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18/10/2012 | FRANCE | N°11NT02222

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 18 octobre 2012, 11NT02222


Vu la requête, enregistrée le 10 août 2011, présentée pour M. Laurent X, demeurant ..., par Me Labrusse, avocat au barreau de Nantes ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-145 du 1er juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

2°) d'annuler la décision du 6 janvier 2011 par laquelle le président du conseil général du département du Calvados a confirmé sa décision du 18 novembre 2010 lui accordant une remise partielle de 2 291,65 euros, sur un montant total de 4 583,30 euros, sur un indu de revenu de solidarité

active se rapportant à la période du 1er juillet 2009 au 31 août 2010 ;

3°...

Vu la requête, enregistrée le 10 août 2011, présentée pour M. Laurent X, demeurant ..., par Me Labrusse, avocat au barreau de Nantes ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-145 du 1er juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

2°) d'annuler la décision du 6 janvier 2011 par laquelle le président du conseil général du département du Calvados a confirmé sa décision du 18 novembre 2010 lui accordant une remise partielle de 2 291,65 euros, sur un montant total de 4 583,30 euros, sur un indu de revenu de solidarité active se rapportant à la période du 1er juillet 2009 au 31 août 2010 ;

3°) de faire droit à sa demande de remise de l'intégralité de sa dette de revenu de solidarité active ;

4°) de mettre à la charge du département du Calvados une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2012 :

- le rapport de M. Lemoine, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

1. Considérant que M. X relève appel du jugement du 1er juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du

6 janvier 2011 du président du conseil général du Calvados confirmant sa décision du 18 novembre 2010 par laquelle il ne lui a accordé qu'une remise partielle de 2 291,65 euros sur un indu de revenu de solidarité active, se rapportant à la période du 1er juillet 2009 au 31 août 2010, d'un montant total de 4 583,30 euros ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 262-46 du code de l'action sociale et des familles : " Tout paiement indu de revenu de solidarité active est récupéré par l'organisme chargé du service de celui-ci ainsi que, dans les conditions définies au présent article, par les collectivités débitrices du revenu de solidarité active / [...]La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général ou l'organisme chargé du service du revenu de solidarité active pour le compte de l'Etat, en cas de bonne foi ou de précarité de la situation du débiteur, sauf si cette créance résulte d'une manoeuvre frauduleuse ou d'une fausse déclaration.[...] " ; qu'il appartient à la juridiction administrative, saisi d'une demande dirigée contre une décision refusant ou ne faisant que partiellement droit à une demande de remise ou de réduction d'indu, non seulement d'apprécier la légalité de cette décision, mais aussi de se prononcer elle-même sur la demande en recherchant si, au regard des circonstances de fait existant à la date de sa propre décision, la situation de précarité du débiteur et sa bonne foi justifient que lui soit accordée une remise ou une réduction supplémentaire ; que pour l'examen de ces deux conditions, le juge est ainsi conduit à substituer sa propre appréciation à celle de l'administration ;

3. Considérant que si M. X fait valoir que le tribunal administratif de Caen a, en rejetant sa demande sans apprécier le bien-fondé de sa demande de remise totale et en limitant son examen à celui de la légalité de la décision du président du conseil général du 6 janvier 2011, méconnu l'étendue de sa compétence, il résulte toutefois du jugement attaqué qu'en indiquant qu'aucun élément de l'instruction ne justifiait qu'une réduction supplémentaire soit accordée à M. X les premiers juges, après avoir pris en compte le montant des ressources de l'intéressé et avoir constaté l'absence de preuves relatives à ses charges et en particulier l'absence de justificatifs de la réalité d'un prêt à la consommation et d'un prêt familial qu'il invoquait, ont également statué sur l'opportunité d'accorder la réduction supplémentaire sollicitée ; que, dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges auraient méconnu l'étendue de leur compétence en omettant d'apprécier sa demande de réduction de sa dette de revenu de solidarité active ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que si M. X soutient également que l'autorité administrative a pris sa décision en référence à un barême qui ne pouvait lui être opposé et fonder légalement la décision contestée faute d'avoir été publié, il résulte toutefois de l'instruction que le tableau intitulé " Remise de dette RMI ", adopté par une délibération de la commission permanente du conseil général du 7 novembre 2005, a fait, en tout état de cause, l'objet d'une publication au recueil des actes administratif du département du mois de novembre 2005 ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, que ce barème, qui comporte, en fonction du quotient familial, un pourcentage de remise de dette proposé en cas de demande formulée en ce sens, se borne à définir des orientations dont le président du conseil général peut faire usage en fonction de la situation de chaque demandeur et dont il peut s'écarter en fonction de chaque cas particulier ; que son but est d'établir une corrélation entre les capacités contributives du demandeur, en fonction de la composition de son foyer, la précarité de l'allocataire et la remise qui peut être accordée, et qu'il présente ainsi un caractère indicatif auquel il peut être dérogé pour des raisons tenant aux circonstances de chaque espèce ; qu'il ressort des termes mêmes de la décision contestée que le président du conseil général n'a pas fait une application automatique de ce barème mais a au contraire étudié la situation du requérant en fonction des éléments fournis par celui-ci ; qu'ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que le président du conseil général se serait senti lié par ce barème et aurait méconnu le large pouvoir d'appréciation qu'il tire de l'article L. 262-46 pour accorder à M. X la réduction de l'indu en litige ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que le moyen tiré de ce que le titre exécutoire émis à l'encontre de M. X le 30 novembre 2010 ne comporterait pas les bases de liquidation de la créance par référence au montant de l'indu de revenu de solidarité active en cause est inopérant, dès lors que ni ce titre ni le bien-fondé de la créance ne sont contestés par le requérant ;

7. Considérant, toutefois, que si le président du conseil général du Calvados soutient avoir fait une juste appréciation de la situation financière de M. X, il résulte des pièces fournies pour la première fois en appel par celui-ci qu'il justifie avoir souscrit, à compter du 5 août 2007, un prêt à la consommation de 9 500 euros dont les échéances mensuelles sont de 189 euros, être redevable d'un prêt familial souscrit auprès d'un tiers dont les échéances mensuelles sont de 315 euros, ainsi que de frais de téléphonie pour un montant mensuel de 28,50 euros ; que, compte tenu de la gratuité du logement dont il bénéficie ainsi que du montant de revenu de solidarité active de 588 euros auquel il peut prétendre, le reste à vivre de M. X peut être évalué à 55 euros ; qu'il est par ailleurs constant que l'indu dont le remboursement a été réclamé trouve son origine dans l'absence de prise en compte dans les revenus de M. X d'une allocation chômage perçue jusqu'au 4 août 2009 et que l'importance du montant de cet indu réside dans le délai tardif avec lequel la caisse d'allocations familiale a alerté le président du conseil général de cette omission et en a ordonné le remboursement ; qu'il n'est pas allégué que l'omission en cause aurait été commise délibérément par l'allocataire tenu de faire connaître à l'organisme chargé du service de la prestation toutes informations relatives aux ressources de son foyer, ni qu'il aurait omis délibérément de faire connaître un changement dans ses ressources lors de la première déclaration trimestrielle ; que le requérant indique par ailleurs, sans être contredit sur ce point, qu'il était, au moment de la constitution de son dossier, suivi pour son addiction à l'alcool, hospitalisé à ce titre en novembre et décembre 2010 et qu'il avait confié le suivi de son dossier à une association lui venant en aide ; que, dans ces conditions, eu égard à l'origine de l'indu litigieux, et compte tenu du caractère établi en appel de la précarité de la situation financière et familiale du requérant et de sa bonne foi, c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'en limitant à 50 % le montant de la remise accordée à M. X, le président du conseil général du Calvados avait fait une exacte appréciation de la situation de celui-ci ; qu'il y a lieu d'accorder à M. X une remise supplémentaire de 25 % de l'indu de revenu de solidarité active en litige ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que M. X est fondé dans cette mesure à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique :

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du département du Calvados une somme de 500 euros au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens, sous réserve que Me Labrusse renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État ; qu'il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du département du Calvados présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il est accordé à M. X une remise partielle complémentaire de la moitié de l'indu de revenu de solidarité active resté à sa charge, soit une somme de 1 145,82 euros au titre de la partie " forfaitaire ".

Article 2 : La décision du 6 janvier 2011 du président du conseil général du département du Calvados est annulée en tant qu'elle a limité à 50 %, soit un montant de 2 291,65 euros, le montant de la remise de l'indu de revenu de solidarité active accordée à M. X.

Article 3 : Le jugement du 1er juin 2011 du tribunal administratif de Caen est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 5 : Le département du Calvados versera la somme de 500 euros (cinq cents euros) à Me Labrusse, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 6 : Les conclusions du département du Calvados présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. Laurent X et au département du Calvados.

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N° 11NT02222 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 11NT02222
Date de la décision : 18/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. François LEMOINE
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : GORAND

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-10-18;11nt02222 ?
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