Vu la requête, enregistrée le 12 novembre 2010, présentée pour M. Guy X, demeurant ..., par Me Dubreil, avocat au barreau de Nantes ; M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 09-37 du 25 mars 2010 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 800 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi à raison de " l'empoisonnement " de ses bovins ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 800 000 euros en réparation de ses préjudices ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Dubreil de la somme de 2 500 euros en application des articles 37 et 75 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, moyennant la renonciation de son avocat à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la consommation ;
Vu le code rural ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 juin 2012 :
- le rapport de Mme Gélard, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;
- et les observations de Me Kergourlay, substituant Me Dubreil, avocat de
M. X ;
Considérant qu'au cours de l'année 2000, M. X, agriculteur spécialisé dans l'élevage de taurillons et la production laitière, a retiré de la consommation le lait produit sur son exploitation en raison d'une chute de sa production laitière dont l'origine était inconnue ; qu'en 2003, cinq des bovins de son cheptel ont été abattus ; que de légères traces d'hydrocarbures ont été retrouvées dans le corps de ces animaux ; que le 6 septembre 2008, M. X, qui
avait été contraint de céder l'ensemble de son exploitation en raison de difficultés financières, a adressé une réclamation préalable au préfet de la Mayenne, qui l'a rejetée ; que le 5 janvier 2009, il a saisi le tribunal administratif de Nantes d'une demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 800 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait d'un " empoisonnement " de ses animaux conjugué à une inertie des services vétérinaires départementaux ; que, par un jugement du 25 mars 2010, dont l'intéressé interjette appel, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 221-1 du code rural dans sa rédaction alors en vigueur : " Suivant les modalités prévues par un arrêté conjoint du ministre chargé de l'agriculture et du ministre chargé de l'économie et des finances, le ministre chargé de l'agriculture peut prendre toutes mesures destinées à prévenir l'apparition, à enrayer le développement et à poursuivre l'extinction des maladies des animaux réputées contagieuses, en vertu du présent titre./ Des décrets en Conseil d'Etat définissent les modalités selon lesquelles peuvent être prises les mesures de lutte contre les maladies des animaux non réputées contagieuses. " ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les animaux appartenant à M. X seraient décédés d'une maladie, contagieuse ou non ; qu'au cours d'une visite d'inspection, les services vétérinaires de la Mayenne ont seulement relevé une mauvaise alimentation et un mauvais entretien de son cheptel ; que, dans ces conditions, l'intéressé n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions précitées de l'article L. 221-1 du code rural pour solliciter la condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices qu'il estime avoir subis en raison d'une carence des services de l'Etat ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 231-1 du code rural dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) II . - Dans l'intérêt de la protection de la santé publique, il doit être procédé :
1° Au contrôle officiel des animaux vivants appartenant à des espèces dont la chair ou les produits sont destinés à l'alimentation humaine ou animale et de leurs conditions de production ; 2° Au contrôle officiel des conditions d'abattage des animaux mentionnés au 1° ci-dessus ; 3° Au contrôle officiel des produits d'origine animale, des denrées alimentaires en contenant, des
sous-produits animaux et des aliments pour animaux ; 4° A la détermination et au contrôle officiel des conditions d'hygiène dans lesquelles les produits d'origine animale, les denrées alimentaires en contenant, les sous-produits animaux et les aliments pour animaux sont préparés, transformés, conservés ou éliminés, notamment lors de leur transport et de leur mise en vente ; 5° Au contrôle officiel de la mise en oeuvre des bonnes pratiques d'hygiène et des systèmes d'analyse des dangers et des points critiques pour les maîtriser, en application de l'article 10 du règlement (CE) n° 882 / 2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ; 6° Au contrôle officiel des conditions techniques du transport des denrées alimentaires sous température dirigée. " ; que ces dispositions visent uniquement à assurer la protection de la santé publique et des consommateurs ; que, par suite, M. X ne peut utilement s'en prévaloir pour solliciter une indemnisation des préjudices qui résulteraient du décès de ses animaux ou de la mévente du lait produit sur son exploitation ;
Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L. 211-3, chapitre Ier du titre Ier du livre II du code de la consommation relatif à la conformité et la sécurité des produits et des services : " Le présent chapitre est applicable aux relations contractuelles entre le vendeur agissant dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale et l'acheteur agissant en qualité de consommateur. " ; que ces dispositions régissent les relations entre les vendeurs professionnels et les acheteurs ayant la qualité de consommateurs ; qu'ainsi M. X, qui ne vendait ni ses animaux, ni les produits de son exploitation directement à des consommateurs, n'entrait pas dans les prévisions du chapitre V du même titre relatif aux pouvoirs d'enquête des pouvoirs publics ; que, par suite, il ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions pour soutenir que l'Etat aurait manqué à son devoir de contrôle ;
Considérant que par les autres arguments qu'il invoque, tirés de ce qu'il ne saurait supporter seul la mévente de sa production agricole, qui était indépendante de sa volonté et susceptible de provoquer des réactions de la part des consommateurs, qu'il ne serait pas établi qu'il ne nourrissait ses animaux qu'avec de la paille, ou qu'il n'a pas pu vendre le lait retiré de la consommation ou ses animaux morts ou malades et que ses graves difficultés financières l'ont conduit à la vente de son exploitation, M. X n'établit pas que l'Etat aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X, qui n'établit pas davantage la réalité de la perte de chance d'être indemnisé qu'il invoque par ailleurs, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande indemnitaire ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement, en application des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, de la somme que le conseil de M. X demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Guy X et au ministre de l'agriculture et de l'agroalimentaire.
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N° 10NT02426 2
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