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15/05/2003 | FRANCE | N°99NT02359

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3eme chambre, 15 mai 2003, 99NT02359


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 septembre 1999, présentée pour M. Charlie X, demeurant ..., par Mes DAVY, PILLON et VALERY, avocats au barreau de Caen ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 98-1779 du 6 juillet 1999 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Caen à lui verser la somme de 1 000 000 F en réparation des conséquences dommageables de l'intervention chirurgicale pratiquée dans cet établissement le 28 février 1997 ;

2°)

de condamner le centre hospitalier universitaire de Caen à lui verser la somme de...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 septembre 1999, présentée pour M. Charlie X, demeurant ..., par Mes DAVY, PILLON et VALERY, avocats au barreau de Caen ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 98-1779 du 6 juillet 1999 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Caen à lui verser la somme de 1 000 000 F en réparation des conséquences dommageables de l'intervention chirurgicale pratiquée dans cet établissement le 28 février 1997 ;

2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Caen à lui verser la somme de 1 000 000 F ;

3°) d'ordonner avant dire droit une expertise médicale complé-mentaire ;

C CNIJ n° 60-02-01-01-01-01-04

4°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Caen à supporter les dépens et à lui verser la somme de 10 000 F au titre des frais exposés et non compris dans le dépens ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2003 :

- le rapport de M. GUALENI, premier conseiller,

- et les conclusions de M. MILLET, commissaire du gouvernement ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise ordonnée par le juge des référés du Tribunal administratif de Caen que M. X souffrait depuis 1990 de lombalgies chroniques avec aggra-vation par irradiation bilatérale ; que l'intéressé a été hospitalisé au centre hospitalier universitaire de Caen, pour y subir, le 28 février 1997, une intervention chirurgicale pour une hernie discale L4-L5 protrusive ; qu'au cours de cette intervention, une hémorragie est apparue en raison d'une plaie de l'artère et de la veine iliaques, immédiatement diagnostiquée ; que la survenance de cette hémorragie a justifié, après une tentative infructueuse de traitement par obstruction endo-vasculaire par ballonet, une intervention par voie abdominale qui a permis une reconstitution anatomique des vaisseaux lésés ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'inter-vention qui a été pratiquée était justifiée par l'état du patient et s'est traduite par l'emploi d'une technique opératoire classique au regard des données radio-logiques pré-opératoires ; qu'il résulte de l'instruction que la survenance d'une plaie de l'artère et de la veine iliaques en cours d'intervention qui présente un caractère exceptionnel peut survenir, en l'absence de toute maladresse de l'opérateur, lors de l'utilisation d'une pince comme, en l'espèce, pour réaliser une discectomie, en raison de conditions anatomiques individuelles imprévisibles en phase pré-opératoire ; que, dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le chirurgien, qui a prodigué des soins dans les règles de l'art, a commis une faute médicale de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Caen ;

Considérant, en deuxième lieu, que, lorsqu'un acte médical nécessaire au diagnostic ou au traitement du malade présente un risque dont l'existence est connue mais dont la réalisation est exceptionnelle et dont aucune raison ne permet de penser que le patient y soit particulièrement exposé, la responsabilité du service public hospitalier est engagée si l'exécution de cet acte est la cause directe de dommages sans rapport avec l'état initial du patient comme avec l'évolution prévisible de cet état, et présentant un caractère d'extrême gravité ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise qu'en l'absence d'hypoxie cérébrale au cours de l'intervention, il ne peut être établi de lien de causalité entre l'accident opératoire et les troubles divers dont se plaint M. X, qualifiés de subjectifs par l'expert, lequel relève un examen normal au plan neurologique et vasculaire à la date de l'expertise ; qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction que les autres consé-quences dommageables invoquées par M. X et tenant à l'importante cicatrice laissée par l'intervention par voie abdominale, les souffrances endurées durant son hospitalisation et les troubles dans les conditions d'existence liée à une invalidité reconnue par la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel présentent un caractère d'extrême gravité ; que, par suite, la responsabilité sans faute du centre hospitalier universitaire de Caen ne saurait être engagée ;

Considérant, toutefois, que, lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que, si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité, de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exception-nellement ne dispense pas les praticiens de leur obligation ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'une intervention comme celle que M. X a subie, même pratiquée dans les règles de l'art, présente un risque connu pouvant entraîner le décès du patient ; qu'eu égard à la gravité de ce risque les praticiens du centre hospitalier étaient tenus d'en informer M. X ; que le centre hospitalier, qui ne peut utilement faire état du caractère exceptionnel de ce type d'accident, ni des complications parfois engendrées chez certains patients à l'annonce d'un risque médical, ne conteste pas ne pas avoir informé l'intéressé des risques inhérents à ce type d'intervention ; que si ce défaut d'information a constitué une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Caen, il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que M. X souffrait d'une hernie discale L4-L5 diagnostiquée dès 1990, s'aggravant depuis lors, responsable d'une lombo-sciatique gauche chronique et invalidante qui rendait indispensable l'intervention chirurgicale pratiquée sur M. X ; qu'ainsi et en l'absence d'alternative thérapeutique moins risquée, la faute commise par l'établissement n'a pas entraîné, dans les circonstances de l'espèce, de perte de chance pour M. X de se soustraire aux risques d'invalidité ou de décès qui ne se sont, en définitive, pas réalisés ; qu'aucune indemni-sation n'est, par conséquent, due à ce titre ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ; que les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche ne peuvent qu'être rejetées par voie de conséquence ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que le centre hospitalier universitaire de Caen, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. X la somme que celui-ci réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner M. X à payer au centre hospitalier universitaire de Caen la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. Charlie X et les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier universitaire de Caen tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Charlie X, au centre hospitalier universitaire de Caen, à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche et au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 99NT02359
Date de la décision : 15/05/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. SALUDEN
Rapporteur ?: M. GUALENI
Rapporteur public ?: M. MILLET
Avocat(s) : VALERY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2003-05-15;99nt02359 ?
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