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29/04/2004 | FRANCE | N°01NT01705

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3eme chambre, 29 avril 2004, 01NT01705


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement au greffe de la Cour les 29 août 2001 et 16 novembre 2001, présentés pour la commune de Ranville, représentée par son maire en exercice à ce dûment habilité par délibération en date du 20 septembre 2001, par Me THOUROUDE, avocat au barreau de Caen ;

La commune de Ranville demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 00-1255 du 11 juillet 2001 par lequel le Tribunal administratif de Caen l'a condamnée à verser à M. et Mme X une indemnité de 164 473,32 F en réparation du pr

judice qu'ils ont subi à la suite du débordement d'un bassin de rétention d'eau ;...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement au greffe de la Cour les 29 août 2001 et 16 novembre 2001, présentés pour la commune de Ranville, représentée par son maire en exercice à ce dûment habilité par délibération en date du 20 septembre 2001, par Me THOUROUDE, avocat au barreau de Caen ;

La commune de Ranville demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 00-1255 du 11 juillet 2001 par lequel le Tribunal administratif de Caen l'a condamnée à verser à M. et Mme X une indemnité de 164 473,32 F en réparation du préjudice qu'ils ont subi à la suite du débordement d'un bassin de rétention d'eau ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme X présentée devant le Tribunal administratif de Caen ;

3°) de condamner M. et Mme X à lui verser une somme de 6 500 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

C+ CNIJ n° 18-04-02-05

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mars 2004 :

- le rapport de M. GUALENI, premier conseiller,

- et les conclusions de M. MILLET, commissaire du gouvernement ;

Sur la prescription quadriennale :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 31 décembre 1968 : Sont prescrites au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis... ; qu'aux termes de l'article 2 de la même loi : La prescription est interrompue par : ...Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance ;... ; que, selon l'article 3 de la même loi : La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement ;

Considérant, en premier lieu, que la créance dont se prévalent M. et Mme X trouve son origine dans les dommages causés aux dépendances de leur habitation, à l'occasion d'un violent orage survenu le 16 septembre 1995, par l'arrivée d'une importante quantité d'eau chargée de terre après la rupture des remblais entourant un bassin destiné à recueillir les eaux de ruissellement de terrains situés en amont de leur propriété ; que l'existence et l'étendue de ce préjudice, qui ne présente pas un caractère continu, étaient connues dès la survenance des désordres ; qu'ainsi, en application des dispositions précitées de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968, le cours de la prescription a commencé à courir le 1er janvier 1996 et non, comme le soutiennent M. et Mme X, à compter de l'exercice suivant celui au cours duquel le jugement attaqué a retenu le principe de la responsabilité de la commune dans la survenance de ces désordres ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'action engagée par M. et Mme X devant le Tribunal de grande instance de Caen au mois de novembre 1997 et uniquement dirigée contre le propriétaire des terrains situés en amont et l'exploitant de ces terrains, qui ne mettait pas en cause une collectivité publique, n'a pu, par suite, interrompre le cours du délai de prescription ; que ni l'appel en garantie formé devant le Tribunal de grande instance de Caen par le propriétaire du terrain dirigé à l'encontre de la commune, ni la saisine du juge des référés administratifs par ce même propriétaire et tendant à ce que l'expertise ordonnée par le président du Tribunal de grande instance de Caen soit étendue à la commune, n'ont pu, en application des dispositions précitées de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1968, comme le soutient ladite commune et contrairement à ce que le Tribunal administratif de Caen a jugé, interrompre le délai de la prescription à l'égard de M. et Mme X, dès lors que le fait générateur de la créance dont se prévalent ces derniers est distinct de celui dont le propriétaire du terrain se prévaut ;

Considérant, enfin, qu'il résulte de l'instruction, et notamment d'un document produit par les requérants eux-mêmes, qu'à la suite de l'orage du 16 septembre 1995, les dommages causés à leur propriété ont été constatés par le maire et le deuxième adjoint de la commune, ainsi que par un représentant du groupement exploitant le terrain sur lequel le bassin qui s'est rompu a été réalisé ; que, dans ces conditions, et alors même que la commune n'établit pas que M. X, alors premier adjoint au maire de cette commune, ait participé d'une quelconque manière au projet ou à la réalisation dudit bassin, M. et Mme X ne pouvaient ignorer, dès la survenance des dommages, le rôle joué par la commune dans la construction de ce bassin et, par la même, dans la survenance des désordres ; qu'ainsi, M. et Mme X ne peuvent être légitimement regardés comme ignorant l'existence de leur créance ; qu'ils ne sont pas fondés, dès lors, à soutenir qu'en application des dispositions précitées de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968 le cours de la prescription a été suspendu jusqu'au 4 novembre 1998, date de dépôt du rapport de l'expertise ordonnée par le juge des référés du Tribunal administratif de Caen mettant en évidence le rôle de la commune dans la réalisation du bassin réalisé à la demande de celle-ci et avec sa participation, en vue de remédier aux conséquences dommageables du ruissellement d'importantes quantités d'eau vers le quartier dit du Bas-Ranville, se produisant de façon récurrente ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, le 13 juillet 2000, date à laquelle M. et Mme X ont saisi le Tribunal administratif de Caen, la créance dont ils se prévalent à l'encontre de la commune de Ranville était prescrite ; que, dans ces conditions, la commune de Ranville est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a écarté l'exception de prescription régulièrement opposée à la demande de M. et Mme X et l'a condamnée à verser à ces derniers une somme de 164 473,32 F en réparation des conséquences dommageables de l'inondation dont ils ont été victimes ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Ranville, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à payer à M. et Mme X la somme que ceux-ci réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, en application de ces dispositions, de condamner M. et Mme X à payer à ladite commune la somme de 990,92 euros qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Caen du 11 juillet 2001 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. et Mme X devant le Tribunal administratif de Caen et les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : M. et Mme X verseront à la commune de Ranville une somme de 990,92 euros (neuf cent quatre-vingt-dix euros et quatre-vingt-douze centimes) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Ranville, à M. et Mme X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 01NT01705
Date de la décision : 29/04/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. SALUDEN
Rapporteur ?: M. Christian GUALENI
Rapporteur public ?: M. MILLET
Avocat(s) : THOUROUDE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2004-04-29;01nt01705 ?
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