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31/10/2007 | FRANCE | N°06NT01569

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 31 octobre 2007, 06NT01569


Vu, sous le n° 06NT01569, la requête, enregistrée le 21 août 2006, présentée pour Mlle Audrey X, demeurant ..., par Me Laurent, avocat au barreau d'Angers ; Mlle Audrey X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 02-2305 du 18 mai 2006 du Tribunal administratif de Nantes en tant qu'il a rejeté comme irrecevable sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire (CHU) d'Angers à réparer les conséquences dommageables d'une biopsie qu'elle a subie dans cet établissement au mois de décembre 1993 ;

2°) d'ordonner une expertise médicale co

mplémentaire confiée au docteur Y pour que celui-ci se prononce sur les consé...

Vu, sous le n° 06NT01569, la requête, enregistrée le 21 août 2006, présentée pour Mlle Audrey X, demeurant ..., par Me Laurent, avocat au barreau d'Angers ; Mlle Audrey X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 02-2305 du 18 mai 2006 du Tribunal administratif de Nantes en tant qu'il a rejeté comme irrecevable sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire (CHU) d'Angers à réparer les conséquences dommageables d'une biopsie qu'elle a subie dans cet établissement au mois de décembre 1993 ;

2°) d'ordonner une expertise médicale complémentaire confiée au docteur Y pour que celui-ci se prononce sur les conséquences de l'échec de la seconde transplantation rénale qu'elle a subie ;

3°) de condamner le CHU d'Angers et la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) d'Angers à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu, II, sous le n° 06NT01574, la requête sommaire et le mémoire ampliatif, enregistrés, respectivement, les 21 août et 25 septembre 2006, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE (CHU) D'ANGERS, dont le siège est 4, rue Larrey à Angers Cedex (49033), par Me Le Prado, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; le CHU D'ANGERS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 02-2305 du 18 mai 2006 par lequel le Tribunal administratif de Nantes l'a condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) d'Angers une somme de 116 000 euros ;

2°) de rejeter les conclusions présentées par la CPAM d'Angers et de Mlle Audrey X devant le Tribunal administratif de Nantes ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 octobre 2007 :

- le rapport de Mme Chauvet, rapporteur ;

- les observations de Me Le Dall, avocat de la CPAM d'Angers ;

- et les conclusions de M. Millet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées nos 06NT01569 et 06NT01574 de Mlle X et du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE (CHU) D'ANGERS sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il ressort du dossier de première instance que Mlle X a demandé au Tribunal administratif de Nantes de surseoir à statuer sur sa demande tendant à la condamnation du CHU D'ANGERS à réparer les conséquences dommageables d'une biopsie rénale pratiquée en 1997 dans cet établissement, lors du dépôt de sa requête introductive d'instance, soit le 24 juillet 2002, dans l'attente des résultats d'une expertise qu'elle avait sollicitée auprès du juge des référés de cette juridiction, puis par un mémoire enregistré au greffe de celle-ci le 23 décembre 2003 dans l'attente des résultats d'une expertise complémentaire concernant les troubles oculaires survenus postérieurement ; que Mlle X n'a pas produit d'autres mémoires en première instance ; que le tribunal s'est prononcé sur la demande de l'intéressée après le dépôt des rapports des experts désignés à sa demande ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que les premiers juges ont statué sur sa demande sans faire droit à sa demande d'expertise complémentaire manque en fait ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance de Mlle X et des conclusions de première instance de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) d'Angers :

Considérant, en premier lieu, que si Mlle X a réservé le chiffrage de ses prétentions indemnitaires au vu des conclusions de l'expertise qu'elle a demandée au juge des référés d'ordonner, puis, au résultat du complément d'expertise qu'elle a demandée à ce même juge d'ordonner à la suite de l'apparition de troubles oculaires, il est constant que les rapports afférents à ces deux expertises ont été déposés, respectivement, les 4 mars 2003 et 23 mars 2005 au greffe du tribunal ; qu'elle était, à cette dernière date, en mesure d'apprécier de manière suffisamment précise la nature et l'étendue des préjudices dont elle demandait réparation au CHU D'ANGERS ; qu'au demeurant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, Mlle X n'a pas, à la suite du dépôt du dernier rapport d'expertise, sollicité un nouveau complément d'expertise ; qu'elle n'a pas non plus chiffré ses conclusions en dépit du courrier adressé aux parties sur le fondement des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative les informant de ce que le tribunal envisageait de soulever d'office le défaut de chiffrage des conclusions indemnitaires après le dépôt du complément d'expertise ; que, dans ces conditions, Mlle X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande comme irrecevable pour défaut de chiffrage des conclusions indemnitaires ;

Considérant, en second lieu, qu'en vertu des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, la CPAM exerce un droit propre lorsqu'elle saisit le juge d'une demande tendant à ce que l'auteur du dommage dont son assuré a été victime soit condamné à lui rembourser les prestations qu'elle a versées en rapport avec ce dommage ; qu'ainsi, la recevabilité des conclusions présentées par l'assuré est sans incidence sur le sort de l'action exercée par la caisse ; que, par ailleurs, les premiers juges, qui disposaient des éléments leur permettant de se prononcer sur la responsabilité et l'étendue des droits des parties, ont pu, sans commettre d'erreur de droit, contrairement à ce que soutient le CHU D'ANGERS, statuer sur les conclusions de la CPAM d'Angers ;

Sur la responsabilité :

Considérant que Mlle X, née en 1976, est atteinte d'une maladie rénale découverte alors qu'elle était âgée d'un peu plus de six ans ; qu'une insuffisance rénale apparue en 1993 l'a obligée, à compter du mois de décembre 1994, à subir des dialyses trois fois par semaine ; que, le 1er juin 1996, Mlle X a bénéficié d'une transplantation rénale ; qu'après une évolution de la fonction rénale satisfaisante dans les neuf premiers mois qui ont suivi la greffe, des signes de rejet de celle-ci sont apparus et ont justifié le recours à une première ponction biopsie rénale pratiquée au CHU D'ANGERS au mois d'avril 1997 montrant un rejet chronique associé à des lésions focales de rejet aigu ; qu'en raison d'une dégradation progressive de la fonction rénale, Mlle X a été hospitalisée dans cet établissement le 23 décembre 1997 pour une biopsie rénale au cours de laquelle est survenue une fistule entre l'artère et la veine du greffon ; que, compte tenu de la menace que représentait cette fistule à haut débit sur la fonction cardiaque, il a été procédé à l'ablation du greffon le 30 novembre 1998 et à la reprise de dialyses ; que la seconde transplantation rénale dont a pu bénéficier Mlle X au mois d'octobre 1999 a été marquée par un rejet chronique du greffon qui a justifié la reprise des dialyses ; qu'enfin, au cours du mois de mai 2002, Mlle X a présenté une thrombose de la veine centrale de la rétine de l'oeil gauche, compliquée de glaucome néovasculaire ayant nécessité l'énucléation de l'oeil puis la pose d'une prothèse au début de l'année 2003 ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du docteur Y et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté, que la biopsie rénale pratiquée au mois de décembre 1997 l'a été dans des conditions fautives compte tenu de l'utilisation d'une aiguille dite de Vim-Silverman d'un calibre inapproprié pour ce type d'investigation, de la mise en oeuvre de moyens de repérage insuffisants et de la poursuite de l'acte en dépit des difficultés rencontrées au cours de son accomplissement ; que les conditions dans lesquelles cette biopsie a été menée sont à l'origine de la fistule entre l'artère et la veine du greffon à haut débit susmentionnée ; qu'il résulte de la même expertise que l'existence de cette fistule mise en évidence au cours de l'année 1998 a rendu nécessaire l'ablation du greffon compte tenu des risques qu'il présentait pour la fonction cardiaque ; qu'en revanche, il ne résulte pas de l'instruction que le rejet du premier greffon, apparu avant même que la biopsie pratiquée au mois de décembre 1997, puisse être imputé à l'existence de cette fistule ; qu'il n'est pas davantage établi par l'instruction que le rejet du second greffon dont a pu bénéficier Mlle X puisse être imputé à cette fistule ; que, par ailleurs, il résulte de l'expertise confiée au docteur Bretagne, assistée d'un sapiteur cardiologue, que, l'ablation du premier greffon est à l'origine d'une hypertension artérielle chez Mlle X et que cette hypertension est à l'origine de la thrombose de la veine centrale de la rétine de l'oeil gauche, compliquée d'un glaucome qui a entraîné la cécité de l'oeil gauche de l'intéressée ; que, dans ces conditions, le CHU D'ANGERS n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges ont commis une erreur d'appréciation sur le lien de causalité existant entre les troubles oculaires de Mlle X et la survenance de la fistule ;

Sur le préjudice :

Considérant que ni le CHU D'ANGERS, ni la CPAM d'Angers ne contestent pas sérieusement l'évaluation faite par les premiers juges des débours exposés par ladite caisse au profit de Mlle X en rapport direct avec les conséquences dommageables de la fistule post-biopsie pratiquée en décembre 1997 ; que, par ailleurs, il n'appartient pas à la cour de donner acte à la CPAM d'Angers, d'une part, de ce qu'en cas d'insuffisance du préjudice global de la victime il y aurait lieu de prévoir le paiement sans limitation de durée, d'une rente fictive dont le capital représentatif correspondrait au reliquat disponible, d'autre part, de ce qu'elle sollicitera le remboursement des prestations en relation avec les soins dont s'agit, non encore connues qu'elle pourrait être amenée à exposer à l'avenir ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mlle X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande, le CHU D'ANGERS n'étant, pour sa part, pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le même jugement il a été condamné à verser à la CPAM d'Angers la somme de 116 000 euros ; que les conclusions de ladite caisse tendant à la majoration de cette somme ne peuvent, également, qu'être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que le CHU D'ANGERS comme la CPAM d'Angers, qui ne sont pas les parties perdantes à l'égard de Mlle X, soient condamnés à payer à cette dernière la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de Mlle X et du CHU D'ANGERS, ainsi que les conclusions de la CPAM d'Angers sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle Audrey X, au CHU D'ANGERS, à la CPAM d'Angers et au ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

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Nos 06NT01569…

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 06NT01569
Date de la décision : 31/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme THOLLIEZ
Rapporteur ?: Mme Claire CHAUVET
Rapporteur public ?: M. MILLET
Avocat(s) : LAURENT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2007-10-31;06nt01569 ?
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