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29/03/2012 | FRANCE | N°10NT01365

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 29 mars 2012, 10NT01365


Vu la requête, enregistrée le 29 juin 2010, présentée pour la SA VAPRAN, dont le siège se situe Le Ridor à Plemet (22210), par Me Druais, avocat au barreau de Rennes ; la SA VAPRAN demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 06-5092 en date du 27 avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à réparer les préjudices résultant pour elle de la mesure de retrait des produits d'origine animale prise par le préfet du Calvados le 19 octobre 2000 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser, d'une part,

la somme de 249 123,16 euros, somme portant intérêts au taux légal à compter...

Vu la requête, enregistrée le 29 juin 2010, présentée pour la SA VAPRAN, dont le siège se situe Le Ridor à Plemet (22210), par Me Druais, avocat au barreau de Rennes ; la SA VAPRAN demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 06-5092 en date du 27 avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à réparer les préjudices résultant pour elle de la mesure de retrait des produits d'origine animale prise par le préfet du Calvados le 19 octobre 2000 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser, d'une part, la somme de 249 123,16 euros, somme portant intérêts au taux légal à compter du 30 juin 2004, d'autre part, les sommes de 12 457,54 euros et de 1 853,80 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code rural ;

Vu l'ordonnance n° 2550 du 15 juin 2000 ;

Vu l'article 101 de la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 ;

Vu l'arrêté du 3 décembre 1990 fixant les mesures de police sanitaire relatives à l'encéphalopathie spongiforme bovine ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 mars 2012 :

- le rapport de M. Coiffet, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

- et les observations de Me Thomas-Tinot, substituant Me Druais, avocat de la SA VAPRAN ;

Considérant qu'à l'occasion d'une livraison, le 10 octobre 2000, de bovins à l'abattoir Soviba de Villers-Bocage un test de dépistage de l'encéphalopathie spongiforme bovine a été réalisé sur une vache provenant du cheptel n° 27 02 361 594 ; que ce test, dont les résultats ont été connus le 13 octobre suivant, s'est révélé positif et que l'animal a été abattu le jour-même suivant la procédure d'abattage d'urgence ; que l'enquête entreprise dès réception de ces résultats a mis en évidence le fait qu'onze vaches provenant du même cheptel que l'animal infecté avaient été présentées le 4 octobre 2000 dans le même abattoir par le même négociant et avaient été tuées le lendemain, leurs produits ayant alors suivi les circuits habituels de production et de commercialisation ; que, par une télécopie du 19 octobre 2000, le vétérinaire-inspecteur représentant le préfet du Calvados a demandé au directeur de l'abattoir Soviba de procéder au retrait du marché de tous les produits dans lesquels avaient été incorporées les viandes issues des carcasses des onze animaux abattus le 5 octobre 2000 et de les rapatrier sur le site de Villers-Bocage pour y être consignés en attente de leur devenir ; que cette mesure a été confirmée au directeur de cet abattoir le lendemain par le directeur des services vétérinaires du Calvados ; que la SA VAPRAN, qui avait acquis le 6 octobre 2000 auprès des abattoirs Soviba des produits provenant des carcasses suspectes a été informée le 23 octobre 2000 par l'administration que tous les produits issus du cheptel incriminé, encore détenus par des fabricants d'aliments ou par des entreprises en amont, devraient être retirés du marché ; qu'estimant avoir subi un préjudice financier à raison des produits achetés par elle, la SA VAPRAN a, après le rejet implicite de sa réclamation préalable, recherché devant le tribunal administratif de Rennes la responsabilité de l'Etat et demandé la condamnation de celui-ci à lui verser, d'une part, la somme de 249 123,16 euros à titre de dommages-intérêts, d'autre part, les sommes de 12 457,54 euros et de 1 853,80 euros au titre des frais d'expertise et de traduction exposés à la suite de la décision de retrait et des opérations de destruction des produits à laquelle elle a dû procéder ; qu'elle relève appel du jugement du 27 avril 2010 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande indemnitaire ;

Considérant qu'aux termes des dispositions applicables à l'espèce, issues de la loi susvisée du 9 juillet 1999, et reprises à l'article L. 231-1 du code rural énoncées au chapitre II : Dispositions relatives aux produits du Titre Troisième relatif au contrôle sanitaire des animaux et aliments : "Dans l'intérêt de la protection de la santé publique, il doit être procédé : (...) 2° A la détermination et au contrôle des conditions d'hygiène dans lesquelles a lieu l'abattage ; 3° A l'inspection de la salubrité et de la qualité des denrées animales ou d'origine animale destinées à cette consommation ; 4° A la détermination et à la surveillance des conditions d'hygiène dans lesquelles ces denrées sont préparées et conservées, notamment lors de leur transport et de leur mise en vente. / Pour ces mêmes raisons, il peut être procédé à l'inspection sanitaire et qualitative des animaux vivants appartenant à des espèces dont la chair ou les produits sont destinés à l'alimentation humaine et de leurs conditions de production dans tous les lieux et locaux professionnels, autres que ceux visés au 1° ci-dessus où ils sont détenus, et dans les véhicules professionnels de transport." ; qu'aux termes de l'article L. 232-2 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : "S'il est établi, après son départ de l'établissement d'origine, qu'un lot d'animaux ou denrées visées à l'article L. 231-1 présente ou est susceptible de présenter, compte tenu de ses conditions communes d'élevage, de production ou de commercialisation, un danger pour la santé publique, le préfet, sur la proposition d'un vétérinaire inspecteur habilité en vertu de l'article L. 231-2, en ordonne la consignation ou le rappel en un ou plusieurs lieux pour en permettre le contrôle. / Toute personne ayant acquis ou cédé un ou plusieurs éléments du lot et ayant connaissance de la décision de consignation ou de rappel est tenue d'en informer celui qui a fourni la marchandise et ceux à qui elle l'a cédée. / Les frais résultant de la décision de consignation ou de rappel, notamment les frais de transport, de stockage, d'analyses et de destruction, sont à la charge de l'opérateur concerné sans préjudice de la mise en cause de la responsabilité du fournisseur." ;

Considérant, en premier lieu, que la SA VAPRAN invoque l'illégalité fautive de la mesure de retrait prescrite par le préfet du Calvados le 19 octobre 2000 au motif qu'elle n'aurait pas été précédée de l'arrêté prévu à l'article 9 de l'arrêté du 3 décembre 1990 fixant les mesures de police sanitaire relatives à l'encéphalopathie spongiforme bovine ; qu'aux termes de cet article : "Lorsque l'existence de la BSE est confirmée par le résultat de l'examen histopathologique de l'encéphale prévu à l'article 1er du paragraphe b, du présent arrêté, le préfet prend sur proposition du directeur des services vétérinaires, un arrêté portant déclaration d'infection de l'exploitation d'appartenance de l'animal, s'il est mort ou s'il est euthanasié sur place, ou de l'exploitation de provenance s'il a été abattu dans un abattoir." ; que toutefois ces dispositions, incluses dans le chapitre III du décret susvisé du 3 décembre 1990, concernent les mesures que doit prendre l'autorité administrative en ce qui concerne les foyers d'ESB, c'est-à-dire à titre principal les exploitations d'élevage ; que de telles décisions sont sans lien avec la mesure de retrait contestée et que leur éventuelle omission ou illégalité est sans incidence sur cette mesure ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que, faute pour le négociant en bestiaux, qui a par ailleurs été condamné par le juge pénal pour comportement frauduleux, d'avoir procédé, préalablement à sa livraison, le 10 octobre 2000, à l'abattoir Soviba de Villers-Bocage, au contrôle de la qualité et de la conformité de la vache n° 27 02 361 594, qu'il a présentée comme accidentée alors qu'en réalité elle était malade, les services vétérinaires étaient tenus, ainsi qu'ils l'ont fait, de procéder à un contrôle ante mortem et de remonter la filière du cheptel suspecté ; que ce n'est qu'après la réalisation de cette enquête qu'il est apparu que les lots de bovins abattus le 4 octobre précédent étaient également issus du cheptel auquel appartenait la vache infectée et que toutes les viandes issues de ce cheptel devaient être regardées comme des produits à risque ; que, dans ces conditions, et dès lors que les produits incriminés étaient susceptibles de présenter un danger pour la santé publique, c'est à juste titre que le préfet du Calvados a ordonné leur retrait sur le fondement des dispositions précitées du premier alinéa de l'article L. 232-2 du code rural ; que l'absence alléguée, d'ailleurs infirmée par les faits exposés dans la présente instance, de contrôle de la qualité sanitaire des produits litigieux postérieurement à la décision de retrait litigieuse est sans incidence sur la légalité de cette décision ;

Considérant, enfin, que si la SA VAPRAN soutient que l'information relative au retrait des produits contaminés ne lui a été adressée que le 23 octobre 2000 par les services de l'Etat et fait valoir que ce retard non justifié, alors qu'elle avait déjà commencé à commercialiser les produits acquis auprès des abattoirs Soviba, lui a été préjudiciable, il ressort des termes de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 232-1 du code rural précité alors applicable que c'est aux personnes impliquées dans la chaîne de commercialisation et de distribution des produits contaminés qu'il incombait d'informer dans les meilleurs délais leurs fournisseurs et leurs clients ; que la société Soviba, pourtant informée dès le jour où l'administration, disposant de tous les éléments d'information et de contrôle requis, a pris sa décision de retrait, à savoir le 19 octobre 2000, ne s'est pas conformée immédiatement à l'obligation d'information qui lui était ainsi prescrite ; que, par suite, la SA VAPRAN qui, à cet égard, ne peut utilement soutenir que le principe de précaution aurait été méconnu, n'est pas fondée à invoquer l'existence d'un retard fautif de l'autorité administrative ni à soutenir qu'un tel retard serait à l'origine du préjudice dont elle demande réparation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et en l'absence de faute des services de l'Etat, que la SA VAPRAN n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que, dès lors, les conclusions présentées à ce titre par la SA VAPRAN ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE

Article 1er : La requête de la SA VAPRAN est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA VAPRAN et au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.

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N° 10NT01365 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 10NT01365
Date de la décision : 29/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : DRUAIS ; DRUAIS ; DRUAIS ; DRUAIS ; DRUAIS ; DRUAIS ; DRUAIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-03-29;10nt01365 ?
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