La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/03/2004 | FRANCE | N°03NT00006

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4eme chambre, 26 mars 2004, 03NT00006


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 3 janvier 2003, présentée pour Mme Christiane X, demeurant ..., par Me MEILLET, avocat au barreau de Paris ;

Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 99-1276 du 17 octobre 2002 du Tribunal administratif de Nantes qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 3 avril 1986 du président du conseil général de la Mayenne la maintenant en position de disponibilité, à la condamnation du département de la Mayenne à lui payer la somme de 423 961,81 F en réparation des préjudices subis

du fait des conséquences de cette décision, à la condamnation du département d...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 3 janvier 2003, présentée pour Mme Christiane X, demeurant ..., par Me MEILLET, avocat au barreau de Paris ;

Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 99-1276 du 17 octobre 2002 du Tribunal administratif de Nantes qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 3 avril 1986 du président du conseil général de la Mayenne la maintenant en position de disponibilité, à la condamnation du département de la Mayenne à lui payer la somme de 423 961,81 F en réparation des préjudices subis du fait des conséquences de cette décision, à la condamnation du département d'Ille-et-Vilaine à lui payer la somme de 110 060,65 F en réparation du retard de carrière qu'elle subit depuis sa mutation auprès de cette collectivité ;

2°) de faire droit auxdites demandes et de majorer les condamnations des intérêts échus ;

3°) de condamner solidairement le département d'Ille-et-Vilaine et le département de la Mayenne à lui payer la somme de 3 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

...............................................................................................................

C

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, modifiée, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968, relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

Vu le décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 relatif aux positions de détachement, hors cadre, de disponibilité et de congé parental des fonctionnaires territoriaux ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 février 2004 :

- le rapport de M. FAESSEL, premier conseiller,

- les observations de Me BOULIOU, avocat du département de la Mayenne,

- les observations de Mme X,

- et les conclusions de M. MORNET, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, agent administratif du département de la Mayenne, a, à sa demande, pour suivre son époux qui avait été affecté en Côte d'Ivoire, été placée en position de disponibilité pour deux années à compter du 23 janvier 1979, par un arrêté du président du conseil général de la Mayenne ; que cette période de disponibilité a ultérieurement été renouvelée sans interruption ; que Mme X a demandé à réintégrer son emploi au terme, fixé au 31 mars 1986, de la dernière de ces périodes ; que par arrêté du 3 avril 1986, dont il était demandé annulation au Tribunal administratif de Nantes, le président du conseil général de la Mayenne l'a maintenue en position de disponibilité ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du président du conseil général de la Mayenne :

Considérant qu'aux termes de l'article 67 de la loi du 26 janvier 1984, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : A l'expiration de son détachement ou en cas de remise à disposition de son administration d'origine en cours de détachement, le fonctionnaire est réaffecté dans l'emploi qu'il occupait avant son détachement ou dans un autre emploi, relevant de la même collectivité ou du même établissement public, que son grade lui donne vocation à occuper. (...) Lorsqu'aucun emploi n'est vacant, le fonctionnaire est pris en charge au besoin en surnombre par le centre de gestion compétent ou, à défaut d'affiliation, par la collectivité ou l'établissement concerné, dans les conditions prévues aux premiers et deuxièmes alinéas de l'article 97 de la présente loi. ; qu'aux termes de l'article 72 de la même loi : (...) les fonctionnaires mis en disponibilité, soit d'office en application de l'alinéa précédent, soit sur demande pour certaines raisons familiales (...) sont réintégrés à l'expiration de leur période de disponibilité dans les mêmes conditions que les fonctionnaires détachés. ; qu'aux termes de l'article 97 de ladite loi : (...) Si la collectivité ou l'établissement ne peut offrir un emploi correspondant à son grade, le fonctionnaire est pris en charge, au besoin en surnombre, selon le cas, par le centre de gestion compétent ou par la collectivité ou l'établissement concerné. Pendant cette période, l'intéressé reçoit sa rémunération principale. Le centre de gestion, la collectivité ou l'établissement lui propose tout emploi correspondant à son grade dont la création ou la vacance lui a été signalée (...). Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article. ;

Considérant, d'une part, que la circonstance que le décret en Conseil d'Etat mentionné à l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 n'avait pas été pris à la date de la décision attaquée, ne faisait pas obstacle à l'application immédiate des dispositions précitées de cet article ; que, d'autre part, il résulte de la combinaison desdites dispositions avec celles des articles 67 et 72 précités de la même loi, qu'à l'issue d'une période de disponibilité motivée par des nécessités d'ordre familial, le fonctionnaire à qui la collectivité n'est pas en mesure d'offrir un emploi correspondant à son grade doit, selon le cas, être réintégré en surnombre au sein de cette collectivité ou pris en charge par le centre de gestion compétent, et percevoir sa rémunération principale ;

Considérant, en premier lieu, que Mme X ayant demandé sa réintégration au terme d'une période de disponibilité et non avant l'expiration de celle-ci, le président du conseil général de la Mayenne ne pouvait prétendre faire application des dispositions de l'article 26 du décret du 13 janvier 1986 relatives à la situation des agents qui souhaitent interrompre une période de disponibilité ;

Considérant, en second lieu, que, Mme X ayant été placée en position de disponibilité pour des raisons familiales, dès lors qu'elle demandait sa réintégration au terme de la période de disponibilité, devait, par application des dispositions précitées de la loi du 26 janvier 1984, et à supposer qu'aucun emploi ne pouvait lui être offert par le département de la Mayenne, être réintégrée en surnombre dans les services de cette collectivité ou être prise en charge par le centre de gestion compétent ; que par suite, elle ne pouvait légalement être maintenue en position de disponibilité ; que dès lors, la décision contestée du président du conseil général de la Mayenne devait être annulée ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation du département de la Mayenne :

Considérant que la requérante se borne à demander réparation du préjudice qu'elle a réellement subi du fait de son maintien illégal en position de disponibilité ; que dès lors, la créance éventuelle de Mme X sur le département de la Mayenne ne trouvera son origine et ne pourra être liquidée avant l'intervention de l'arrêt par lequel la Cour fixera le montant des réparations dues à la requérante ; que, par suite, et en tout état de cause, la créance dont s'agit, qui n'est ni liquide ni exigible, n'est pas frappée, contrairement à ce que soutient le département de la Mayenne, par la prescription quadriennale ;

Considérant qu'en maintenant de manière illégale, ainsi qu'il a été dit, Mme X en position de disponibilité, le président du conseil général de la Mayenne a commis une faute de nature à engager la responsabilité de ce département ; que par suite la requérante est fondée à demander réparation du préjudice que lui a causé cette décision la privant de sa rémunération ; que toutefois les dispositions précitées de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 n'auraient permis à Mme X de prétendre, durant la période au cours de laquelle elle aurait été réintégrée en surnombre ou prise en charge par le centre de gestion compétent, qu'à sa rémunération principale ; qu'ainsi elle ne saurait demander réparation d'un préjudice tiré de la perte de rémunérations accessoires ; qu'il sera fait dès lors une exacte appréciation du préjudice subi par la requérante en condamnant le département de la Mayenne à lui payer la somme non contestée de 56 012,97 euros ; que Mme X a droit aux intérêts de cette somme à compter du 1er novembre 1999 ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation du département d'Ille-et-Vilaine :

Considérant que le président du conseil général d'Ille-et-Vilaine, qui s'est borné à intégrer la requérante dans les services de ce département à la suite de la mutation dont celle-ci avait fait l'objet, et à la rémunérer conformément au grade et à l'échelon qui étaient les siens, n'a ainsi commis aucune faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ; que par suite, les conclusions de Mme X tendant à la condamnation du département d'Ille-et-Vilaine à lui payer des dommages-intérêts ne pouvaient qu'être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le jugement susvisé du Tribunal administratif de Nantes doit être réformé en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme X tendant à l'annulation de la décision du président du conseil général de la Mayenne la maintenant en position de disponibilité et à la condamnation du département de la Mayenne à lui payer des dommages-intérêts ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions susmentionnées font obstacle à ce que le département d'Ille-et-Vilaine, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à Mme X la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le département de la Mayenne à verser à Mme X une somme de 1 000 euros en remboursement des frais de même nature qu'elle a supportés et de condamner Mme X à verser au département d'Ille-et-Vilaine une somme de 1 000 euros au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'arrêté susvisé du 3 avril 1986 du président du conseil général de la Mayenne est annulé.

Article 2 : Le département de la Mayenne est condamné à payer à Mme X la somme de 56 012,97 euros (cinquante six mille douze euros et quatre vingt dix sept centimes) avec intérêts au taux légal à compter du 1er novembre 1999.

Article 3 : Le surplus des conclusions de Mme X est rejeté.

Article 4 : Le jugement susvisé du 17 octobre 2002 du Tribunal administratif de Nantes est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le département de la Mayenne versera à Mme X une somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Mme X versera au département d'Ille-et-Vilaine une somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Les conclusions de Mme X et du département de la Mayenne tendant à la condamnation, respectivement, du département d'Ille-et-Vilaine et de Mme X au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme X, au département de la Mayenne, au département d'Ille-et-Vilaine et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

1

- 2 -


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4eme chambre
Numéro d'arrêt : 03NT00006
Date de la décision : 26/03/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEPLAT
Rapporteur ?: M. Xavier FAESSEL
Rapporteur public ?: M. MORNET
Avocat(s) : MEILLET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2004-03-26;03nt00006 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award