Vu la requête, enregistrée le 16 novembre 2011, présentée pour M. Cheick A, demeurant ..., par Me Nechadi, avocat au barreau de Grenoble ; M. A demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 11-459 du 21 mars 2011 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 16 décembre 2010 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration rejetant son recours hiérarchique obligatoire contre la décision du 28 octobre 2010 du préfet de l'Isère ajournant à deux ans sa demande de naturalisation ;
2°) d'annuler la décision du 16 décembre 2010 pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au ministre, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, à titre principal, de lui accorder la nationalité française, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande de naturalisation, dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
Vu le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa demande, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 octobre 2012 :
- le rapport de M. Iselin, président-rapporteur ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête :
1. Considérant que M. A, de nationalité guinéenne, interjette appel de l'ordonnance du 21 mars 2011 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 16 décembre 2010 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration rejetant son recours hiérarchique obligatoire contre la décision du 28 octobre 2010 du préfet de l'Isère ajournant à deux ans sa demande de naturalisation ;
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours, ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que (...) des moyens inopérants (...) " ; qu'un moyen inopérant est un moyen qui, même s'il était fondé, serait sans influence possible sur la solution du litige dans lequel il a été soulevé ;
3. Considérant que par décision du 28 octobre 2010, le préfet de l'Isère a ajourné à deux ans la demande de naturalisation de M. A en raison du caractère incomplet de son insertion professionnelle, sa situation de demandeur d'emploi ne lui permettant pas de disposer de revenus suffisamment stables pour subvenir durablement à ses besoins ; que, par décision du 16 décembre 2010, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a rejeté le recours hiérarchique présenté par M. A contre la précédente décision ; que l'interessé a saisi le tribunal administratif de Nantes d'une demande tendant à l'annulation de la décision du 16 décembre 2010 ; qu'à l'appui de sa demande, M. A s'est borné à produire le contrat de travail à durée déterminée conclu avec la société Caterpillar le 17 janvier 2011 ; que la légalité d'une décision s'appréciant à la date à laquelle elle a été prise, un tel moyen était inopérant au regard du motif fondant la décision contestée ; que, par suite, l'ordonnance attaquée, prise sur le fondement des dispositions précitées du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, n'est pas entachée d'irrégularité ;
Sur la légalité de la décision contestée :
En ce qui concerne la légalité externe :
4. Considérant qu'il ressort de la demande de première instance que M. A n'a présenté qu'un moyen de légalité interne devant le tribunal administratif de Nantes ; qu'il n'est, par suite, pas recevable à soutenir pour la première fois en appel que la décision du ministre rejetant son recours hiérarchique serait insuffisamment motivée ;
5. Considérant toutefois que le requérant est recevable à invoquer le moyen d'ordre public tiré de l'incompétence du signataire de la décision litigieuse ; qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du gouvernement : " A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre (...) et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : 1° Les secrétaires généraux des ministères, les directeurs d'administration centrale (...) " ; que l'article3 du même décret prévoit que " Les personnes mentionnées aux 1° et 3° de l'article 1er peuvent donner délégation pour signer tous actes relatifs aux affaires pour lesquelles elles ont elles-mêmes reçu délégation : 1° Aux magistrats, aux fonctionnaires de catégorie A et aux agents contractuels chargés de fonctions d'un niveau équivalent, qui n'en disposent pas au titre de l'article 1er (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier que par décision du 21 juillet 2009, publiée au Journal officiel du 25, Mme Aubin, signataire de la décision contestée, a reçu délégation de signature de M. Aubouin, directeur de l'accueil, de l'intégration et de la citoyenneté au ministère chargé des naturalisations ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée manque en fait ;
En ce qui concerne la légalité interne :
6. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger. " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret susvisé du 30 décembre 1993 : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions (...) " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre chargé des naturalisations de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte le degré d'insertion professionnelle du postulant ainsi que le niveau et la stabilité de ses ressources ;
7. Considérant que pour rejeter le recours hiérarchique présenté par M. A contre la décision du préfet de l'Isère ajournant à deux ans sa demande de naturalisation, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration s'est fondé sur la circonstance que sa situation de demandeur d'emploi ne lui permet pas de disposer de revenus suffisamment stables pour subvenir durablement à ses besoins ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté qu'à la date de la décision contestée, M. A était demandeur d'emploi ; qu'ainsi, et alors même que l'intéressé parle couramment le français, a une famille et est parfaitement intégré, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a pu, dans les circonstances de l'espèce, ajourner à deux ans la demande de naturalisation présentée par M. A, sans entacher sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ;
9. Considérant que la circonstance que M. A a conclu, le 17 janvier 2011, un contrat de travail avec la société Caterpillar est sans incidence sur la légalité de la décision contestée, qui s'apprécie à la date à laquelle elle a été prise ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la demande de M. A, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce que la cour enjoigne au ministre, à titre principal, de lui accorder la nationalité française, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande de naturalisation ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le conseil de M. A demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Cheick A et au ministre de l'intérieur.
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N° 11NT02921