La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/04/2013 | FRANCE | N°12NT00303

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 11 avril 2013, 12NT00303


Vu la requête, enregistrée le 6 février 2012, présentée pour M. B... A..., domicilié..., par Me Launay, avocat au barreau de Caen ; M. A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 10-2406 du 1er décembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de l'Aigle à lui verser la somme de 31 484,20 euros assortie des intérêts et de leur capitalisation en réparation des préjudices résultant du caractère illégal de la décision du 16 avril 2010 mettant fin à son contrat de travail à durée détermin

ée ;

2°) de condamner la commune de l'Aigle à lui verser la somme de 31 484,...

Vu la requête, enregistrée le 6 février 2012, présentée pour M. B... A..., domicilié..., par Me Launay, avocat au barreau de Caen ; M. A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 10-2406 du 1er décembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de l'Aigle à lui verser la somme de 31 484,20 euros assortie des intérêts et de leur capitalisation en réparation des préjudices résultant du caractère illégal de la décision du 16 avril 2010 mettant fin à son contrat de travail à durée déterminée ;

2°) de condamner la commune de l'Aigle à lui verser la somme de 31 484,20 euros assortie des intérêts et de leur capitalisation ;

3°) d'enjoindre à la commune de l'Aigle de lui verser les indemnités allouées dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de cette commune la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu le décret n° 88-145 du 15 février 1988 relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 mars 2013 :

- le rapport de Mme Gélard, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

1. Considérant que M. A... a été recruté par la commune de l'Aigle à compter du 12 juillet 2004 en tant qu'agent technique auxiliaire " en remplacement de différents agents en congé de maladie (ou autre) " et notamment d'un menuisier placé en arrêt de travail à la suite d'un accident ; que le contrat de travail à durée déterminée dont bénéficiait l'intéressé a été expressément renouvelé à plusieurs reprises jusqu'au 31 décembre 2009 ; que le 23 février 2010, M. A... a été victime d'un accident de travail ; que par une lettre du 16 avril 2010, l'intéressé a été informé que, conformément à ce qui lui avait été indiqué dans un précédent courrier du 10 mars 2010, son contrat de travail avait pris fin au 31 mars 2010 ; que le 22 septembre 2010, M. A..., qui a estimé que la décision du 16 avril 2010 constituait un licenciement irrégulier intervenu en cours de contrat, a présenté une réclamation préalable auprès de la commune, qui l'a rejetée le 1er octobre 2010 ; que l'intéressé a saisi le tribunal administratif de Caen d'une demande tendant à la condamnation de la commune de l'Aigle à lui verser la somme de 31 484,20 euros assortie des intérêts et de leur capitalisation en réparation des préjudices résultant de l'illégalité de cette décision ; que par un jugement rendu le 1er décembre 2011, le tribunal administratif a rejeté sa demande ; que M. A... fait appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi susvisé du 26 janvier 1984 dans sa rédaction alors applicable : " Les collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 ne peuvent recruter des agents non titulaires pour occuper des emplois permanents que pour assurer le remplacement momentané de fonctionnaires autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel ou indisponibles en raison d'un congé de maladie (...), ou pour faire face temporairement et pour une durée maximale d'un an à la vacance d'un emploi qui ne peut être immédiatement pourvu dans les conditions prévues par la présente loi. / (...) Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 du titre Ier du statut général, des emplois permanents peuvent être occupés par des agents contractuels dans les cas suivants : 1° Lorsqu'il n'existe pas de cadre d'emplois de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes. (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte des dispositions législatives précitées que les contrats passés par les collectivités et établissements publics territoriaux en vue de recruter des agents non titulaires doivent, sauf disposition législative spéciale contraire, être conclus pour une durée déterminée et ne peuvent être renouvelés que par reconduction expresse ; que la circonstance qu'un contrat à durée déterminée a été reconduit tacitement bien qu'il ait comporté une stipulation selon laquelle il ne pouvait l'être que par une décision expresse ne peut avoir pour effet de lui conférer une durée indéterminée ; que le maintien en fonctions de l'agent en cause à l'issue de son contrat initial, s'il traduit la commune intention des parties de poursuivre leur collaboration, a seulement pour effet de donner naissance à un nouveau contrat, conclu lui aussi pour une période déterminée et dont la durée est celle assignée au contrat initial ; qu'ainsi, sauf circonstance particulière, la décision par laquelle l'autorité administrative compétente met fin aux relations contractuelles doit être regardée comme un refus de renouvellement de contrat si elle intervient à l'échéance du nouveau contrat et comme un licenciement si elle intervient au cours de ce nouveau contrat ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A... a bénéficié d'un contrat de travail d'un an allant du 1er janvier au 31 décembre 2008, lequel a été renouvelé le 26 février 2009 en des termes identiques et pour une même durée d'un an prenant fin au 31 décembre 2009 ; que si la commune de l'Aigle soutient qu'il lui a ensuite été proposé un contrat de trois mois pour la période du 1er janvier au 31 mars 2010, il est constant que ce contrat qui ne comporte pas la signature de l'intéressé est daté du 20 janvier 2010 ; qu'à cette date, M. A... dont il n'est pas contesté qu'il avait continué à exercer ses fonctions depuis le 1er janvier 2010 et qui bénéficiait depuis 2004 de contrats de travail successifs régulièrement renouvelés, pouvait légitimement considérer que son contrat d'un an avait été tacitement renouvelé ; qu'avant cette date, la commune n'a pas informé l'intéressé de son intention de ne pas renouveler son contrat ou d'en modifier les termes et notamment d'en réduire la durée à trois mois ; que dans ces conditions, M. A... est fondé à soutenir qu'il était titulaire d'un contrat d'un an tacitement renouvelé prenant effet à compter du 1er janvier 2010 et expirant au 31 décembre 2010 ; que dès lors, la décision portée à la connaissance de M. A... par le courrier daté du 10 mars 2010, confirmée le 16 avril 2010, lui indiquant que son contrat prenait fin au 31 mars 2010 devait être regardée, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, comme un licenciement intervenu en cours de contrat et non comme une décision de non renouvellement de contrat ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 42 du décret susvisé du 15 février 1988 : " Le licenciement ne peut intervenir qu'à l'issue d'un entretien préalable. La décision de licenciement est notifiée à l'intéressé par une lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Cette lettre précise le ou les motifs du licenciement et la date à laquelle celui-ci doit intervenir compte tenu des droits à congés annuels restant à courir et de la durée du préavis " ; qu'il est constant que si l'intéressé a eu une discussion avec le directeur général des services préalable à son licenciement, la décision 10 mars 2010, ainsi d'ailleurs que la lettre du 16 avril 2010, ne comporte aucune motivation ; que, de plus, alors que M. A... soutient que son licenciement, à la suite de son accident du travail survenu le 23 février 2010, a été décidé en raison de son état de santé, la commune se borne pour contester cette affirmation à indiquer qu'il est intervenu au terme du contrat liant les parties sans invoquer aucune faute de l'intéressé, ni aucune nécessité de service impliquant une rupture du contrat avant son terme ; que dans ces conditions, la décision litigieuse qui est entachée d'un vice de procédure, ne peut davantage être regardée comme justifiée au fond ; que dès lors, M. A... est fondé à solliciter la réparation des préjudices résultant de l'illégalité de cette décision ; que dans les circonstances de l'espèce et eu égard au nombre d'années de service accompli par l'intéressé dans les effectifs de la commune d'Aigle, il sera fait une juste appréciation de l'ensemble de ses préjudices matériel et moral en lui allouant une somme globale de 20 000 euros, laquelle sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 septembre 2010, et de leur capitalisation à compter du 24 septembre 2011 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que

c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ; qu'en revanche, les conclusions présentées par l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, à la commune de l'Aigle de lui verser les indemnités allouées par la cour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, lesquelles sont prématurées à ce stade de la procédure en litige et concernent l'exécution du présent arrêt, ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à la commune de l'Aigle de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat, Me Launay, peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de l'Aigle le versement de la somme de 2 000 euros à Me Launay, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 10-2406 du tribunal administratif de Caen en date du 1er décembre 2011 est annulé.

Article 2 : La commune de l'Aigle versera à M. A... la somme de 20 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 septembre 2010. Les intérêts échus à la date du 24 septembre 2011 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : La commune de l'Aigle versera à Me Launay, avocat de M. C..., la somme de 2 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de la commune de l'Aigle tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et à la commune de l'Aigle.

''

''

''

''

2

N° 12NT00303


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 12NT00303
Date de la décision : 11/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. COIFFET
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : GORAND

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-04-11;12nt00303 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award