La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/11/2005 | FRANCE | N°04NT01203

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3eme chambre, 10 novembre 2005, 04NT01203


Vu la requête, enregistrée le 28 septembre 2004, présentée pour La Poste, dont le siège est 7 rue du Clos Beaumois, BP 26500 à Caen Cedex 4 (14067), par Me Bellanger ; La Poste demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 03-3193 du 3 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a annulé la décision en date du 21 juillet 2003 de son directeur des ressources humaines et des relations sociales, agissant par délégation du président du conseil d'administration, portant révocation de M. Claude X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le

Tribunal administratif de Nantes ;

3°) de condamner M. X à lui verser une s...

Vu la requête, enregistrée le 28 septembre 2004, présentée pour La Poste, dont le siège est 7 rue du Clos Beaumois, BP 26500 à Caen Cedex 4 (14067), par Me Bellanger ; La Poste demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 03-3193 du 3 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a annulé la décision en date du 21 juillet 2003 de son directeur des ressources humaines et des relations sociales, agissant par délégation du président du conseil d'administration, portant révocation de M. Claude X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Nantes ;

3°) de condamner M. X à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 octobre 2005 :

- le rapport de M. Geffray, rapporteur ;

- les observations de Me Hirsch, substituant Me Bellanger, avocat de La Poste ;

- les conclusions de M. Millet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X, agent professionnel qualifié de 1er niveau au centre de tri à Angers, s'est rendu coupable en 2002 de détournement de colis postaux, de vol de chéquiers et d'utilisation frauduleuse de chèques ; qu'il n'a pas contesté les faits qui lui étaient reprochés ; que par décision en date du 21 juillet 2003, le directeur des ressources humaines de La Poste, agissant par délégation du président du conseil d'administration, a prononcé la révocation de M. X ; que, par un jugement du 3 juin 2004, le Tribunal administratif de Nantes a annulé cette révocation ; que La Poste fait appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'aux termes de l'article L.521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision… ;

Considérant qu'eu égard à la nature de l'office du juge des référés, la seule circonstance qu'un magistrat a statué sur une demande tendant à la suspension de l'exécution d'une décision administrative n'est pas, par elle-même, de nature à faire obstacle à ce qu'il se prononce ultérieurement sur la requête en qualité de juge du principal ; qu'il en va, toutefois, différemment dans le cas où il apparaît qu'allant au delà de ce qu'implique nécessairement cet office, le juge des référés a préjugé l'issue du litige ;

Considérant que la formation de jugement du Tribunal administratif de Nantes qui a annulé la décision susmentionnée du directeur des ressources humaines de La Poste, prononçant la révocation de M. X, était présidée par le magistrat qui avait, en sa qualité de juge des référés, prescrit la suspension de l'exécution de cette décision par une ordonnance du 16 octobre 2003 ; que la formation collégiale, se fondant, pour prononcer cette annulation, sur le moyen dont le juge des référés avait estimé qu'il était propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée, a reproduit, de manière littérale, les motifs particulièrement détaillés de l'ordonnance du 16 octobre 2003 ; que, dès lors, eu égard aux termes dans lesquels cette ordonnance et le jugement attaqué ont été rédigés, le magistrat en cause doit être regardé comme ayant méconnu le principe d'impartialité ; que, par suite, le jugement du 3 juin 2004, qui a été rendu par une formation irrégulièrement composée, doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Nantes ;

Considérant que la décision attaquée comporte les motifs de fait et de droit qui la fondent alors même qu'elle ne précise ni les dates de la commission des faits, ni leur qualification juridique, ni la justification de la procédure disciplinaire engagée à son encontre ; qu'elle satisfait aux exigences de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, susvisée ;

Considérant que M. X reproche à l'autorité ayant pouvoir disciplinaire d'avoir repris les motifs figurant dans la lettre de convocation devant le conseil de discipline ; que, toutefois, en l'absence d'avis dudit conseil, l'autorité disciplinaire pouvait se borner à se fonder sur ces mêmes motifs ;

Considérant que le moyen tiré de ce que l'autorité ayant le pouvoir disciplinaire doit informer le conseil de discipline des motifs qui l'ont conduite à prononcer celle-ci, en application des dispositions du dernier alinéa de l'article 8 du décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat est inopérant, dès lors que cette formalité est postérieure à la date de la sanction disciplinaire ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X a été l'auteur de détournements de colis postaux, de vols de chéquiers et d'utilisation frauduleuse de chèques ; que les faits reprochés à M. X justifiaient légalement une sanction disciplinaire, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les difficultés psychologiques, même si elles ont été décelées par un expert psychiatre désigné par le Tribunal correctionnel d'Angers, étaient de nature à le priver de tout discernement et à le faire regarder comme irresponsable ; qu'eu égard à la nature des missions de La Poste et aux obligations incombant à ses agents en ce qui concerne l'inviolabilité des correspondances, La Poste, en prononçant la révocation de M. X, n'a pas entaché son appréciation d'erreur manifeste ;

Considérant qu'alors même que M. X se prévaut de nombreux arrêts de travail, de l'existence de traitements médicaux depuis 1998, des effets de son divorce, de son hospitalisation dans un établissement psychiatrique, de sa mise sous curatelle, de son comportement incohérent confirmé par une assistante de La Poste et d'une tentative de suicide, le détournement de procédure allégué n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision en date du 21 juillet 2003 prononçant sa révocation ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner M. X à payer à La Poste une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que La Poste, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à payer à M. X la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nantes du 3 juin 2004 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Nantes et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : M. X versera à La Poste une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à La Poste, à M. Claude X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

1

N° 04NT01203

2

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 04NT01203
Date de la décision : 10/11/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SALUDEN
Rapporteur ?: M. Jean-Eric GEFFRAY
Rapporteur public ?: M. MILLET
Avocat(s) : BELLANGER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2005-11-10;04nt01203 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award