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30/09/2008 | FRANCE | N°08NT00188

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 30 septembre 2008, 08NT00188


Vu la requête enregistrée le 23 janvier 2008, présentée pour la COMMUNE DE BOULON, représentée par son maire en exercice, par Me Marc, avocat au barreau de Caen ; la COMMUNE DE BOULON demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 07-625 du 23 novembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Caen a annulé la délibération du 12 février 2007 du conseil municipal rejetant le recours gracieux formé par M. X contre la délibération du 26 juin 2006 par laquelle ledit conseil a décidé d'exercer le droit de préemption urbain sur la parcelle cadastrée ZH 147 ;

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) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de ...

Vu la requête enregistrée le 23 janvier 2008, présentée pour la COMMUNE DE BOULON, représentée par son maire en exercice, par Me Marc, avocat au barreau de Caen ; la COMMUNE DE BOULON demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 07-625 du 23 novembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Caen a annulé la délibération du 12 février 2007 du conseil municipal rejetant le recours gracieux formé par M. X contre la délibération du 26 juin 2006 par laquelle ledit conseil a décidé d'exercer le droit de préemption urbain sur la parcelle cadastrée ZH 147 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Caen ;

3°) de condamner M. X à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 septembre 2008 :

- le rapport de M. François, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Degommier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la COMMUNE DE BOULON (Calvados) interjette appel du jugement du 23 novembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Caen a annulé la délibération du 12 février 2007 du conseil municipal rejetant le recours gracieux formé par M. X contre la délibération du 26 juin 2006 par laquelle ledit conseil a décidé d'exercer le droit de préemption urbain sur la parcelle cadastrée ZH 147 ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant, d'une part, qu'en sa qualité de vendeur du bien préempté par la commune, et quand bien même cette dernière aurait accepté le prix de 30 500 euros mentionné dans la déclaration d'intention d'aliéner, M. X justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour former un recours contre la délibération du 12 février 2007 susmentionnée du conseil municipal de Boulon ; que, par suite, la fin de non-recevoir soulevée par cette commune, tirée du défaut d'intérêt à agir de M. X, doit être écartée ;

Considérant, d'autre part, que la lettre recommandée du 4 juillet 2006 notifiant au notaire de M. X la délibération du 26 juin 2006 portant exercice du droit de préemption, ne comportait pas la mention des voies et délais de recours, contrairement aux dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative ; que, par suite, le recours gracieux formé le 12 janvier 2007 par M. X, rejeté par la délibération du 12 février 2007, a régulièrement prorogé le délai de recours contentieux à l'encontre de la délibération du 26 juin 2006 ;

Sur la légalité de la délibération du 12 février 2007 du conseil municipal de Boulon :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : “Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1 (...) ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé. (...) Lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme local de l'habitat, ou, en l'absence de programme local de l'habitat, lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme de construction de logements locatifs sociaux, la décision de préemption peut (...) se référer aux dispositions de cette délibération” ; qu'aux termes de l'article L. 300-1 du même code : “Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre une politique locale de l'habitat” ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les collectivités titulaires du droit de préemption urbain peuvent légalement exercer ce droit, d'une part, si elles justifient, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date, et, d'autre part, si elles font apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par délibération du 26 juin 2006, le conseil municipal de Boulon a décidé d'exercer le droit de préemption de la commune sur l'immeuble cadastré ZH n° 147, pour lequel M. X avait consenti une promesse de vente à M. Beaudry, au prix de 30 500 euros mentionné dans la déclaration d'intention d'aliéner ; que si cette délibération est entachée d'illégalité, dès lors qu'elle ne fait état d'aucun motif pouvant justifier, en application des dispositions précitées, la préemption décidée, la délibération du 12 février 2007 contestée “décidant de ne pas faire droit à la demande de retrait de cette première délibération et de maintenir la préemption qu'elle prononce”, est motivée, d'une part, par l'application des dispositions de l'article L. 210-2 du code de l'urbanisme, qu'elle énonce, d'autre part, par le fait que la préemption s'inscrit dans le cadre du plan local d'urbanisme et du projet d'aménagement et de développement durable en cours d'élaboration, compte tenu d'une délibération prise par la commune “pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme de construction de logements locatifs sociaux”, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme ;

Considérant toutefois, d'une part, que les dispositions de l'article L. 210-2 du code de l'urbanisme en vertu desquelles, en cas de vente d'un immeuble à usage d'habitation, la commune peut faire usage de son droit de préemption pour assurer le maintien dans les lieux des locataires, sur lesquelles repose la délibération du 12 février 2007 contestée, ne sont pas applicables à la vente par M. X de la maison d'habitation qu'il occupe comme propriétaire ; que, d'autre part, ladite délibération du 12 février 2007 se borne à se référer à une précédente délibération du 12 octobre 2006 du conseil municipal, laquelle, relative au projet d'aménagement et de développement durable, ne mentionne aucune action, ni même aucun cadre d'action, que la commune entendrait mettre en oeuvre pour mener à bien un programme de construction de logements locatifs sociaux ; que, dans ces conditions, la COMMUNE DE BOULON n'établit pas la réalité d'un projet immobilier pouvant justifier l'exercice de droit de préemption ; qu'il suit de là que la décision contestée, ne satisfaisant pas aux exigences énoncées par les dispositions précitées des articles L. 210-1 et L. 300-1 du code de l'urbanisme, est entachée d'illégalité ;

Sur les conclusions incidentes de M X :

Considérant que dans sa requête présentée devant le Tribunal administratif de Caen, M. X n'a entendu contester la délibération susmentionnée du 12 février 2007 qu'en tant qu'elle rejette le recours gracieux formé à l'encontre de la délibération du 26 juin 2006 ; que si, dans son mémoire en défense du 5 mai 2008 devant la Cour, l'intimé demande qu'il lui soit donné acte de ce qu'il avait demandé la rétrocession de son bien, il n'appartient pas, en tout état de cause, au juge administratif de faire droit à de telles conclusions ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE BOULON n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a annulé la délibération contestée du 12 février 2007 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que ces dispositions font obstacle à ce que M. X, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la COMMUNE DE BOULON la somme que cette dernière demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de condamner la COMMUNE DE BOULON à verser à M. X une somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature qu'il a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE BOULON est rejetée.

Article 2 : Les conclusions incidentes de M. X tendant à ce qu'il lui soit donné acte de ce qu'il a demandé la rétrocession de son bien sont rejetées.

Article 3 : La COMMUNE DE BOULON versera à M. X une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE BOULON (Calvados) et à M. René X.

Une copie en sera, en outre, adressée au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

N° 08NT00188

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 08NT00188
Date de la décision : 30/09/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Eric FRANCOIS
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : MARC

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2008-09-30;08nt00188 ?
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