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24/01/2013 | FRANCE | N°11NT00751

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 24 janvier 2013, 11NT00751


Vu le recours sommaire et le mémoire complémentaire, respectivement enregistrés les 25 mars 2011 et 21 avril 2011, du ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire ; le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire demande à la cour :

- d'annuler le jugement n° 07-1621 du 31 décembre 2010 du tribunal administratif de Rennes en tant que par ce jugement le tribunal a, à la demande de l'EARL de la Ville Térouze, annulé la décision du préfet des Côtes

d'Armor du 28 novembre 2006 en ce qu'elle portait refus d'attribution ...

Vu le recours sommaire et le mémoire complémentaire, respectivement enregistrés les 25 mars 2011 et 21 avril 2011, du ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire ; le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire demande à la cour :

- d'annuler le jugement n° 07-1621 du 31 décembre 2010 du tribunal administratif de Rennes en tant que par ce jugement le tribunal a, à la demande de l'EARL de la Ville Térouze, annulé la décision du préfet des Côtes d'Armor du 28 novembre 2006 en ce qu'elle portait refus d'attribution de droits à paiement unique pour une surface de 4 ha 85 ares, ainsi que la décision de rejet du recours gracieux intervenue le 12 mars 2007 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement (CE) n° 1782/2003 du Conseil du 29 septembre 2003 ;

Vu le règlement (CE) n° 795/2004 de la Commission du 21 avril 2004 ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu le décret n° 2006-1440 du 24 novembre 2006 relatif à l'octroi de dotations et de

droits à paiement unique supplémentaires issus de la réserve nationale au titre de la période transitoire et modifiant le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 2013 :

- le rapport de M. Lemoine, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

1. Considérant que l'EARL de la Ville Térouze a conclu avec M. Lorre, propriétaire, un bail verbal à compter du 6 mars 2003 pour la location de 4 ha 85 ares de terres agricoles sur la commune de Trédias (Côtes d'Armor) ; qu'elle a perçu, au cours des années 2003 à 2005 les aides de la politique agricole commune correspondant à ces terres ; qu'en raison de l'absence de transfert des droits à paiement unique détenus par le groupement agricole qui exploitait ces parcelles avant 2003, le préfet des Côtes d'Armor n'a pas intégré ces droits lorsque, par la décision contestée du 28 novembre 2006, il a notifié à l'EARL requérante ses droits définitifs à paiement unique (DPU) ; qu'il a confirmé cette décision le 12 mars 2007 sur recours gracieux de l'EARL de la Ville Térouze ; que celle-ci a saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande d'annulation de ces deux décisions et que ce tribunal a fait droit à sa demande ; que le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire relève appel de ce jugement en tant qu'il a annulé les deux décisions contestées ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 33 du règlement (CE) n° 1782/2003 du Conseil du 29 septembre 2003 applicable au litige : " Admissibilité au bénéfice de l'aide : 1. Les agriculteurs ont accès au régime de paiement unique: a) s'ils se sont vu octroyer un paiement au cours de la période de référence visée à l'article 38 au titre d'au moins un des régimes de soutien visés à l'annexe VI, ou b) s'ils ont reçu l'exploitation ou une partie de l'exploitation à titre d'héritage ou d'héritage anticipé, de la part d'un agriculteur qui répondait aux conditions visées au point a), ou c) s'ils ont reçu un droit à paiement au titre de la réserve nationale ou d'un transfert. " : qu'aux termes de l'article 46 du même règlement : " Transfert de droits au paiement (...) 2. Les transferts de droits au paiement, avec ou sans terres, peuvent se faire par vente ou toute autre cession définitive. En revanche, le bail ou toute transaction similaire est autorisé à condition que le transfert des droits au paiement s'accompagne du transfert d'un nombre équivalent d'hectares admissibles au bénéfice de l'aide. Sauf en cas de force majeure ou dans des circonstances exceptionnelles (...) un agriculteur ne peut transférer ses droits au paiement, sans terres, qu'après avoir utilisé, au sens de l'article 44, au moins 80 % de ses droits pendant au moins une année civile ou après avoir cédé volontairement à la réserve nationale tous les droits qu'il n'a pas utilisés au cours de la première année d'application du régime de paiement unique. 3. En cas de vente de droits au paiement, avec ou sans terres, les États membres, agissant conformément au principe général du droit communautaire, peuvent décider qu'une partie des droits au paiement vendus est reversée dans la réserve nationale ou que leur valeur unitaire est réduite en faveur de la réserve nationale, selon des critères que la Commission fixera conformément à la procédure visée à l'article 144, paragraphe 2. " ; qu'aux termes de l'article 42 du même règlement : " Réserve nationale (...) 4. Les Etats membres utilisent la réserve nationale pour établir, selon des critères objectifs et de manière à assurer l'égalité de traitement entre les agriculteurs et à éviter des distorsions du marché et de la concurrence, les montants de référence pour les agriculteurs se trouvant dans une situation spéciale, que la Commission définit conformément à la procédure visée à l'article 144, paragraphe 2. (...) " ; que pour l'application de ces dernières dispositions, l'article 18 du règlement (CE) n° 795/2004 de la Commission du 21 avril 2004 prévoit : " Dispositions générales applicables aux agriculteurs se trouvant dans une situation spéciale. 1. Aux fins de l'article 42, paragraphe 4, du règlement (CE) n° 1782/2003, on entend par " agriculteurs se trouvant dans une situation spéciale " les agriculteurs visés aux articles 19 à 23 du présent règlement. (...) " ; qu'aux termes de l'article 22 du même règlement : Location et achat de terres affermées. 1. Lorsqu'un agriculteur a pris à bail pour six années ou plus, entre la fin de la période de référence et le 29 septembre 2003 au plus tard, une exploitation ou une partie d'une exploitation dont les conditions de bail ne peuvent être révisées, les droits au paiement qui lui sont octroyés sont calculés en divisant un montant de référence établi par l'Etat membre selon des critères objectifs et de manière à assurer l'égalité de traitement entre les agriculteurs et à éviter des distorsions du marché ou de la concurrence par un nombre d'hectares inférieur ou égal au nombre d'hectares qu'il a pris à bail (...) " ; qu'aux termes de l'article 27 du même règlement : " Clause contractuelle privée en cas de bail 1. Sous réserve des paragraphes 2 et 3, toute clause prévoyant dans un contrat de bail le transfert d'un nombre de droits inférieur ou égal au nombre d'hectares donnés à bail est considérée comme un bail de droits au paiement avec terres au sens de l'article 46 du règlement: a) lorsqu'un agriculteur a cédé à bail à un autre agriculteur tout ou partie de son exploitation au plus tard à la date d'introduction des demandes au titre du régime de paiement unique durant sa première année d'application, b) que le contrat de bail expire après la date limite d'introduction d'une demande au titre du régime de paiement unique, et c) que le bailleur décide de céder à bail ses droits au paiement à l'agriculteur ayant pris à bail tout ou partie de son exploitation. 2. Le bailleur demande l'établissement des droits au paiement conformément à l'article 12, en joignant à sa demande une copie du contrat de bail et en indiquant les unités de production et le nombre d'hectares dont il a l'intention de céder à bail les droits au paiement correspondants. S'il y a lieu, l'article 42, paragraphe 9, du règlement (CE) no 1782/2003 s'applique. 3. Le preneur introduit une demande de paiement au titre du régime de paiement unique conformément à l'article 12, en joignant à sa demande une copie du contrat de bail. 4. Un État membre peut exiger que les demandes du preneur et du bailleur soient introduites ensemble ou que la deuxième demande contienne une référence à la première. " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 10 du décret du 24 novembre 2006 pris pour l'application de ce règlement (CE) n° 795/2004 et notamment ses articles 17, 21 et 27 : " I - Un agriculteur qui a acquis ou pris à bail, pour une durée d'au moins cinq ans, des terres en vue de leur exploitation, après le 1er janvier 2000 et au plus tard le 15 mai 2004, et qui démontre qu'il n'a pas pu bénéficier d'un transfert de droits à paiement unique au sens du I de l'article 6 pour l'un des motifs qu'il mentionne peut demander à bénéficier d'une dotation issue de la réserve nationale. (...) " ; qu'aux termes de l'article 6- I du même décret : " Un agriculteur (...) peut demander à bénéficier de droits à paiement unique supplémentaires issus de la réserve nationale s'il démontre qu'il n'a pas pu bénéficier d'un transfert de droits à paiement unique conformément aux articles 17 et 27 du règlement (CE) n° 795/2004 du 21 avril 2004 susvisé ou au 2 de l'article 46 du règlement (CE) n° 1782-2003 du 29 septembre 2003 tel que précisé par l'article 2 du décret du 19 juin 2006 susvisé pour l'un des motifs suivants : (...) b) Il exploite des terres précédemment exploitées par une personne morale qui disposait des droits à paiement unique correspondant à ces terres et qui a été radiée du registre du commerce et des sociétés (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que la conclusion d'un bail portant sur des terres dotées de DPU n'entraîne pas transfert de ces droits dont les parties au bail doivent convenir expressément ; que le transfert de DPU doit être exprès et porté soit par le contrat de location des terres, soit par une convention annexe entre le nouveau preneur et le détenteur des droits à paiement unique dès lors que ces baux, l'un portant sur les terres, l'autre sur les droits à paiement unique, n'ont pas le même objet et peuvent donner lieu à deux conventions ; que si le bail portant uniquement sur des DPU est autorisé à condition que le transfert des droits au paiement s'accompagne du transfert d'un nombre équivalent d'hectares admissibles au bénéfice de l'aide, la prise à bail de terres admissibles à l'aide n'entraîne pas implicitement le transfert des DPU correspondant ; que ce n'est que lorsqu'un agriculteur, qui a pris à bail entre la fin de la période de référence et le 29 septembre 2003 au plus tard, une exploitation dont les conditions ne peuvent être révisées au sens de l'article 22 du règlement 795-2004, en particulier lorsqu'il n'a pas pu bénéficier du transfert de ces droits pour une des raisons mentionnées au I de l'article 6 du décret précité du 24 novembre 2006, que celui-ci peut prétendre à obtenir des droits à paiement issus de la réserve nationale ;

5. Considérant que la décision du 28 novembre 2006, confirmée le 12 mars 2007, par laquelle le préfet des Côtes d'Armor a notifié à l'EARL de la Ville Térouze ses droits à paiement unique définitifs ne comportait pas de droits au titre des 4 ha 85 ares de terres agricoles louées depuis le 6 mars 2003 sur la commune de Trédias à M. Lorre, propriétaire des terres ; que l'intéressée fait valoir qu'elle était en droit d'obtenir des droits à paiement issus de la réserve nationale correspondant à cette surface dès lors qu'aucune révision de bail entre le bailleur des terres, non détenteur des DPU, et le nouveau preneur, ne pouvait contenir de clauses relatives au transfert de DPU et qu'elle se trouvait ainsi dans la situation spéciale prévue par l'article 22 du règlement CE où le preneur du bail ne peut bénéficier de DPU dans le cadre de la révision de son bail ; que, toutefois, elle n'établit pas, alors que le GAEC de l'Hôtellerie, titulaire du bail rural portant sur les surfaces dont il s'agit durant la période de référence entre le 1er janvier 2000 et le 31 décembre 2002, seul attributaire des DPU en sa qualité d'exploitant historique référencé, et qui n'a été radié du registre du commerce que le 14 novembre 2007, soit postérieurement à la décision contestée, qu'elle se serait trouvée dans une situation ne lui permettant pas d'obtenir rétroactivement le transfert des DPU de la part de l'ancien preneur des terres, et ne démontre pas qu'elle se serait ainsi trouvée dans une situation spéciale de nature à lui ouvrir droit à une attribution de DPU issus de la réserve nationale, que ce soit au sens de l'article 22 du règlement (CE) n° 795/2004 précité, ou au sens des articles 10 et 6-I du décret du 24 novembre 2006 de transposition des dispositions communautaires qui, au demeurant et contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, se sont bornés à définir sans les restreindre les cas de situation spéciale mentionnés à l'article 22 du règlement précité ; qu'il suit de là que le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé, pour ce motif et dans cette mesure, sa décision du 28 novembre 2006, confirmée le 12 mars 2007 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par l'EARL de la Ville Térouze doivent dès lors être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement n° 07-573, 07-1621 du tribunal administratif de Rennes en date du 31 décembre 2010 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par l'EARL de la Ville Térouze devant le tribunal administratif de Rennes est rejetée en tant qu'elle tendait à l'annulation de la décision du préfet des Côtes d'Armor du 28 novembre 2006 portant refus d'attribution de droits à paiement unique pour une surface de 4 ha 85 ares, ainsi que de la décision de rejet du recours gracieux de l'EARL de la Ville Térouze intervenue le 12 mars 2007.

Article 3 : Les conclusions présentées par l'EARL de la Ville Térouze au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire, à la l'EARL de la Ville Térouze et à la commune de Trédias.

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N° 11NT00751


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 11NT00751
Date de la décision : 24/01/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. François LEMOINE
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : DE MORHERY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-01-24;11nt00751 ?
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