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27/06/2013 | FRANCE | N°12NT03025

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 27 juin 2013, 12NT03025


Vu la requête, enregistrée le 27 novembre 2012, présentée pour M. B... -D...C..., demeurant..., par Me Paillet, avocat au barreau de Caen ; M. C... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101199 en date du 2 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au

titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

-...

Vu la requête, enregistrée le 27 novembre 2012, présentée pour M. B... -D...C..., demeurant..., par Me Paillet, avocat au barreau de Caen ; M. C... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101199 en date du 2 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- sur la procédure, et contrairement à ce qu'a apprécié le tribunal, d'une part l'administration était tenue d'engager une vérification de comptabilité pour régulariser sa situation fiscale, et d'autre part il aurait dû être destinataire de la mise en demeure prévue par les articles L. 68 et L. 73 du livre des procédures fiscales ;

- sur le bien-fondé, l'administration aurait dû déduire du montant des rehaussements les nombreuses dépenses qu'il a dû assumer au cours des années en litige, tant en faveur de son père qui vivait en résidence médicalisée qu'en faveur de son frère dont il était l'administrateur légal sous contrôle judiciaire pour la période du 1er octobre 2002 au 20 juin 2006 ; le service aurait dû prendre en considération les sommes qu'il a été condamné à rembourser à son père et à son frère en exécution de jugements du Tribunal de grande instance de Lisieux du 6 mai 2009 et du tribunal correctionnel de Lisieux du 12 janvier 2010 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2013, présenté par le ministre délégué chargé du Budget qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre soutient que :

- Sur la procédure, le service n'était pas tenu, en application de l'article L. 47 C du livre des procédures fiscales, d'engager une vérification de comptabilité ; l'administration n'était pas tenue de recourir à une procédure d'évaluation et pouvait comme elle l'a fait poursuivre une procédure de rectification contradictoire, qui est celle qui offre le plus de garanties au contribuable ;

- Sur le bien-fondé, les dépenses éventuellement engagées par M. C... au profit de son père et de son frère ne sont pas démontrées et doivent pour certaines d'entre elles être écartées en raison du principe de l'annualité de l'impôt ; la circonstance que le requérant ait été condamné à rembourser les sommes taxées au cours d'une année ultérieure à leur encaissement est sans incidence sur leur caractère imposable ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 31 mai 2013, présenté pour M. B... -D... C...qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 juin 2013 :

- le rapport de M. Francfort, président-assesseur ;

- et les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public ;

1. Considérant qu'à la suite d'un contrôle sur pièces effectué au titre de l'année 2005 et d'un examen contradictoire de l'ensemble de sa situation fiscale personnelle diligenté au titre des années 2006 à 2008, l'administration fiscale a notifié à M. C... des rehaussements dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, correspondant à des détournements de fonds effectués au préjudice du père et du frère de l'intéressé, dont le service a eu connaissance par l'exercice de son droit de communication auprès du tribunal de grande instance de Lisieux ; que M. C... fait appel du jugement en date du 2 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui en ont résulté au titre des années 2005 et 2006 ;

Sur les conclusions à fins de décharge :

Sur la procédure d'imposition :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables " ; et qu'aux termes de l'article L. 47 C du même livre : "Lorsque, au cours d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, sont découvertes des activités occultes (...) l'administration n'est pas tenue d'engager une vérification de comptabilité pour régulariser la situation fiscale du contribuable au regard de cette activité" ; que M. C... soutient sur le fondement de ces dernières dispositions que le service ne pouvait imposer les sommes détournées sans engager au préalable une vérification de comptabilité, dès lors que l'activité occulte doit s'entendre, conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, de celle, visée aux dispositions de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, pour laquelle le contribuable n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises, alors qu'il n'était pas tenu de souscrire de déclaration relative à son activité de détournement de fonds, laquelle ne présentait pas de caractère professionnel ;

3. Considérant, d'une part, que M. C... ne peut utilement exciper des dispositions précitées à l'encontre de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2005, dès lors que les rehaussements correspondants ont procédé d'un contrôle sur pièces sur la base des renseignements transmis par l'autorité judiciaire, en application des dispositions de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, et non de l'examen de la situation fiscale personnelle dont M. C... a fait l'objet ;

4. Considérant, d'autre part, en ce qui concerne la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle M. C... a été assujetti au titre de l'année 2006, que dès lors que les détournements de fonds auxquels il s'est livré ne sont pas constitutifs d'une activité soumise à la tenue d'une comptabilité que l'administration pourrait être amenée à vérifier sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales, le requérant n'est en tout état de cause pas fondé à soutenir que les rehaussements contestés auraient dû procéder d'une vérification de comptabilité ;

5. Considérant, en second lieu, que contrairement à ce que soutient M. C..., l'administration n'est jamais tenue de recourir à la procédure d'évaluation d'office, et peut lui substituer la procédure, suivie au cas d'espèce, de rectification contradictoire, dès lors que le service disposait, du fait de l'exercice du droit de communication auprès des autorités judiciaires, des renseignements suffisants pour imposer le produit des détournements de fonds auxquels le requérant s'était livré ; que M. C..., qui a effectivement bénéficié de l'ensemble des garanties attachées à la procédure contradictoire, ne peut utilement se prévaloir de ce qu'il n'aurait pas été destinataire de la mise en demeure prévue en cas d'évaluation d'office par la combinaison les dispositions aux articles L. 68 et L. 73 du livre des procédures fiscales ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 12 du code général des impôts : "L'impôt sur le revenu est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année" ; que, selon les dispositions de l'article 92 du code général des impôts : "1. Sont considérés comme (...) revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices (...) de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus" ; qu'en application de ces dispositions, les sommes provenant de détournements de fonds, qui constituent pour leur auteur une source de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de revenus, sont imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ;

7. Considérant qu'il résulte des faits constatés par le juge pénal dans un jugement du 12 janvier 2010 rendu par le tribunal de grande instance de Lisieux, statuant en matière correctionnelle, que M. C... s'est rendu coupable de détournements de fonds au préjudice de son père M. B... C...et de son frère M. A... C..., d'une part en 2005 en encaissant deux chèques correspondant au prix de la vente d'un bien immobilier qui leur était destiné et d'autre part en 2006 en encaissant un chèque établi au nom de son frère dans le cadre de la liquidation d'une société civile immobilière ; que les sommes ainsi appréhendées par le requérant sont constitutives d'un revenu imposable dans la catégorie des bénéfices non commerciaux sur le fondement des dispositions précitées du 1 de l'article 92 du code général des impôts ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que M. C... soutient avoir engagé des dépenses afin de pourvoir aux frais d'hébergement de son père en résidence médicalisée, ainsi que des dépenses de vacances, d'habillement ou de frais de déplacement au bénéfice de son frère ; que toutefois, alors qu'il résulte d'un jugement du tribunal de grande instance de Lisieux du 6 mai 2009, statuant au civil, que le requérant ne détenait aucune créance sur son frère et son père à l'époque des faits, M. C... ne démontre pas avoir engagé des dépenses susceptibles de venir en déduction des bénéfices imposés par l'administration ;

9. Considérant, en dernier lieu, que la circonstance que M. C... ait été condamné à rembourser une partie des sommes en cause par un jugement du tribunal de grande instance de Lisieux du 6 mai 2009, est sans incidence sur le caractère imposable de ces revenus au titre des années 2005 et 2006 en litige ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête susvisée de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... -D... C... et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 6 juin 2013, à laquelle siégeaient :

- M. Piot, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Etienvre, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 juin 2013.

Le rapporteur,

J. FRANCFORT

Le président,

J-M. PIOT

Le greffier,

C. CROIGER

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N° 12NT03025 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12NT03025
Date de la décision : 27/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PIOT
Rapporteur ?: M. Jérôme FRANCFORT
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : PAILLET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-06-27;12nt03025 ?
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