Vu le recours et le mémoire, enregistrés respectivement les 1er mars 2000 et 29 août 2000 au greffe de la Cour, présentés par le ministre de l'intérieur ;
Le ministre de l'intérieur demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 98-1673 du 2 décembre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a annulé la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le préfet de Loire-Atlantique sur la demande d'abrogation de son arrêté du 9 février 1990 limitant à la seule ville de Nantes la validité territoriale de l'autorisation de séjour accordée à M. , ensemble ledit arrêté en tant qu'il a été maintenu postérieurement à l'entrée en vigueur du traité sur l'union européenne du 7 février 1992 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. devant le Tribunal administratif de Nantes ;
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C CNIJ n° 335-01-04
n° 01-03-01-02
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le traité du 25 mars 1957 instituant la communauté économique européenne modifié ;
Vu la directive n° 64-221 CEE du Conseil du 25 février 1964 modifiée ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, modifiée ;
Vu le décret n° 46-448 du 18 mars 1946, modifié ;
Vu le décret n° 94-211 du 11 mars 1994 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2003 :
- le rapport de M. PÉANO, premier conseiller,
- et les conclusions de M. MORNET, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, pour annuler les décisions contestées au motif que les mesures de surveillance prévues par les dispositions de l'article 2 du décret n° 46-448 du 18 mars 1946, dans sa rédaction issue du décret du 26 décembre 1984, ne pouvaient pas être appliquées, par principe, à l'égard de M. qui a la qualité de citoyen de l'union européenne dès lors qu'elles ne sont pas applicables aux ressortissants français, le Tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur les stipulations de l'article 8 A ajouté au traité de Rome instituant la communauté européenne du 25 mars 1957 par l'article 6, C (titre II) du traité sur l'union européenne du 7 février 1992 ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier que les dispositions de l'article 8 A, devenu l'article 18 du traité CE, qui énonce de manière générale le droit, pour tout citoyen de l'union, de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres et ne s'applique que lorsque le traité ne prévoit pas de règle spécifique, ne trouvaient pas à s'appliquer en l'espèce dès lors que M. qui avait demandé en mai 1995 à revenir dans les Pyrénées-Atlantiques en joignant une proposition d'emploi, invoquait la liberté de circulation des travailleurs, spécifiquement protégée par l'article 48, devenu l'article 39 du traité CE ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort qu'en se fondant sur le motif susmentionné, le Tribunal administratif de Nantes a annulé les décisions contestées ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. tant devant le Tribunal administratif que devant la Cour administrative d'appel ;
Considérant qu'aux termes de l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, dont les dispositions sont applicables à toute décision administrative qui doit être motivée en vertu d'un texte législatif ou réglementaire ou d'une règle générale de procédure administrative : Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration des deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le préfet de Loire-Atlantique sur la demande d'abrogation de son arrêté du 9 février 1990 limitant à la seule ville de Nantes la validité territoriale de l'autorisation de séjour accordée à M. , est inopérant, dès lors qu'il n'est pas allégué que M. aurait demandé cette motivation ;
Considérant qu'il résulte de l'interprétation donnée par la Cour de justice dans l'arrêt rendu le 26 novembre 2002 dans l'affaire C-100/01, que ni l'article 48 du traité, ni les dispositions de droit dérivé qui mettent en oeuvre la liberté de circulation des travailleurs ne s'opposent à ce qu'un État membre prononce, à l'égard d'un travailleur migrant ressortissant d'un autre État membre, des mesures de police administrative limitant le droit de séjour de ce travailleur à une partie du territoire national à condition que des motifs d'ordre public ou de sécurité publique fondés sur son comportement individuel le justifient, que, en l'absence d'une telle possibilité, ces motifs ne puissent conduire, en raison de leur gravité, qu'à une mesure d'interdiction de séjour ou d'éloignement de l'ensemble du territoire national et que le comportement que l'État membre concerné vise à prévenir donne lieu, lorsqu'il est le fait de ses propres ressortissants, à des mesures répressives ou à d'autres mesures réelles et effectives destinées à le combattre ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que pour prendre à l'encontre de M. les décisions contestées, le préfet de Loire-Atlantique s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé s'est maintenu irrégulièrement plusieurs années sur le territoire national et avait, depuis 1995, enfreint les mesures administratives dont il avait fait l'objet et qu'il n'établissait pas avoir cessé d'entretenir des rapports avec des mouvements qui prônent le recours à la violence et au terrorisme ; que, d'une part, eu égard au comportement de M. , ce motif d'ordre public a pu en l'espèce légalement justifier les décisions contestées ; que, d'autre part, un tel comportement de la part d'un ressortissant français appellerait une action répressive à son égard ; qu'enfin, les mesures de police administrative concernant M. ont été adoptées de préférence à la seule alternative possible qui consistait en une interdiction totale du territoire national ;
Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être dit, M. n'établit pas que l'arrêté du 9 février 1990 limitant à la seule ville de Nantes la validité territoriale de l'autorisation de séjour que le préfet de Loire-Atlantique lui avait accordée soit devenu illégal en raison de changements de circonstances de droit ou de fait postérieurs à son édiction nonobstant l'entrée en vigueur du traité sur l'union européenne du 7 février 1992 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté du 9 février 1990 limitant à la seule ville de Nantes la validité territoriale de l'autorisation de séjour qui avait été accordée à M. et la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le préfet de Loire-Atlantique sur la demande d'abrogation dudit arrêté ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nantes du 2 décembre 1999 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. devant le Tribunal administratif de Nantes est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de M. tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales et à M. .
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