Vu la requête enregistrée le 11 janvier 2006, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me Le Bonnois, avocat au barreau de Paris ; M. et Mme X demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 01-2539 du 26 octobre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à ce que le centre hospitalier universitaire (CHU) d'Angers soit condamné à verser à M. X, la somme de 293 484,30 euros et, à Mme X, la somme de 6 000 euros ;
2°) de condamner le CHU d'Angers à verser la somme de 306 064,30 euros à M. X et la somme de 6 000 euros à Mme X, en réparation du préjudice qu'ils estiment avoir subi à la suite de l'hospitalisation de M. X au CHU d'Angers ;
3°) de condamner ledit CHU à verser à M. X une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 février 2007 :
- le rapport de M. Degommier, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Artus, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. et Mme X interjettent appel du jugement du 26 octobre 2005, par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à ce que le centre hospitalier universitaire (CHU) d'Angers soit condamné à réparer les conséquences dommageables de l'accident survenu le 9 janvier 2000 à M. X au cours de son hospitalisation dans cet établissement ;
Sur la responsabilité :
Considérant que M. X a été hospitalisé, le 5 janvier 2000 au CHU d'Angers, à la suite de crises d'épilepsie survenues dans un contexte d'alcoolisation chronique ; que, dans la nuit du 8 au 9 janvier 2000, à 2 heures 35, il s'est défenestré, tombant du troisième étage sur une pelouse gorgée d'eau ; que cette chute lui a occasionné de multiples fractures ; qu'il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport de l'expert désigné par ordonnance du 30 août 2001 du juge des référés du Tribunal administratif de Nantes, que dès son admission dans le service de médecine E, spécialisé dans le traitement des maladies alcooliques du CHU d'Angers, M. X a reçu un traitement pour lutter contre la récidive éventuelle de crises d'épilepsie, ainsi qu'un traitement préventif du delirium tremens ; que, dans la journée du 8 janvier 2000, devant la dégradation de son état, M. X, qui se trouvait dans un état d'agitation et de confusion caractéristique d'un état de pré-delirium tremens, a subi un scanner cérébral, à la suite duquel son traitement sédatif a été renforcé et lui a été administré par voie intraveineuse ; que, toutefois, il est constant qu'à 2 heures 30 du matin, l'infirmière de garde, alertée par le voisin de chambre de M. X, a constaté que celui-ci, ayant arraché sa perfusion, était debout et hagard dans sa chambre ; que pendant qu'elle préparait une nouvelle perfusion, l'infirmière a invité M. X à aller aux toilettes situées en-dehors de la chambre ; que, sorti de sa chambre il a cru voir une ombre menaçante et est parti en courant vers une fenêtre du couloir du troisième étage au travers de laquelle il s'est jeté ; que compte-tenu de l'état d'agitation que présentait à ce moment M. X, la circonstance qu'il ait pu sortir de sa chambre, sans être accompagné et sans surveillance, constitue une faute de nature à engager la responsabilité de cet établissement envers les époux X ;
Sur le préjudice de M. X :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les frais médicaux, pharmaceutiques et d'hospitalisation s'élèvent à 29 676,93 euros ; qu'il résulte du rapport d'expertise que la chute faite par M. X lui a occasionné une incapacité temporaire qui a duré du 9 janvier 2000 au 8 mai 2001, entraînant pour lui une perte de revenus de 11 232,87 euros ; que M. X, qui se trouvait, avant son accident, en arrêt de travail, depuis le 7 septembre 1999, à la suite de problèmes de santé consécutifs à son alcoolisme, n'établit pas que son licenciement, survenu le 29 novembre 2002, est en lien direct sur l'accident survenu le 9 janvier 2000 au CHU d'Angers ; que, par suite, il ne peut obtenir réparation de la perte de revenus résultant de ce licenciement ; que M. X est resté atteint d'une incapacité permanente partielle de 16 % dont il sera fait une juste appréciation en évaluant à 22 000 euros, dont 10 000 euros au titre des troubles non physiologiques, les troubles de toute nature subis dans ses conditions d'existence ; que les souffrances physiques endurées par M. X, qualifiées d'importantes par l'expert et son préjudice esthétique, qualifié de très léger, peuvent être respectivement évalués à 10 000 euros et 500 euros ; qu'ainsi, le préjudice total subi par M. X s'élève à 73 309,20 euros, dont 40 809,20 euros constitue, en vertu de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, la part soumise au recours des organismes de sécurité sociale ;
Sur les droits de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Nantes :
Considérant que la CPAM de Nantes justifie de dépenses s'élevant à 29 676,33 euros au titre des frais médicaux, pharmaceutiques et d'hospitalisation et à 11 232,87 euros au titre des indemnités journalières soit une créance totale de 40 809,20 euros ; qu'elle a droit, en application de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, au remboursement de cette somme, laquelle sera assortie des intérêts légaux à compter du 26 février 2003, date d'enregistrement de sa demande devant le tribunal administratif ;
Considérant que la CPAM de Nantes a également droit à ce que le CHU d'Angers, responsable des blessures occasionnées à M. X, lui verse l'indemnité forfaitaire de 926 euros prévue en application des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;
Sur les droits de M. X :
Considérant, qu'ainsi qu'il vient d'être dit, la réparation du préjudice total dont M. X a été victime s'élève à 73 309,20 euros ; que, compte-tenu de la somme de 40 809,20 euros revenant à la CPAM de Nantes en remboursement de ses débours, M. X a droit à la somme de 32 500 euros ;
Sur le préjudice moral de Mme X :
Considérant qu'il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 1 000 euros ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à ce que le CHU d'Angers soit condamné à réparer les conséquences dommageables de l'accident survenu le 9 janvier 2000 à M. X au cours de son hospitalisation dans cet établissement ;
Sur les frais d'expertise exposés en première instance :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de mettre ces frais liquidés et taxés à la somme de 1 791,09 euros par ordonnances du 28 novembre 2001 et du 21 août 2002 du président du Tribunal administratif de Nantes, à la charge du CHU d'Angers ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner le CHU d'Angers à verser une somme de 1 500 euros à M. et Mme X, ainsi que la somme de 800 euros que demande la CPAM de Nantes, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 26 octobre 2005 du Tribunal administratif de Nantes est annulé.
Article 2 : Le CHU d'Angers est condamné à verser aux époux X une indemnité de 33 500 euros (trente-trois mille cinq cents euros).
Article 3 : Le CHU d'Angers est condamné à verser à la CPAM de Nantes une somme de 40 809,20 euros (quarante mille huit cent neuf euros vingt centimes). Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 26 février 2003.
Article 4 : Le CHU d'Angers versera à la CPAM de Nantes une somme de 926 euros (neuf cent vingt-six euros) en application des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.
Article 5 : Les frais de l'expertise liquidés à la somme de 1 791,09 euros par ordonnances de taxation du 28 novembre 2001 et du 21 août 2002 du président du Tribunal administratif de Nantes, sont mis à la charge du CHU d'Angers.
Article 6 : Le CHU d'Angers versera une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) à M. et Mme X et une somme de 800 euros (huit cents euros) à la CPAM de Nantes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 7 : Le surplus des conclusions de la requête des époux X est rejeté.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme X, au centre hospitalier universitaire d'Angers et à la caisse primaire d'assurance maladie de Nantes.
Une copie en sera, en outre, adressée au ministre de la santé et des solidarités.
N° 06NT00046
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