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07/06/2012 | FRANCE | N°11NT02755

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 07 juin 2012, 11NT02755


Vu la requête, enregistrée le 14 octobre 2011, présentée par le PREFET DES COTES-D'ARMOR ; LE PREFET DES COTES-D'ARMOR demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-2101 en date du 15 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 5 mai 2011 refusant à Mme Stelica X la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français, ou subsidiairement de prononcer le sursis à exécution de ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de Mme X présentée devant le tribunal ;

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Vu la requête, enregistrée le 14 octobre 2011, présentée par le PREFET DES COTES-D'ARMOR ; LE PREFET DES COTES-D'ARMOR demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-2101 en date du 15 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 5 mai 2011 refusant à Mme Stelica X la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français, ou subsidiairement de prononcer le sursis à exécution de ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de Mme X présentée devant le tribunal ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité instituant la Communauté économique européenne signé le 25 mars 1957 modifié par l'acte unique européen signé les 17 et 28 février 1986 ;

Vu le traité signé le 25 avril 2005 relatif à l'adhésion de la République de Bulgarie et de la Roumanie à l'Union européenne, notamment son annexe VII ;

Vu la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des états membres ;

Vu la loi n° 2006-1254 du 13 octobre 2006 autorisant la ratification du traité relatif à l'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie à l'Union européenne ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2012 :

- le rapport de M. Pouget, premier conseiller ;

Considérant que, par un arrêté en date du 5 mai 2011, le PREFET DES COTES-D'ARMOR a refusé de délivrer une carte de séjour à Mme X, de nationalité roumaine, lui a prescrit l'obligation de quitter le territoire français et a désigné la Roumanie comme pays de renvoi ; que, le tribunal administratif de Rennes ayant, par un jugement du 15 septembre 2011, annulé cet arrêté, le PREFET DES COTES-D'ARMOR relève appel de ce jugement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'espace économique européen ou de la Confédération suisse a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; (...) " (...) " ; que l'article L. 121-2 du même code dispose que : " Les ressortissants visés à l'article L. 121-1 qui souhaitent établir en France leur résidence habituelle se font enregistrer auprès du maire de leur commune de résidence dans les trois mois suivant leur arrivée. Ils ne sont pas tenus de détenir un titre de séjour. S'ils en font la demande, il leur est délivré un titre de séjour. Toutefois, demeurent soumis à la détention d'un titre de séjour durant le temps de validité des mesures transitoires éventuellement prévues en la matière par le traité d'adhésion du pays dont ils sont ressortissants, et sauf si ce traité en stipule autrement, les citoyens de l'Union européenne qui souhaitent exercer en France une activité professionnelle. Si les citoyens mentionnés à l'alinéa précédent souhaitent exercer une activité salariée dans un métier caractérisé par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie, au plan national, par l'autorité administrative, ils ne peuvent se voir opposer la situation de l'emploi sur le fondement de l'article L. 341-2 du code du travail (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 121-16 du même code : " I. - Sans préjudice des dispositions du cinquième alinéa de l'article L. 121-2, les ressortissants des Etats membres de l'Union européenne soumis à des mesures transitoires par leur traité d'adhésion qui souhaitent exercer une activité professionnelle en France sont tenus de solliciter la délivrance d'une carte de séjour ainsi que l'autorisation de travail prévue à l'article L. 341-2 du code du travail pour l'exercice d'une activité salariée (...) " ;

Considérant qu'aux termes de l'article 20 du traité signé le 25 avril 2005 relatif aux conditions et modalités d'admission de la République de Bulgarie et de la Roumanie à l'Union européenne : " Les mesures énumérées aux annexes VII du présent protocole sont applicables à la Roumanie dans les conditions définies dans lesdites annexes " et qu'aux termes du 1 " Libre circulation des personnes " de l'annexe VII : " (...) 2. Par dérogation aux articles 1er à 6 du règlement CEE n° 1612/68 et jusqu'à la fin de la période de deux ans suivant la date d'adhésion, les Etats membres actuels appliqueront les mesures nationales, ou des mesures résultant d'accords bilatéraux, qui réglementent l'accès des ressortissants roumains à leur marché du travail. Les Etats membres actuels peuvent continuer à appliquer ces mesures jusqu'à la fin de la période de cinq ans suivant la date d'adhésion (...) 5. Un État membre maintenant des mesures nationales ou des mesures résultant d'accords bilatéraux à la fin de la période de cinq ans visée au paragraphe 2 peut les proroger, après en avoir averti la Commission, jusqu'à la fin de la période de sept ans suivant la date d'adhésion si son marché du travail subit ou est menacé de subir des perturbations graves. À défaut de cette notification, les articles 1er à 6 du règlement (CEE) n° 1612/68 s'appliquent. 6. Durant la période de sept ans suivant la date d'adhésion, les États membres dans lesquels, en vertu du paragraphe 3, 4 ou 5, les articles 1er à 6 du règlement (CEE) n° 1612/68 s'appliquent en ce qui concerne les ressortissants roumains, et qui délivrent des permis de travail à des ressortissants roumains à des fins d'observation durant cette période, le feront automatiquement (...) " ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces stipulations et dispositions que les citoyens roumains, qui sont ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne soumis à des mesures transitoires par le traité d'adhésion de leur pays d'origine, doivent, pendant la période transitoire visée ci-dessus et prévue au 2 du 1 de l'annexe VII du protocole relatif aux conditions et modalités d'admission de la République de Roumanie à l'Union européenne, lorsqu'ils souhaitent exercer une activité professionnelle salariée en France, solliciter la délivrance d'une carte de séjour ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, entrée sur le territoire français selon ses dires le 1er novembre 2009, n'a cherché à régulariser sa situation au regard du droit au séjour qu'au mois d'avril 2011 ; que la demande de titre de séjour qu'elle a alors présentée ne faisait pas mention de sa volonté d'exercer en France une activité professionnelle salariée et n'était d'ailleurs pas assortie d'une demande de délivrance de l'autorisation de travail prévue par les dispositions précitées de l'article R. 121-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'autorité préfectorale n'est pas tenue, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si le demandeur d'un titre de séjour peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une disposition du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui n'est pas manifestement invoquée à l'appui de sa demande ; que, dans ces conditions, il ne peut être reproché au PREFET DES COTES-D'ARMOR de n'avoir pas instruit la demande de titre de Mme X sur le fondement de l'article L. 121-2 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le préfet a méconnu le champ d'application de la loi en faisant application des dispositions générales de l'article L. 121-1 du même code pour refuser l'admission au séjour de l'intéressée et ont, en conséquence, annulé l'arrêté contesté du 15 mai 2011 ;

Considérant qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens présentées par Mme X à l'appui de sa demande en annulation de l'arrêté litigieux ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, qui bénéficie de l'aide médicale d'Etat, n'établit pas qu'elle disposerait d'une assurance maladie personnelle ainsi que de ressources suffisantes pour subvenir à ses besoins et à ceux des membres de sa famille et ne pas dépendre complètement du système d'assistance sociale français ; que, dans ces conditions, c'est sans méconnaître les dispositions précitées de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et sans que Mme X puisse faire utilement valoir qu'en refusant de lui attribuer un titre de séjour l'autorité administrative ne l'a pas mise à même de pouvoir exercer une activité professionnelle rémunérée, que le PREFET DES COTES-D'ARMOR a pu refuser d'accorder à Mme X un titre de séjour ;

Considérant, d'autre part, que Mme X, entrée en France en novembre 2009 à l'âge de 29 ans, n'établit pas, en dépit du décès de son père, ne pas avoir conservé d'autres attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'elle est célibataire et ne dispose en France d'autre famille proche que ses enfants, âgés respectivement de 6 ans et 3 ans ; que rien ne fait obstacle à ce que ces derniers regagnent la Roumanie en compagnie de leur mère afin que la cellule familiale s'y reconstitue et qu'ils y poursuivent leur scolarité ; que, dans ces conditions, la décision de refus de titre de séjour contestée n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ;

Considérant, enfin, que Mme X, si elle soutient que l'arrêté contesté méconnaitrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, n'assortit en tout état de cause ce moyen d'aucune précision permettant au juge d'en apprécier le bien-fondé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande présentée par Mme X devant le tribunal administratif de Rennes doit être rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement au conseil de Mme X de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 11-2101 du tribunal administratif de Rennes en date du 15 septembre 2011 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme X devant le tribunal administratif de Rennes est rejetée, de même que ses conclusions présentées devant la cour au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme Stelica X.

Une copie sera adressée au PREFET DES COTES-D'ARMOR.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 11NT02755
Date de la décision : 07/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : BLOT DE LA IGLESIA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-06-07;11nt02755 ?
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