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31/01/2013 | FRANCE | N°10NT01354

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 31 janvier 2013, 10NT01354


Vu le recours, enregistré le 29 juin 2010, présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales ; le ministre demande à la cour d'annuler le jugement n° 091541 en date du 25 mai 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé sa décision du 18 février 2009 informant M. A... de la perte de validité de son permis de conduire et lui enjoignant de le restituer au préfet de son département de résidence ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

V...

Vu le recours, enregistré le 29 juin 2010, présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales ; le ministre demande à la cour d'annuler le jugement n° 091541 en date du 25 mai 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé sa décision du 18 février 2009 informant M. A... de la perte de validité de son permis de conduire et lui enjoignant de le restituer au préfet de son département de résidence ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code pénal ;

Vu le code de la route ;

Vu le décret n° 85-1057 du 2 octobre 1985 ;

Vu le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

Vu l'arrêté du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales en date du 11 septembre 2007 portant organisation interne de la direction de la modernisation et de l'action territoriale modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 janvier 2013 le rapport de M. Etienvre, premier conseiller ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement : "A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'Etat et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : 1° Les (...) directeurs d'administration centrale (...)" ; qu'aux termes de l'article 3 du même décret : "Les personnes mentionnées aux 1° (...) de l'article 1er peuvent donner délégation pour signer tous actes relatifs aux affaires pour lesquelles elles ont elles-mêmes reçu délégation : 1° Aux (...) fonctionnaires de catégorie A (...) qui n'en disposent pas au titre de l'article 1er (...) " ; qu'aux termes de l'article 7 du décret susvisé du 2 octobre 1985 relatif à l'organisation de l'administration centrale du ministère de l'intérieur et de la décentralisation : "La direction de la modernisation et de l'action territoriale est chargée : (...) e) de préparer et de mettre en oeuvre la législation relative à la circulation et la sécurité routières" ; que l'arrêté du 11 septembre 2007 portant organisation interne de la direction de la modernisation et de l'action territoriale, dans sa version modifiée par l'arrêté du 28 novembre 2008 publié au journal officiel de la République française du 30 novembre suivant, prévoit, en son article 3, que : "La sous direction de la circulation et de la sécurité routières comprend : (...) - le service du fichier national des permis de conduire" ;

2. Considérant que par décret du 17 juillet 2008, M. C... a été nommé directeur de la modernisation et de l'action territoriale au ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales ; que par décision du 3 décembre 2008 publiée au Journal officiel de la République française du 5 décembre suivant, dont une copie a été produite en appel par le ministre, le directeur de la modernisation et de l'action territoriale a donné délégation à M. B..., attaché principal d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, chef du service du fichier national des permis de conduire, directement placé sous l'autorité du sous-directeur de la circulation et de la sécurité routières, à l'effet de signer, au nom du ministre chargé de l'intérieur, tous actes, arrêtés et décisions, pièces comptables, ordonnances de délégation et correspondances courantes dans la limite de ses attributions ; qu'en vertu d'une telle délégation, qui ne constitue pas une subdélégation, M. B... a pu légalement signer au nom du ministre de l'intérieur la décision contestée du 18 février 2009 ; que c'est donc à tort que le tribunal administratif de Nantes a annulé, pour incompétence, ladite décision ;

3. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... en première instance et en appel à l'encontre de la décision du 18 février 2009 ;

Sur la légalité de la décision du 18 février 2009 du ministre de l'intérieur :

4. Considérant, en premier lieu, que les conditions de la notification au conducteur des retraits de points de son permis de conduire, prévue par les dispositions de l'article L. 223-3 du code de la route, sont sans incidence sur la régularité de la procédure suivie et partant la légalité de ces retraits ; que cette procédure a pour seul objet de rendre ceux-ci opposables à l'intéressé et de faire courir le délai dont il dispose pour en contester la légalité devant la juridiction administrative ; que, par suite, le moyen, à le supposer soulevé, tiré de ce que l'absence de notification des décisions de retrait de points entacherait d'illégalité la décision du 18 février 2009 doit être écarté ;

5. Considérant, en second lieu, qu'il résulte des dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues auxdits articles, lesquelles constituent une garantie essentielle permettant à l'intéressé de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ;

6. Considérant que M. A... fait valoir que l'information prévue par les dispositions précitées du code de la route ne lui a pas été délivrée à l'occasion des infractions commises les 10 janvier 2002, 20 avril 2004, 18 décembre 2004, 22 octobre 2005 et 6 juin 2006 ;

En ce qui concerne les infractions des 10 janvier 2002 et 22 octobre 2005 :

7. Considérant que lorsque la réalité d'une infraction a été établie par une condamnation devenue définitive prononcée par le juge pénal qui a statué sur tous les éléments de fait et de droit portés à sa connaissance et que l'auteur de l'infraction a ainsi pu la contester, l'omission de la délivrance, au titulaire du permis de conduire à l'encontre duquel est relevée une infraction donnant lieu à retrait de points, de l'information prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route est sans influence sur la régularité du retrait de points résultant de la condamnation ;

8. Considérant qu'il n'est pas contesté que les infractions commises par M. A... les 10 janvier 2002 et 22 octobre 2005 ont fait l'objet de condamnations pénales rendues respectivement les 19 août 2002 par le tribunal d'instance d'Orléans et 29 novembre 2005 par la juridiction de proximité d'Avignon ; que, la réalité de ces infractions ayant été établie par des condamnations pénales, dont le caractère définitif n'est pas contesté, le moyen tiré du manquement à l'obligation d'information préalable prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ne pouvait être utilement invoqué à l'encontre des retraits de points correspondant à ces infractions ;

En ce qui concerne les infractions des 20 avril 2004 et 18 décembre 2004 :

9. Considérant que, s'agissant de ces infractions, les dispositions portant application des articles R. 49-1 et R. 49-10 du code de procédure pénale en vigueur à la date de celles-ci, notamment celles des articles A. 37 à A. 37-4 de ce code, issues de l'arrêté du 5 octobre 1999 relatif aux formulaires utilisés pour la constatation et le paiement des contraventions soumises à la procédure de l'amende forfaitaire, prévoient que lorsqu'une contravention soumise à cette procédure est relevée avec interception du véhicule mais sans que l'amende soit payée immédiatement entre les mains de l'agent verbalisateur, ce dernier utilise un formulaire réunissant, en une même liasse autocopiante, le procès-verbal conservé par le service verbalisateur, une carte de paiement matériellement indispensable pour procéder au règlement de l'amende et l'avis de contravention, également remis au contrevenant pour servir de justificatif du paiement ultérieur, qui comporte une information suffisante au regard des exigences résultant des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ;

10. Considérant, dès lors, que le titulaire d'un permis de conduire à l'encontre duquel une infraction au code de la route est relevée au moyen d'un formulaire conforme à ce modèle et dont il est établi, notamment par la mention qui en est faite au système national des permis de conduire, qu'il a payé l'amende forfaitaire correspondant à cette infraction a nécessairement reçu l'avis de contravention ; qu'eu égard aux mentions dont cet avis est réputé être revêtu, l'administration doit alors être regardée comme s'étant acquittée envers le titulaire du permis de son obligation de lui délivrer les informations requises préalablement au paiement de l'amende, à moins que l'intéressé, à qui il appartient à cette fin de produire l'avis qu'il a nécessairement reçu, ne démontre s'être vu remettre un avis inexact ou incomplet ;

11. Considérant que si l'intervention de l'arrêté du 5 octobre 1999 ne garantit pas, à elle seule, que des formulaires établis selon un modèle antérieur, où le document comportant les informations requises et celui nécessaire au paiement étaient entièrement distincts, n'aient pas continué à être utilisés pour la constatation des infractions, il résulte tant du règlement du Conseil du 3 mai 1998 concernant l'introduction de l'euro que des mesures législatives et réglementaires prises pour sa mise en oeuvre, s'agissant notamment du montant des amendes, que de tels formulaires, libellés en francs, n'ont pu être employés après le 1er janvier 2002 ; que, pour les infractions relevées avec interception du véhicule à compter de cette date, la mention au système national des permis de conduire du paiement ultérieur de l'amende forfaitaire permet donc au juge d'estimer que le titulaire du permis s'est vu remettre un avis de contravention comportant les informations requises ;

12. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les infractions des 20 avril 2004 et 18 décembre 2004 ont été constatées après interception du véhicule et que M. A... a ultérieurement payé les amendes forfaitaires correspondantes ; qu'il s'est, dès lors, nécessairement vu remettre un avis de contravention libellé en euros comportant les informations requises ; que, faute pour lui de produire ces avis de contravention pour démontrer qu'il serait inexacts ou incomplets, la preuve du respect de l'obligation d'information préalable doit être regardée comme apportée par l'administration ;

En ce qui concerne l'infraction du 6 juin 2006 :

13. Considérant que, lorsqu'une contravention soumise à la procédure de l'amende forfaitaire est relevée avec interception du véhicule et donne lieu au paiement immédiat de l'amende entre les mains de l'agent verbalisateur, le contrevenant se voit remettre non les documents régis par les dispositions des articles A. 37 à A. 37-4 du code de procédure pénale mais, en application de l'article R. 49-2 du même code, une quittance de paiement ; que le modèle de cette quittance comporte une information suffisante au regard des exigences résultant des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, qui doit être regardée comme ayant été délivrée préalablement au paiement de l'amende dès lors que le contrevenant conserve la faculté de renoncer à la modalité du paiement immédiat de l'amende avant de procéder à la signature de la quittance ou, le cas échéant, d'inscrire sur celle-ci une réserve sur les modalités selon lesquelles l'information lui a été délivrée ; qu'il incombe à l'administration d'apporter la preuve, par la production de la souche de la quittance dépourvue de réserve sur la délivrance de l'information, que celle-ci est bien intervenue préalablement au paiement ;

14. Considérant qu'il ressort des mentions du relevé d'information intégral relatif à la situation du permis de conduire de M. A... que le paiement de l'amende forfaitaire relative à l'infraction commise le 6 juin 2006 est intervenu le même jour que son constat ; que le ministre de l'intérieur, qui n'établit pas que le paiement de l'amende aurait été différé, ne produit pas la souche de la quittance faisant apparaître que l'information a été délivrée à l'intéressé et ne démontre pas, par suite, que celle-ci est intervenue préalablement au paiement ; que, par suite, la décision de retrait de deux points consécutive à l'infraction susmentionnée est intervenue au terme d'une procédure irrégulière et est, de ce fait, entachée d'illégalité ;

15. Considérant que le ministre avait prononcé, par la décision du 18 février 2009, le retrait d'un total de seize points du capital affecté au permis de conduire de M. A... ; qu'en dépit de l'illégalité de la décision de retrait de deux points, le solde de points du permis de conduire de M. A... restait, à la date de la décision contestée, négatif ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé sa décision du 18 février 2009 informant M. A... de la perte de validité de son permis de conduire et lui ordonnant de le restituer au préfet du département de son lieu de résidence ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé en date du 25 mai 2010 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Nantes est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. D... A....

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N° 10NT01354


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 10NT01354
Date de la décision : 31/01/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PIOT
Rapporteur ?: M. Franck ETIENVRE
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : CHOUQUER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-01-31;10nt01354 ?
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