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23/06/2011 | FRANCE | N°09NT02249

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 23 juin 2011, 09NT02249


Vu la requête, enregistrée le 15 septembre 2009, présentée pour Mme Isabelle et M. Christian X, agissant tant en leur nom propre qu'en leur qualité de représentants légaux de leur enfants Charly, Teddy et Sandra X, demeurant ..., Mme Lucie X, demeurant ..., M. Robert et Mme Léone Y, demeurant ..., par Me Guyon, avocat au barreau de Paris ; les CONSORTS X - Y demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 04-5559 du 8 juillet 2009 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier départemental Les Oudair

ies de La Roche-sur-Yon à leur verser la somme globale de 95 632,77...

Vu la requête, enregistrée le 15 septembre 2009, présentée pour Mme Isabelle et M. Christian X, agissant tant en leur nom propre qu'en leur qualité de représentants légaux de leur enfants Charly, Teddy et Sandra X, demeurant ..., Mme Lucie X, demeurant ..., M. Robert et Mme Léone Y, demeurant ..., par Me Guyon, avocat au barreau de Paris ; les CONSORTS X - Y demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 04-5559 du 8 juillet 2009 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier départemental Les Oudairies de La Roche-sur-Yon à leur verser la somme globale de 95 632,77 euros en réparation des préjudices résultant du décès de leur fils, frère et petit-fils, Tom X ;

2°) de condamner le centre hospitalier départemental Les Oudairies de La Roche-sur-Yon à leur verser la somme globale de 96 632,77 euros en réparation de leurs préjudices ;

3°) de mettre à la charge dudit établissement, outre les frais d'expertise, la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er juin 2011 :

- le rapport de Mme Gélard, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Geffray, rapporteur public ;

- et les observations de Me Guyon, avocat des CONSORTS X - Y ;

Considérant que le 9 mars 2001 vers 8 heures 45, Mme Isabelle X, âgée de quarante ans, a été hospitalisée, alors qu'elle était enceinte de son 4ème enfant et qu'elle ressentait des contractions ; qu'elle a été admise en salle de travail à 14 heures ; qu'une péridurale a été posée à 14 heures 40 ; que vers 19 heures, alors que la dilatation du col de l'utérus était complète, le docteur Z, gynécologue obstétricien, qui avait demandé à l'intéressée de faire un effort en vue de l'expulsion du bébé, a décidé d'utiliser les forceps de Tarnier ; que deux tractions ont été réalisées, sans résultat, par une interne ; que le médecin accoucheur a alors décidé d'utiliser les forceps de Gillepsie ; que lors de la seconde tentative que le docteur Z a lui-même pratiquée, les forceps ont dérapé sur la tête du foetus ; qu'à 19 heures 27 Mme X a subi une césarienne ; qu'à 19 heures 38 l'enfant était extrait mais avec un hématome très important ; qu'après avoir été admis en service de néonatologie du même centre hospitalier, l'enfant a été victime, à 23 heures 30, d'un malaise grave avec bradycardie, désaturation et chute tensionnelle nécessitant son transfert en urgence au centre hospitalier universitaire de Nantes, où il a été admis à 3 heures 04 ; que l'enfant Tom est décédé le 10 mars 2001 à 10 heures 30 ; que les parents, les frères, la soeur et les grands-parents de l'enfant, qui ont été déboutés devant la cour d'appel de Poitiers le 11 mars 2004 de leurs poursuites dirigées contre le docteur Z pour homicide involontaire, ont présenté une réclamation préalable auprès du centre hospitalier départemental Les Oudairies de La Roche-sur-Yon le 20 juillet 2004 ; qu'ils ont saisi le tribunal administratif de Nantes le 22 décembre 2004 ; que par un jugement avant dire droit en date du 27 décembre 2007 une expertise a été ordonnée, qui a été confiée par une ordonnance du président du tribunal administratif de Nantes du 21 janvier 2008 au professeur A, lequel a remis son rapport le 25 février 2009 ; que par un jugement en date du 8 juillet 2009 le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande des CONSORTS X - Y ; que les intéressés interjettent appel de ce jugement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du premier rapport d'autopsie médico-légale rédigé le 31 mars 2001 par les docteurs B et C, commis par le juge d'instruction du tribunal de grande instance de La Roche-sur-Yon, qu'une fracture de tout l'os pariétal droit sur une longueur de 9 cm a été constatée lors de l'autopsie au niveau de la tête de l'enfant ; qu'il est constant que cette fracture a engendré un hématome volumineux du scalp ainsi qu'une hémorragie sous-durale diffuse et une hémorragie méningée qui sont à l'origine du décès de l'enfant ; que le 3ème rapport d'expertise rendu le 14 septembre 2001 par les professeurs D et E, gynécologues accoucheurs, commis par le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Poitiers, confirme que vers 19 heures le docteur Z a constaté que la tête de l'enfant s'engageait dans le bassin en présentation transverse droite et qu'il existait une bosse séro-sanguine ; que deux tractions avec des forceps de Tarnier ont été réalisées sans succès par l'interne présente lors de l'accouchement puis deux autres tractions par le médecin accoucheur avec des forceps de Gillepsie ; que lors de la quatrième traction les branches des forceps ont dérapé sur la tête foetale et entraîné la chute de l'opérateur ; que selon les deux experts, le risque de dérapage des branches des forceps sur la tête foetale augmente lorsque les deux branches sont placées de façon asymétrique, ce qui est inévitable dans les présentations en variété transverse ; qu'en persistant à utiliser les forceps au-delà des deux premières tentatives infructueuses, alors qu'il connaissait les risques de dérapage, que l'enfant ne manifestait aucune souffrance foetale, qu'il était en présentation transverse et présentait au niveau de la tête une bosse séro-sanguine dont la dimension était incertaine, le praticien a fait courir des risques graves et injustifiés à l'enfant ; que le 6ème rapport d'expertise établi le 11 mars 2002 par les docteurs F, gynécologue obstétricien, et G, chef de service de pédiatrie et de néonatologie confirme l'erreur de jugement du médecin accoucheur ; que le 7ème rapport d'expertise en date du 19 février 2009 établi par le professeur A précise que la sage-femme avait rapidement estimé qu'une césarienne serait nécessaire compte tenu des difficultés observées ; que dans ces conditions, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le centre hospitalier départemental Les Oudairies de La Roche-sur-Yon n'avait commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité ;

Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Vendée justifie des frais d'hospitalisation et de soins dispensés à l'enfant à hauteur de 2 101,25 euros ; qu'elle a droit au remboursement de cette somme, assortie des intérêts au taux légal à compter du 13 mars 2009 ainsi qu'elle le demande ; qu'elle est également fondée à solliciter le versement de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, à hauteur de ses prétentions, lesquelles sont limitées à 772,55 euros ;

Considérant qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice moral des parents de l'enfant en condamnant le centre hospitalier départemental Les Oudairies de La Roche-sur-Yon à leur verser à chacun une somme de 13 000 euros ; que le préjudice moral de Teddy, Sandra et Charly, frères et soeur de l'enfant sera fixé à la somme demandée de 8 000 euros chacun ; que les grands-parents de l'enfant ont également subi un préjudice moral qu'il convient de fixer à 2 000 euros chacun ;

Considérant par ailleurs, que les époux X justifient avoir eu recours à un médecin conseil en produisant une facture de 950 euros ; qu'ils se sont également déplacés pour assister à l'expertise réalisée par le professeur A et justifient d'une dépense de transport à hauteur de 408,52 euros ; qu'enfin, s'agissant des frais d'obsèques et de sépulture, il sera fait une juste appréciation de leur préjudice en le fixant à 5 000 euros ; que le centre hospitalier départemental Les Oudairies de La Roche-sur-Yon versera à M. et Mme X une somme globale de 6 358,52 euros au titre de ces différents préjudices ;

Considérant que les frais et honoraires d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 2 000 euros par une ordonnance du président du tribunal administratif de Nantes du 9 mars 2009, ont été mis à la charge des époux X ; que le centre hospitalier départemental Les Oudairies de La Roche-sur-Yon, partie perdante dans la présente affaire, sera condamné à leur rembourser ladite somme ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les CONSORTS X -Y, ainsi que la CPAM de la Vendée sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier départemental Les Oudairies de La Roche-sur-Yon le versement aux CONSORTS X - Y, d'une part, ainsi qu'à la CPAM de la Vendée, d'autre part, les sommes respectives de 1 800 et 800 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 04-559 du tribunal administratif de Nantes du 8 juillet 2009 est annulé.

Article 2 : Le centre hospitalier départemental Les Oudairies de La Roche-sur-Yon versera à M. Christian et Mme Isabelle X une somme globale de 32 358,52 euros (trente-deux mille trois cent cinquante-huit euros et cinquante-deux centimes).

Article 3 : Le centre hospitalier départemental Les Oudairies de La Roche-sur-Yon versera à chacun des enfants de M. et Mme X une somme de 8 000 euros (huit mille euros).

Article 4 : Le centre hospitalier départemental Les Oudairies de La Roche-sur-Yon versera à Mme Lucie X, Mme Léone Y et M. Robert Y, grands-parents de l'enfant Tom X une somme de 2 000 euros (deux mille euros) chacun.

Article 5 : Le centre hospitalier départemental Les Oudairies de La Roche-sur-Yon versera à la CPAM de la Vendée une somme de 2 101,25 euros (deux mille cent un euros et vingt-cinq centimes), assortie des intérêts au taux légal à compter du 13 mars 2009, ainsi que la somme de 772,55 euros (sept cent soixante-douze euros et cinquante-cinq centimes) au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Article 6 : Les frais et honoraires d'expertise acquittés par M. et Mme X seront mis à la charge du centre hospitalier départemental Les Oudairies de La Roche-sur-Yon, qui leur remboursera la somme de 2 000 euros (deux mille euros).

Article 7 : Le surplus des conclusions de la demande et de la requête présentée par les CONSORTS X - Y est rejeté.

Article 8 : Le centre hospitalier départemental Les Oudairies de La Roche-sur-Yon versera aux CONSORTS X - Y une somme de 1 800 euros (mille huit cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 9 : Le centre hospitalier départemental Les Oudairies de La Roche-sur-Yon versera à la CPAM de la Vendée une somme de 800 euros (huit cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 10 : Le présent arrêt sera notifié à M. Christian et Mme Isabelle X, ainsi qu'à leurs enfants Teddy, Sandra et Charly, à Mme Lucie X, à M. Robert et Mme Léone Y, au centre hospitalier départemental Les Oudairies de La Roche-sur-Yon et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 09NT02249
Date de la décision : 23/06/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. COIFFET
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. GEFFRAY
Avocat(s) : GUYON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2011-06-23;09nt02249 ?
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