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14/05/2004 | FRANCE | N°99NT01444

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4eme chambre, 14 mai 2004, 99NT01444


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour le 12 juillet 1999 et le 21 février 2000, présentés pour la ville de Caen, représentée par son maire en exercice dûment habilité, par la S.C.P. SUR-MAUVENU, avocats au barreau de Paris ;

La ville de Caen demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 94-1067 du 18 mai 1999 du Tribunal administratif de Caen en tant qu'il l'a condamnée à verser à la société caennaise de stationnement une indemnité de 2 155 000 F en réparation du manque à gagner qu'elle aurait subi à la suite de l

a résiliation anticipée de la convention par la ville et en tant qu'il n'a pas inc...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour le 12 juillet 1999 et le 21 février 2000, présentés pour la ville de Caen, représentée par son maire en exercice dûment habilité, par la S.C.P. SUR-MAUVENU, avocats au barreau de Paris ;

La ville de Caen demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 94-1067 du 18 mai 1999 du Tribunal administratif de Caen en tant qu'il l'a condamnée à verser à la société caennaise de stationnement une indemnité de 2 155 000 F en réparation du manque à gagner qu'elle aurait subi à la suite de la résiliation anticipée de la convention par la ville et en tant qu'il n'a pas inclus dans les frais de réparation que lui doit la société caennaise de stationnement des sommes de 20 690 F et 340 000 F correspondant à une installation de vidéo-surveillance et à des dépenses prévisibles ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société caennaise de stationnement devant le Tribunal administratif de Caen ;

3°) de condamner la société caennaise de stationnement à lui verser une somme de 15 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

...............................................................................................................

C+ CNIJ n° 39-04-05-02-02

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 avril 2004 :

- le rapport de Mme STEFANSKI, premier conseiller,

- les observations de Me BURGNIER substituant Me DUVAL, avocat de la ville de Caen,

- les observations de Me AZENCOT, avocat de la société caennaise de stationnement,

- et les conclusions de M. MORNET, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par convention du 28 décembre 1973, la ville de Caen a concédé pour trente ans à la société caennaise de stationnement la construction et l'exploitation d'un parc de stationnement souterrain, ainsi que l'exploitation de places de stationnement de surface pour une période de cinq ans renouvelable ; que cette convention a été résiliée à compter du 1er janvier 1993 par une délibération du conseil municipal en date du 16 novembre 1992 ; que par jugement avant dire droit du 14 février 1996, le Tribunal administratif de Caen a ordonné deux expertises afin d'évaluer les frais de remise en état des biens de retour et le manque à gagner de la société caennaise de stationnement ; que la ville de Caen interjette appel du jugement du Tribunal administratif de Caen du 18 mai 1999 en tant qu'il n'a pas inclus dans les frais de remise en état dus par la société caennaise de stationnement, des sommes de 20 690 F et 340 000 F relatives respectivement à une installation de vidéo-surveillance et à des dépenses qui pourraient se révéler nécessaires à la suite d'études et en tant qu'il l'a condamnée à verser à la société caennaise de stationnement une indemnité de 2 155 000 F au titre du manque à gagner sur l'exploitation des places de stationnement de surface ; que par la voie de l'appel incident, la société caennaise de stationnement demande la condamnation de la ville de Caen à lui verser une somme de 3 800 000 F au titre du manque à gagner relatif au parc de stationnement souterrain, à ce que la somme qu'elle a été condamnée à verser à la ville de Caen au titre des frais de remise en état des biens de retour soit réduite d'un montant 166 620 F correspondant à des travaux de peinture et d'un montant de 36 948 F relatif à des études en matière de ventilation et, enfin, à ce que les condamnations prononcées et à prononcer contre la ville de Caen portent intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 1993 et non du 15 juillet 1994 ;

Sur les frais de remise en état des biens de retour :

Considérant qu'aux termes de l'article 14 relatif au parc de stationnement souterrain de la convention conclue entre la ville de Caen et la société caennaise de stationnement : ...Les sociétés concessionnaires sont tenues en outre de supporter toutes les dépenses prévues ou imprévues nécessitées... par l'exploitation de chaque ouvrage concédé, notamment de... l'entretien du matériel et des installations et remplacement en cas de destruction ou de mauvais fonctionnement... ;

Considérant qu'il résulte de la facture du 12 juillet 1993 établie par une société chargée d'installer de nouvelles installations de vidéo-surveillance après que l'exploitation du parc de stationnement souterrain ait été confiée à un nouvel exploitant, que la somme de 20 696 F dont la ville demande le remboursement représente l'achat et l'installation d'une nouvelle caméra et d'un nouveau moniteur ; qu'ainsi, la ville de Caen n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif n'a pas regardé cette somme comme représentant le coût de réparation de matériels installés alors que la société caennaise de stationnement était encore concessionnaire ; qu'il résulte notamment du rapport de l'expert nommé par le Tribunal administratif de Caen que la somme de 340 000 F dont la ville demande également l'inclusion dans les frais de remise en état, correspond à des frais qui pourraient être exposés si des études approfondies portant sur plusieurs installations apparemment en état à la date de la résiliation, révélaient des défectuosités ; qu'ainsi, la ville n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif n'a pas inclus ces dépenses éventuelles dans les frais de remise en état des installations concédées ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient la société caennaise de stationnement, le procès-verbal établi contradictoirement avec la ville lors de la résiliation de la convention de 1973 et annexé au protocole de remise des clefs et de restitution des locaux et installations du parking, ne concluait pas au bon état d'entretien des biens laissés à la ville, mais prévoyait au contraire que des expertises permettraient d'apprécier l'état d'entretien de ces biens, la nature et le coût des réparations nécessaires ; qu'ainsi, la société n'est pas fondée à soutenir que ce protocole et son annexe manifestaient un accord des parties sur l'état des biens de retour et étaient de nature à interdire toute action contentieuse de la ville contre son concessionnaire relativement à ces biens ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les expertises ordonnées par le Tribunal administratif, alors même qu'elles ont eu lieu après qu'un nouveau concessionnaire ait repris l'exploitation du parc de stationnement, n'ont pas porté pour ce motif sur l'état des biens tels qu'ils se présentaient à la date de la résiliation ; qu'il résulte du rapport d'expertise que la somme de 36 948 F contestée par la société caennaise de stationnement correspond à des études nécessaires pour déterminer si les installations de ventilation nécessitent des réparations et se rattachent, en conséquence, aux frais de remise en état des biens de retour ; que si la société caennaise de stationnement fait valoir qu'elle n'était pas tenue de peindre l'ensemble des plafonds du parc de stationnement et que la somme de 166 620 F correspondant à la réfection de leurs peintures ne doit pas être mise à sa charge, ses allégations ne sont pas confirmées par les pièces du dossier ; qu'ainsi, la société caennaise de stationnement n'est pas fondée à demander, par la voie de l'appel incident, que les sommes susmentionnées soient déduites des montants qu'elle doit à la ville au titre des frais de remise en état des biens de retour ;

Sur le manque à gagner :

Considérant que, contrairement à ce que soutient la ville de

Caen, il n'y a en tout état de cause pas de contradiction entre le jugement avant dire droit du Tribunal administratif de Caen qui a considéré que la convention conclue en 1973 avec la société caennaise de stationnement comportait deux concessions, et le jugement attaqué qui a analysé de façon distincte les manques à gagner résultant éventuellement de chacune de ces concessions ;

Considérant qu'il ne résulte d'aucune des stipulations de ces deux concessions que la commune intention des parties ait été de prévoir que ces deux concessions constituaient deux éléments d'une même opération formant un ensemble indivisible dont le résultat financier devrait être apprécié globalement ; que, dans ces conditions, la circonstance que la concession de places de stationnement de surface ait été accordée à la société caennaise de stationnement afin de compenser les déficits apparaissant nécessairement au début de l'exploitation du parc de stationnement dont elle devait assurer la construction, ne suffit pas à établir que le Tribunal administratif a commis une erreur de droit en calculant séparément les manques à gagner pouvant résulter de la résiliation anticipée de chacune de ces concessions ; qu'en conséquence, la ville de Caen n'est pas fondée à soutenir que le manque à gagner de 2 111 466 F résultant de la résiliation de la concession de places de stationnement de surface devait seulement venir en déduction des déficits qui seraient apparus au bout de trente ans dans le cadre de la concession du parc de stationnement et que le Tribunal administratif ne pouvait la condamner à verser à la société caennaise de stationnement une indemnité correspondant à ce manque à gagner ;

Considérant qu'il résulte de l'article 24 de la convention que les biens de retour du parc de stationnement souterrain seraient revenus gratuitement à la ville en fin de concession ; qu'ainsi, c'est à juste titre que, conformément aux conclusions de l'expert désigné par lui, le Tribunal administratif a déduit du manque à gagner subi par la société caennaise de stationnement du fait de la résiliation de sa concession la somme de 8 700 000 F, correspondant à l'évaluation retenue par son jugement du 14 février 1996, de la valeur non encore amortie des investissements remis à la ville dès la résiliation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la ville de Caen par la voie de l'appel principal et la société caennaise de stationnement par la voie de l'appel incident ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a condamné la ville à verser des sommes de 2 111 466 F et de 2 155 000 F à la société caennaise de stationnement en réparation des préjudices subis par elle à la suite de la résiliation de la convention qui la liait à la ville ;

Sur les intérêts :

Considérant que si la société caennaise de stationnement demande que les sommes que la ville a été condamnée à lui verser soient assorties des intérêts à compter du 1er janvier 1993 et non du 15 juillet 1994, date d'introduction de la demande de première instance, il ne résulte pas de l'instruction que la société ait présenté au 1er janvier 1993 une demande au sens de l'article 1153 du code civil ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la société caennaise de stationnement, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à payer à la ville de Caen la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de faire application des mêmes dispositions et de condamner la ville de Caen à payer à la société caennaise de stationnement une somme au titre des mêmes frais ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la ville de Caen et les conclusions d'appel incident de la société caennaise de stationnement sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la ville de Caen, à la société caennaise de stationnement et au ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4eme chambre
Numéro d'arrêt : 99NT01444
Date de la décision : 14/05/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEPLAT
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. MORNET
Avocat(s) : DUVAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2004-05-14;99nt01444 ?
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