis de conduire de M. B... et lui enjoint de le restituer au préfet de son département de résidence ;

Il soutient que la demande présentée par M. B... était irreceva

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Vu le recours et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 5 juillet et 24 octobre 2012, présentés par le ministre de l'intérieur qui demande à la cour d'annuler le jugement n° 1102184 en date du 4 mai 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé sa décision en date du 5 novembre 2010 en tant qu'elle constate la perte de validité du permis de conduire de M. B... et lui enjoint de le restituer au préfet de son département de résidence ;

Il soutient que la demande présentée par M. B... était irrecevable dès lors qu'elle a été formée après l'expiration du délai de recours contentieux de deux mois, la décision contestée étant réputée avoir été notifiée à l'intéressé le 12 novembre 2010 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 mai 2013, présenté pour M. A... B..., demeurant..., par Me Glon, avocat au barreau de Saint-Brieuc ; M. B... conclut au rejet du recours et à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de lui reconstituer le capital de points de son permis de conduire ;

Il soutient que :

- le délai de recours n'a pu valablement courir dès lors que le pli recommandé retourné avec la mention " non réclamé, retour à l'envoyeur " n'établit pas qu'il aurait eu connaissance de la mise en instance du pli au bureau de la poste ;

- il n'a pas reçu notification par le ministère chargé de l'intérieur des décisions portant retraits de points ainsi que de la décision constatant la perte de validité de son permis de conduire ;

- l'information requise par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ne lui a pas été délivrée à la suite des infractions qui lui sont reprochées ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 juin 2013 présenté pour M. B... qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu la décision de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes en date du 6 mars 2013 admettant M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale au titre de cette instance et désignant Me Glon pour le représenter ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 juillet 2013 le rapport de M. Monlaü, premier conseiller ;

1. Considérant que le ministre de l'intérieur fait appel du jugement en date du 4 mai 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes a, après avoir constaté l'illégalité des décisions de retrait de points consécutives aux infractions commises par M. B... les 19 décembre 2007, 20 janvier 2008 et 2 mai 2008, annulé la décision en date du 5 novembre 2010 en tant qu'elle constate la perte de validité du permis de conduire de M. B... et lui enjoint de le restituer au préfet de son département de résidence ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre tirée de la tardiveté de la demande de première instance :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision et ce, dans le délai de deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. (...) " ;

3. Considérant qu'il incombe à l'administration, lorsqu'elle oppose une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté d'une action introduite devant une juridiction administrative, d'établir la date à laquelle la décision attaquée a été régulièrement notifiée à l'intéressé ; qu'en cas de retour à l'administration, au terme du délai de mise en instance, du pli recommandé contenant la décision, la notification est réputée avoir été régulièrement accomplie à la date à laquelle ce pli a été présenté à l'adresse de l'intéressé, dès lors du moins qu'il résulte soit de mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe, soit, à défaut, d'une attestation du service postal ou d'autres éléments de preuve, que le préposé a, conformément à la réglementation en vigueur, déposé un avis d'instance informant le destinataire que le pli était à sa disposition au bureau de poste ;

4. Considérant qu'il résulte de la réglementation postale, et notamment de l'instruction postale du 6 septembre 1990, qu'en cas d'absence du destinataire d'une lettre remise contre signature, le facteur doit, en premier lieu, porter la date de vaine présentation sur le volet " preuve de distribution " de la liasse postale, cette date se dupliquant sur les autres volets, en deuxième lieu, détacher de la liasse l'avis de passage et y mentionner le motif de non distribution, la date et l'heure à partir desquelles le pli peut être retiré au bureau d'instance et le nom et l'adresse de ce bureau, cette dernière indication pouvant résulter de l'apposition d'une étiquette adhésive, en troisième lieu, déposer l'avis ainsi complété dans la boîte aux lettres du destinataire et, enfin, reporter sur le pli le motif de non distribution et le nom du bureau d'instance ;

5. Considérant que compte tenu de ces modalités, doit être regardé comme portant des mentions précises, claires et concordantes suffisant à constituer la preuve d'une notification régulière le pli recommandé retourné à l'administration auquel est rattaché un volet " avis de réception " sur lequel a été apposée par voie de duplication la date de vaine présentation du courrier, et qui porte, sur l'enveloppe ou sur l'avis de réception, l'indication du motif pour lequel il n'a pu être remis ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'enveloppe présentée au domicile de M. B... contenant la décision contestée en date du 5 novembre 2010 par laquelle le ministre de l'intérieur a récapitulé les décisions de retrait de points dont M. B... a fait l'objet, constaté la perte de validité de son permis de conduire et lui a enjoint de le restituer au préfet de son département de résidence, si elle comportait les mentions " présenté/avisé le 12/11/10 ", " instance Binic " et " non réclamé-retour à l'envoyeur ", n'indiquait pas le motif de non distribution du pli, ni le délai de 15 jours accordé au destinataire du pli pour venir le retirer au bureau de poste ; que, dans ces conditions, eu égard à l'insuffisance des mentions figurant sur cette enveloppe qui ne permettent pas d'établir, à la date du 12 novembre 2010, la régularité de la notification de la décision en litige, c'est à bon droit que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes a écarté la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'intérieur tirée de la tardiveté de la demande de M. B... ;

Sur la légalité des décisions de retrait de points :

7. Considérant qu'il résulte des dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues auxdits articles, lesquelles constituent une garantie essentielle permettant à l'intéressé de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tout moyen, qu'elle a satisfait à cette obligation d'information ;

8. Considérant que le ministre de l'intérieur, qui a retiré deux fois un point et deux points du permis de conduire de M. B... à la suite des infractions commises les 19 décembre 2007, 20 janvier 2008 et 2 mai 2008, ne produit aucun document justifiant qu'il aurait satisfait aux exigences d'information préalable prévues par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; que s'il ressort du relevé d'information intégral extrait du système national du permis de conduire que les infractions commises par M. B... les 19 décembre 2007, 20 janvier 2008 et 2 mai 2008 ont donné lieu, en application des dispositions de l'article 529-2 du code de procédure pénale, à défaut du paiement de l'amende forfaitaire ou du dépôt régulier d'une requête tendant à son exonération, à l'émission de titres exécutoires d'amendes forfaitaires majorées devenus définitifs respectivement les 15 avril 2008, 1er avril 2008 et 14 août 2008, cette seule circonstance, qui établit la réalité de ces infractions en application des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 223-1 du code la route, n'est toutefois pas de nature à établir que M. B... aurait reçu l'information prévue par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du même code ; qu'il en résulte que les décisions de retrait de points consécutives auxdites infractions sont intervenues à l'issue d'une procédure irrégulière ;

Sur la légalité de la décision en date du 5 novembre 2010 constatant la perte de validité du permis de conduire :

9. Considérant que le ministre a prononcé, par la décision du 5 novembre 2010, le retrait d'un total de douze points du permis de conduire de M. B... ; que compte tenu de l'illégalité des décisions retirant un, un et deux points du permis de conduire de l'intéressé à la suite des infractions commises les 19 décembre 2007, 20 janvier 2008 et 2 mai 2008, l'intéressé disposait à la date de la décision contestée d'un capital de quatre points ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé sa décision en date du 5 novembre 2010 en tant qu'elle constate la perte de validité du permis de conduire de M. B... et lui a enjoint de le restituer au préfet de son département de résidence ;

Sur les conclusions incidentes à fin d'injonction présentées par M.B... :

11. Considérant que le présent arrêt qui rejette le recours du ministre n'appelle pas d'autre mesure d'exécution que celle ordonnée par le premier juge ; que, par suite, les conclusions présentées par M. B... et tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de reconstituer le capital de points de son permis de conduire doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours susvisé du ministre de l'intérieur et les conclusions à fin d'injonction présentées en appel par M. B...sont rejetés.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 4 juillet 2013, à laquelle siégeaient :

- M. Piot, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Monlaü, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 25 juillet 2013.

Le rapporteur,

X. MONLAÜLe président,

J-M. PIOT

Le greffier,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12NT01795
Date de la décision : 25/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. PIOT
Rapporteur ?: M. Xavier MONLAU
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : GLON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-07-25;12nt01795 ?
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