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28/01/2011 | FRANCE | N°08NT01037

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 28 janvier 2011, 08NT01037


Vu la requête enregistrée le 23 avril 2008, présentée pour la SOCIETE NEO PLOUVIEN, représentée par son gérant en exercice, dont le siège est 7, place du Champ de Foire à Carhaix (29270), par Me Guiheux, avocat au barreau de Paris ; la SOCIETE NEO PLOUVIEN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 05-1812 et 05-1917 du 28 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 29 octobre 2004 par lequel le préfet du Finistère lui a accordé un permis de construire huit éoliennes sur le territoire de la commune de Plouvien ;

2°)

de rejeter les demandes de l'association Les Abers et de M. et Mme X devant le ...

Vu la requête enregistrée le 23 avril 2008, présentée pour la SOCIETE NEO PLOUVIEN, représentée par son gérant en exercice, dont le siège est 7, place du Champ de Foire à Carhaix (29270), par Me Guiheux, avocat au barreau de Paris ; la SOCIETE NEO PLOUVIEN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 05-1812 et 05-1917 du 28 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 29 octobre 2004 par lequel le préfet du Finistère lui a accordé un permis de construire huit éoliennes sur le territoire de la commune de Plouvien ;

2°) de rejeter les demandes de l'association Les Abers et de M. et Mme X devant le Tribunal administratif de Rennes ;

3°) de mettre à la charge solidaire de l'association Les Abers et de M. et Mme X une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité ;

Vu le décret-loi du 21 février 1852 relatif à la fixation des limites de l'inscription maritime dans les fleuves et rivières affluant à la mer et sur le domaine public maritime ;

Vu le décret du 4 juillet 1853 portant règlement sur la pêche maritime côtière dans le deuxième arrondissement maritime ;

Vu le décret du 21 mars 1930 ;

Vu le décret n° 77-1141 du 12 novembre 1977 pris pour l'application de l'article 2 de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature ;

Vu le décret n° 2004-311 du 29 mars 2004 fixant la liste des communes riveraines des estuaires et des deltas considérées comme littorales en application de l'article L. 321-2 du code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 décembre 2010 :

- le rapport de M. Millet, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

- les observations de Me Guiheux, avocat de la SOCIETE NEO PLOUVIEN ;

- et les observations de Me Ménager, substituant Me Lahalle, avocat de M. Y, de M. et Mme Z et de M. et Mme A ;

Considérant que la SOCIETE NEO PLOUVIEN interjette appel du jugement du 28 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 29 octobre 2004 par lequel le préfet du Finistère lui a accordé un permis de construire pour l'implantation de huit éoliennes sur le territoire de la commune de Plouvien ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que l'imprécision alléguée du motif retenu par le tribunal administratif pour annuler le permis de construire délivré à la requérante, tiré de l'irrégularité de l'étude d'impact dont avait fait l'objet le projet de la SOCIETE NEO PLOUVIEN en raison de l'insuffisance de l'étude acoustique qu'elle comportait, n'est pas de nature à entacher la régularité en la forme dudit jugement, qui doit être regardé comme suffisamment motivé ;

Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance de l'association Les Abers :

Considérant que l'association Les Abers a adressé le 26 décembre 2004 un recours gracieux à l'encontre du permis de construire délivré le 29 octobre 2004 à la SOCIETE NEO PLOUVIEN et affiché en mairie le 3 novembre 2004 ; que le préfet du Finistère, destinataire de ce recours, l'a expressément rejeté par décision du 1er mars 2005 ; que la demande de l'association Les Abers n'était pas tardive, dès lors qu'elle avait été enregistrée au greffe du tribunal administratif le 29 avril 2005, antérieurement à l'expiration du délai de recours contentieux ; que, par suite, la fin de non recevoir opposée par le préfet du Finistère à la demande de première instance de l'association Les Abers ne saurait être accueillie ;

Sur la légalité de l'arrêté du préfet du Finistère du 29 octobre 2004 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 421-1-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : L'implantation d'une installation produisant de l'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent d'une hauteur supérieure ou égale à 12 mètres est subordonnée à l'obtention d'un permis de construire ; qu'aux termes de l'article R. 421-2 du même code : A. Le dossier joint à la demande de permis de construire comporte : (...) / 8° L'étude d'impact, lorsqu'elle est exigée (...) ; que l'article L. 553-2 du code de l'environnement dispose que : I. - L'implantation d'une ou plusieurs installations produisant de l'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent dont la puissance installée totale sur un même site de production, au sens du troisième alinéa (2°) de l'article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, excède 2,5 mégawatts, est subordonnée à la réalisation préalable : a) De l'étude d'impact définie à la section 1 du chapitre II du titre II du livre Ier du présent code ; b) D'une enquête publique soumise aux prescriptions du chapitre III du titre II du livre Ier du présent code ; qu'enfin, aux termes de l'article 2 du décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 pris pour l'application de l'article 2 de la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature : Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement. / L'étude d'impact présente successivement : / 1° Une analyse de l'état initial du site et de son environnement, portant notamment sur les richesses naturelles et les espaces naturels agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, affectés par les aménagements ou ouvrages ; / 2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet sur l'environnement, et en particulier sur la faune et la flore, les sites et paysages, le sol, l'eau, l'air, le climat, les milieux naturels et les équilibres biologiques, sur la protection des biens et du patrimoine culturel et, le cas échéant, sur la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses) ou sur l'hygiène, la santé, la sécurité et la salubrité publique. / (...) 4° Les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement et la santé ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes. / 5° Une analyse des méthodes utilisées pour évaluer les effets du projet sur l'environnement mentionnant les difficultés éventuelles de nature technique ou scientifique rencontrées pour établir cette évaluation. (...) ;

Considérant que si le bruit résiduel nocturne a fait l'objet d'une évaluation en un seul point, d'une durée de 24 heures, au lieu-dit Kérouzern à environ 480 mètres de l'éolienne la plus proche, et a fait l'objet d'une extrapolation pour chacun des autres points de mesure par un logiciel de traitement informatique, il ressort des pièces du dossier que cette mesure pouvait être regardée comme représentative pour l'ensemble des points d'évaluation et n'a pas entraîné de surestimation significative des bruits en émergence des éoliennes ; qu'il en va de même en ce qui concerne les bruits résiduels diurnes, pour lesquels l'étude acoustique de la SOCIETE NEO PLOUVIEN a consisté en une mesure durant 24 heures en un point fixe et des prélèvements de 45 minutes à chacun des six autres points sélectionnés ; que la méthode d'évaluation des bruits résiduels et des bruits en émergence utilisée dans ladite étude était conforme aux dispositions du code de la santé publique concernant les modalités d'évaluation des bruits de voisinage, lesquelles étaient alors applicables aux nuisances sonores susceptibles de résulter du fonctionnement des éoliennes ; qu'enfin, s'il est constant que l'étude acoustique de la requérante ne comporte pas d'indications sur les basses fréquences, il ne ressort pas des pièces du dossier, en l'état des connaissances scientifiques, que pourraient être imputées aux éoliennes des émissions de basse fréquence susceptibles de constituer une nuisance pour la santé humaine ; que dans ces conditions, les insuffisances relevées des mesures de bruit dont fait état l'étude acoustique diligentée par la société pétitionnaire ne sont pas de nature à entraîner l'irrégularité de l'étude d'impact produite à l'appui de sa demande de permis de construire ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a annulé pour ce motif l'arrêté du 29 octobre 2004 par lequel le préfet du Finistère lui a accordé un permis de construire huit éoliennes sur le territoire de la commune de Plouvien ;

Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme X et autres devant le Tribunal administratif de Rennes ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 146-1 du code de l'urbanisme : Les dispositions du présent chapitre déterminent les conditions d'utilisation des espaces terrestres, maritimes et lacustres : - dans les communes littorales définies à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral (...) ; qu'aux termes de l'article L. 321-2 du code de l'environnement, codifiant l'article 2 de la loi du 3 janvier 1986 : Sont considérées comme communes littorales, au sens du présent chapitre, les communes de métropole et des départements d'outre-mer : 1° Riveraines des mers et océans, des étangs salés, des plans d'eau intérieurs d'une superficie supérieure à 1 000 hectares 2° Riveraines des estuaires et des deltas lorsqu'elles sont situées en aval de la limite de salure des eaux et participent aux équilibres économiques et écologiques littoraux. La liste de ces communes est fixée par décret en Conseil d'Etat, après consultation des conseils municipaux intéressés. ; qu'aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 29 mars 2004 : Sont considérées comme communes littorales au sens de l'article L.321-2 du code de l'environnement les communes riveraines d'un estuaire ou d'un delta désignées ci-après : (...) - dans le département du Finistère : Saint-Martin-des-Champs, Pont-de-Buis-lès-Quimerch et Clohars-Fouesnant (...) ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que la commune de Plouvien, où sont implantées les éoliennes litigieuses, se situe à l'extrémité est de la vallée de l'Aber Benoît ; que la limite de salure des eaux, qui marque la limite amont de cet estuaire, a été fixée par le décret susvisé du 4 juillet 1853 à la ligne s'établissant entre Tariec et le Moulin du Chatel ; que si la loi ne définit pas la limite aval d'un estuaire, il y a lieu de se référer aux décrets qui fixent la limite transversale de la mer ; que, s'agissant de l'estuaire de l'Aber Benoît, la limite transversale de la mer a été fixée, après enquête publique, par le décret également susvisé du 21 mars 1930, en ce qui concerne son affluent nord, côté aval du pont du Moulin du Chatel, qui relie Plouvien à Lannilis, et en ce qui concerne son affluent sud, côté aval du pont de Tariec, situé sur le territoire de la commune de Plouvien ; que, dès lors, la limite de salure des eaux coïncide, en l'espèce, avec la limite transversale de la mer ; que la partie Nord Ouest de la commune de Plouvien se situant en deçà de ces limites, et en particulier en aval de la limite transversale de la mer, Plouvien n'est pas une commune riveraine d'un estuaire, mais doit être regardée comme une commune riveraine des mers et océans, pour l'intégralité de son territoire, au sens de l'article 2 de la loi du 3 janvier 1986 ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, applicable aux communes littorales : L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement ; que l'article L. 146-1 du même code dispose que les articles L. 146-1 à L. 146-9 de ce code sont applicables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, défrichements, plantations, installations et travaux divers, la création de lotissements et l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes, l'établissement de clôtures, pour l'ouverture de carrières, la recherche et l'exploitation de minerais. Elles sont également applicables aux installations classées pour la protection de l'environnement ; qu'il résulte de ces dispositions, qui ne comportent aucune dérogation, que le législateur a entendu interdire toute opération de construction isolée dans les communes littorales ; qu'il est constant que les huit éoliennes dont l'implantation a été autorisée par le permis de construire contesté, qui doivent être regardées comme une extension de l'urbanisation au sens du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, ne se situent pas en continuité d'une agglomération ou d'un village existant ; que, par suite, en accordant ledit permis de construire, le préfet du Finistère a méconnu les dispositions de cet article ;

Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen ne paraît de nature en l'état de l'instruction à entraîner l'annulation de l'arrêté attaqué ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE NEO PLOUVIEN n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 29 octobre 2004 par lequel le préfet du Finistère lui a accordé un permis de construire huit éoliennes sur le territoire de la commune de Plouvien ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. et Mme X et autres, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à la SOCIETE NEO PLOUVIEN de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche, au titre de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de la SOCIETE NEO PLOUVIEN le versement à M. Y, M. et Mme Z, M. et Mme A, M. et Mme X, pris ensemble, d'une somme globale de 2 000 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SOCIETE NEO PLOUVIEN est rejetée.

Article 2 : La SOCIETE NEO PLOUVIEN versera à M. Y, M. et Mme Z, M. et Mme A, M. et Mme X, pris ensemble, une somme globale de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE NEO PLOUVIEN, à M. Mickaël Y, M. et Mme Z, M. et Mme A, M. et Mme X et au ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.

Une copie en sera, en outre, adressée à l'association Les Abers, à M. et Mme B, à M. et Mme C, à M. et Mme D, à Mme Annie E, à Mme Bernadette F et à M. Jean-Louis G.

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N° 08NT01037

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 08NT01037
Date de la décision : 28/01/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-001-01-02-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Règles générales d'utilisation du sol. Règles générales de l'urbanisme. Prescriptions d'aménagement et d'urbanisme. Loi du 3 janvier 1986 sur le littoral.


Composition du Tribunal
Président : M. le Prés MINDU
Rapporteur ?: M. Laurent LAINE
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : BOUQUET-ELKAIM

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2011-01-28;08nt01037 ?
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