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14/10/2010 | FRANCE | N°09NT02552

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 14 octobre 2010, 09NT02552


Vu la requête, enregistrée le 6 novembre 2009, présentée pour M. Pierre Paddy X, demeurant ..., par Me Colliou, avocat au barreau de Brest ; M. X demande à la Cour :

1°) de réformer l'ordonnance n° 09-2083 en date du 19 octobre 2009 du juge des référés du Tribunal administratif de Rennes en tant que celui-ci a écarté la responsabilité de la communauté urbaine Brest Métropole Océane (BMO) et a limité à 2 500 euros la somme que la Compagnie des Eaux et de l'Ozone (CEO) a été condamnée à lui verser à titre de provision en réparation du préjudice subi par lui lors

de l'accident survenu le 26 avril 2005 ;

2°) de condamner solidairement la com...

Vu la requête, enregistrée le 6 novembre 2009, présentée pour M. Pierre Paddy X, demeurant ..., par Me Colliou, avocat au barreau de Brest ; M. X demande à la Cour :

1°) de réformer l'ordonnance n° 09-2083 en date du 19 octobre 2009 du juge des référés du Tribunal administratif de Rennes en tant que celui-ci a écarté la responsabilité de la communauté urbaine Brest Métropole Océane (BMO) et a limité à 2 500 euros la somme que la Compagnie des Eaux et de l'Ozone (CEO) a été condamnée à lui verser à titre de provision en réparation du préjudice subi par lui lors de l'accident survenu le 26 avril 2005 ;

2°) de condamner solidairement la communauté urbaine BMO et la CEO à lui verser, à titre de provision, la somme de 55 000 euros à valoir sur son entier préjudice ;

3°) de mettre à leur charge la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 septembre 2010 :

- le rapport de M. Coiffet, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Geffray, rapporteur public ;

- et les observations de Me Giren-Azzis, substituant Me Berthault, avocat de la Compagnie des Eaux et de l'Ozone ;

Considérant que M. X, commerçant non sédentaire, alors âgé de cinquante-six ans, a été victime d'un accident le 26 avril 2005, en sortant de son véhicule face au n° 9 de la rue Danton à Brest ; qu'alors qu'il déplaçait une poubelle à roulettes depuis la porte latérale de son fourgon, son pied gauche s'est enfoncé dans une bouche d'égout dont la plaque de fermeture était absente ; que M. X a dû subir au centre hospitalier universitaire de Brest une opération de la cheville gauche pour une fracture dont il garde des séquelles ; que sur la base de l'expertise diligentée, l'intéressé a demandé le 24 avril 2009 au juge des référés du Tribunal administratif de Rennes la condamnation solidaire de la communauté urbaine Brest Métropole Océan (BMO) et de la Compagnie des Eaux et de l'Ozone (CEO) à lui verser une provision de 55 000 euros à valoir sur son préjudice ; qu'il relève appel de l'ordonnance du 19 octobre 2009 par laquelle le président du Tribunal administratif de Rennes, juge des référés, a, après avoir écarté la responsabilité de la communauté urbaine BMO limité, compte tenu notamment du partage de responsabilité retenu entre la victime et la CEO, le montant de la provision qui lui a été accordée à la somme de 2 500 euros ;

Sur la demande de provision :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ; qu'aux termes de l'article R. 541-3 du même code : L'ordonnance rendue par le président du tribunal administratif ou par son délégué est susceptible d'appel devant la cour administrative d'appel ;

Considérant qu'en cas de délégation de service public limitée à la seule exploitation de l'ouvrage, comme c'est le cas en matière d'affermage, si la responsabilité à l'égard des tiers des dommages imputables à son fonctionnement relève du délégataire, sauf stipulations contractuelles contraires, celles résultant de dommages imputables à son existence, à sa nature et son dimensionnement, appartient à la personne publique délégante ;

Considérant, d'une part, que la communauté urbaine BMO a confié à la CEO l'affermage du service de distribution publique d'eau potable et d'assainissement ; qu'en vertu des articles 60 A et 61 A du contrat d'affermage, la CEO assure la surveillance, le bon fonctionnement et l'entretien des ouvrages et canalisations constituant le réseau d'assainissement, au nombre desquels figurent les regards de visite, avaloirs et bouches d'égout ; que l'absence de plaque de fermeture de la bouche d'égout à l'endroit de l'accident dont a été victime le requérant révèle un défaut d'entretien de l'ouvrage public de nature à engager la seule responsabilité de la compagnie fermière, sans que puisse être opposées à la communauté urbaine BMO les stipulations de l'article 14 A du contrat d'affermage relatives au contenu du service rendu aux abonnés ; que c'est, par suite, à bon droit que le juge des référés du Tribunal administratif de Rennes a estimé que la demande de provision, en tant qu'elle était dirigée contre la communauté urbaine BMO, faisait l'objet d'une contestation sérieuse ;

Considérant, d'autre part, que la circonstance que M. X a été blessé à la cheville gauche, du fait de la non fermeture de la bouche d'égout, alors que son pied droit était resté à l'intérieur de son fourgon, révèle l'imprudence du comportement de la victime qui a procédé au déplacement de la poubelle à roulettes masquant la bouche litigieuse sans être descendu de son véhicule ; que c'est, par suite, à juste titre que le juge des référés du Tribunal administratif de Rennes a estimé que cette faute de M. X était de nature à exonérer la compagnie fermière CEO de la moitié de sa responsabilité ; qu'au regard d'un tel partage, la part de responsabilité incombant à la CEO doit être regardée comme non sérieusement contestable ;

Sur le montant de la provision allouée à M. X :

Considérant que l'intéressé n'établit pas avoir subi des pertes de revenus du fait de son accident entre avril 2005 et octobre 2006 ; qu'à cet égard, la caisse du régime social des indépendants (RSI) de Bretagne, succédant à la caisse du RSI de Midi-Pyrénées, lui a en particulier versé, pendant ses périodes d'incapacité temporaires, des indemnités journalières ayant pour objet de compenser ses pertes de gains à hauteur de 9 132,67 euros ; qu'il n'est pas davantage établi que ses arrêts de travail postérieurs à la période d'incapacité temporaire totale, s'achevant le 8 octobre 2006, aient un lien direct et certain avec sa chute ; que si M. X soutient qu'eu égard à un bénéfice annuel de 8 000 euros réalisé en 2004 la perte de ses gains futurs, jusqu'à ce qu'il soit en mesure de faire valoir ses droits à la retraite, doit être évaluée à la somme de 40 000 euros, il ne résulte pas de l'instruction, et notamment pas des rapports de l'expert, que M. X aurait été dans l'incapacité de reprendre pleinement son activité professionnelle, ce qu'il a d'ailleurs fait à compter de février 2008, même si cette reprise s'est accompagnée d'une gène fonctionnelle douloureuse en cas de station debout prolongée ; qu'il suit de là que la créance dont se prévaut M. X au titre des préjudices patrimoniaux ne peut être regardée comme non sérieusement contestable, au sens des dispositions précitées ;

Considérant, en revanche, que M. X a subi, en lien direct et certain avec l'accident du 26 avril 2005, une double période d'incapacité temporaire totale du 26 avril 2005 au 20 janvier 2006, puis du 2 au 8 octobre 2006, entrecoupée d'une période d'incapacité temporaire partielle de janvier à septembre 2006 ; qu'au titre de ses troubles dans les conditions d'existence résultant de son déficit fonctionnel temporaire total puis partiel, pendant la même durée de neuf mois, M. X peut se voir allouer la somme de 4 050 euros ; que le déficit fonctionnel permanent de M. X, qui selon l'expert demeure atteint d'une incapacité permanente partielle de 5 %, peut être évalué à la somme de 4 350 euros ; qu'il sera fait, en outre, une juste appréciation des souffrances physiques qu'il a endurées, évaluées à 3,5 sur une échelle de 7, et de son préjudice esthétique, évalué à 1,5 sur la même échelle, en fixant ces chefs de préjudices respectivement à 3 500 et 1 100 euros ; qu'il n'est toutefois pas justifié d'un quelconque préjudice d'agrément ; qu'ainsi, la part non sérieusement contestable de la créance dont M. X peut se prévaloir à l'égard de la CEO, au titre des préjudices de nature non patrimoniale qu'il a subis, peut être fixée en l'état de l'instruction à la somme de 13 000 euros ; que compte tenu du partage de responsabilité retenu, il y a lieu de porter la somme de 2 500 euros que le premier juge a mise, à titre provisionnel, à la charge de la CEO à la somme de 6 500 euros, et de réformer, dans cette mesure, l'ordonnance attaquée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président du Tribunal administratif de Rennes a limité à 2 500 euros la provision mise à la charge de la CEO à valoir sur la réparation des préjudices qu'il a subis à raison de l'accident du 26 avril 2005 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y pas a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la CEO le versement à M. X d'une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 2 500 euros (deux mille cinq cents euros) que la CEO a été condamnée à verser à M. X à titre de provision à valoir sur la réparation de ses préjudices est portée à 6 500 euros (six mille cinq cents euros).

Article 2 : L'ordonnance n° 09-2083 du président du Tribunal administratif de Rennes du 19 octobre 2009 est réformée en ce qu'elle a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Pierre Paddy X, à la communauté urbaine BMO, à la CEO, à la caisse du RSI de Midi-Pyrénées et à la caisse du RSI de Bretagne.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 09NT02552
Date de la décision : 14/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: M. GEFFRAY
Avocat(s) : DANO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2010-10-14;09nt02552 ?
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