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03/02/2012 | FRANCE | N°10NT01315

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 03 février 2012, 10NT01315


Vu la requête, enregistrée le 23 juin 2010, présentée pour Mme Thérèse X demeurant ..., M. Michel Kenneth Y demeurant ..., Melle Léonore Y demeurant ..., Melle Jeanne Y demeurant ..., M. Alexandre Y demeurant ... et Melle Christine Y demeurant ..., par Me Geisz, avocat au barreau d'Alençon ; Mme X et les consorts Y demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 09-654 du 29 avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 janvier 2009 du préfet du Calvados portant déclaration d'utilité publique d

es acquisitions et des travaux de réalisation de la zone d'aménagement ...

Vu la requête, enregistrée le 23 juin 2010, présentée pour Mme Thérèse X demeurant ..., M. Michel Kenneth Y demeurant ..., Melle Léonore Y demeurant ..., Melle Jeanne Y demeurant ..., M. Alexandre Y demeurant ... et Melle Christine Y demeurant ..., par Me Geisz, avocat au barreau d'Alençon ; Mme X et les consorts Y demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 09-654 du 29 avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 janvier 2009 du préfet du Calvados portant déclaration d'utilité publique des acquisitions et des travaux de réalisation de la zone d'aménagement concerté (ZAC) à vocation mixte d'habitat et d'activité dite de la Presqu'île de la Touques à Deauville ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté en tant qu'il porte sur la Maison des Douanes ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Deauville une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 janvier 2012 :

- le rapport de M. François, premier conseiller ;

- les conclusions de M. d'Izarn de Villefort, rapporteur public ;

- et les observations de Me Geisz, avocat de Mme X et des consorts Y ;

Considérant que par arrêté du 16 janvier 2009 le préfet du Calvados a déclaré d'utilité publique les acquisitions et les travaux nécessaires à la réalisation de la zone d'aménagement concerté (ZAC) à vocation mixte d'habitat et d'activité dite de la Presqu'île de la Touques à Deauville ; que Mme X et les consorts Y relèvent appel du jugement du 29 avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité externe ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : L'expropriant adresse au préfet pour être soumis à l'enquête un dossier qui comprend obligatoirement : I. - Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages : 1° Une notice explicative ; 2° Le plan de situation ; 3° Le plan général des travaux ; 4° Les caractéristiques principales des ouvrages les plus importants (...) ;

Considérant que la circonstance que, lors de l'ouverture de l'enquête publique, la commune ait substitué dans le dossier d'enquête à un plan parcellaire difficilement lisible, un nouveau plan parcellaire de plus grand format et ait par ailleurs procédé à l'insertion, qui n'était pas obligatoire, dans ce même dossier d'un plan de zonage issu du plan local d'urbanisme, alors même que la délibération approuvant le PLU a été ultérieurement annulée par le tribunal administratif, ne sont pas de nature à entacher d'irrégularité la composition du dossier ; que, contrairement aux allégations des requérants, le plan du périmètre de la zone d'aménagement concerté définit correctement ses limites ; que la commune, qui mentionne dans le rapport de présentation l'intérêt patrimonial de la Maison des Douanes, n'était enfin pas tenue de l'identifier comme telle sur les plans joints au dossier ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 11-14-14 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : Le commissaire enquêteur (...) examine les observations consignées ou annexées aux registres d'enquête et entend toute personne qu'il lui paraît utile de consulter ainsi que l'expropriant s'il le demande. Le commissaire-enquêteur (...) établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et rédige des conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables ou non à la déclaration d'utilité publique de l'opération. ; que ces règles n'impliquent pas que le commissaire-enquêteur soit tenu de répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête, mais l'obligent néanmoins a indiquer, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le commissaire enquêteur a fait état dans son rapport des observations qui lui ont été adressées, a répondu aux plus significatives d'entre elles et a également consigné les réponses de la commune, au nombre desquelles celle relative à l'inclusion dans le projet de la Maison des Douanes qui avait donné lieu à la moitié des observations, et a développé sur plusieurs points les raisons pour lesquelles il donnait un avis favorable au projet, relevant notamment la volonté de la commune de reconquérir un secteur urbain devenu une friche industrielle en y assurant différents aménagements et enfin souligné l'impact mesuré de l'opération sur la propriété privée ; que, dans ces conditions, le rapport et l'avis du commissaire-enquêteur, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait été dépourvu d'impartialité, satisfont aux conditions posées par l'article R. 11-14-14 précité du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

En ce qui concerne la légalité interne ;

Considérant, en premier lieu, qu'une déclaration d'utilité publique ne constitue pas une mesure d'application d'un plan local d'urbanisme ; que, par suite, l'annulation le 22 mai 2009 par le tribunal administratif du plan local d'urbanisme de la communauté de communes Coeur Côte Fleurie est sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales : Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. (...) Elle est adressée aux conseillers municipaux par écrit et à domicile ; qu'aux termes de l'article L. 2121-12 dudit code : Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une notice explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal. (...) Le délai de convocation est fixé à cinq jours francs. ; que l'article L. 2121-13 de ce même code dispose que : Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ;

Considérant que par délibération du 5 mai 2008, le conseil municipal de Deauville, commune comptant plus de 3 500 habitants, a approuvé le périmètre de l'opération ainsi que l'utilité publique du projet et les dossiers de déclaration d'utilité publique et d'enquête parcellaire et sollicité l'ouverture de l'enquête publique y afférente ; qu'il ressort des pièces du dossier que les convocations des conseillers municipaux à ladite séance ont été distribuées le 25 avril 2008 à chaque membre du conseil, dans le délai de cinq jours francs prévu par l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales ; qu'étaient jointes à ces convocations, outre l'ordre du jour, une notice de synthèse rappelant l'historique de l'opération, ses principaux objectifs, son programme et ses principales caractéristiques, enfin, que la convocation précisait que l'entier dossier de la ZAC était consultable en mairie ; que, dans ces conditions, la délibération du 5 mai 2008 a satisfait aux exigences posées par les dispositions précitées du code général des collectivités territoriales ; que dès lors, les appelants ne sauraient utilement se prévaloir par voie d'exception de l'irrégularité de ladite délibération pour demander l'annulation de l'arrêté contesté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'une opération ne peut être légalement déclarée d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée ou à des intérêts généraux, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou l'atteinte à d'autres intérêts publics qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'opération litigieuse a pour objet de permettre à la commune de Deauville de réhabiliter le quartier de la Presqu'île de la Touques , inscrit dans un site privilégié entre l'embouchure de la Touques et des bassins portuaires, mais devenu au fil des ans une friche urbaine et industrielle ; que la commune entend aménager dans la zone d'aménagement concerté créée à cet effet des logements, des bureaux, des commerces, des équipements publics, des espaces verts, un parc paysager et une résidence hôtelière dans un environnement soigné ; que les requérants, qui possèdent des appartements dans la Maison des Douanes , ne contestent pas sérieusement que cet immeuble de grande valeur patrimoniale et historique, localisé sur l'avant-port au coeur de la zone, présente un caractère vétuste nécessitant d'importants travaux de rénovation, dont le coût estimé à près de trois millions d'euros ne peut être supporté par les seuls copropriétaires ; qu'il n'est pas établi par les pièces du dossier que sa transformation en résidence hôtelière et l'adjonction de deux ailes seraient de nature à le dénaturer ; que la création dans un quartier rénové d'une résidence de tourisme supplémentaire de bon niveau répond à la demande et à l'importance de la station balnéaire de Deauville ; que les 22 appartements que la ville détient dans le bâtiment litigieux ne peuvent être regardés comme des logements sociaux, alors au surplus que l'édification de tels logements figure dans le programme de la ZAC ; que, dans ces conditions, les inconvénients du projet, et notamment son coût, ne sont pas de nature à lui retirer son caractère d'utilité publique ;

Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces versées au dossier que depuis 1999, la commune de Deauville a envisagé de réhabiliter le quartier de la Presqu'île de la Touques ; que la circonstance qu'elle ait revendu en novembre 2010 au prix de 21 millions d'euros la Maison des Douanes au groupe Pierre et Vacances, qui doit la transformer en résidence hôtelière, dans le but notamment de réaliser au moindre coût son objectif d'intérêt général et d'équilibrer le bilan financier de la ZAC n'est pas de nature à entacher l'arrêté contesté de détournement de pouvoir ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X et les consorts Y ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Deauville, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à Mme X et aux consorts Y de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de mettre solidairement à la charge de Mme X et des consorts Y une somme de 1500 euros au titre des frais de même nature exposés par la commune de Deauville ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme X et des consorts Y est rejetée.

Article 2 : Mme X et les consorts Y verseront solidairement à la commune de Deauville une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Thérèse X, à M. Michel-Kenneth Y, à Mlle Léonore Y, à Mlle Jeanne Y, à M. Alexandre Y, à Mlle Christine Y, au ministre de l'intérieur, de l'outre mer, des collectivités territoriales et de l'immigration et à la commune de Deauville.

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N° 10NT01315 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 10NT01315
Date de la décision : 03/02/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Eric FRANCOIS
Rapporteur public ?: M. D IZARN de VILLEFORT
Avocat(s) : GEISZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-02-03;10nt01315 ?
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