Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 2 octobre 2023 par lequel la préfète de l'Aube lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre à la préfète de l'Aube de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou, à titre subsidiaire, de l'article L. 423-23 du même code et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros, à verser à son conseil, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Par un jugement n° 2302621 du 22 février 2024, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande de M. A....
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée sous le n° 24NC00637 le 13 mars 2024, M. A..., représenté par Me Mainnevret, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy Châlons-en-Champagne du 22 février 2024 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 2 octobre 2023 par lequel la préfète de l'Aube lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre à la préfète de l'Aube de lui délivrer un titre de séjour ou subsidiairement de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour durant le réexamen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour méconnait l'article 47 du code civil et l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il dispose d'un passeport guinéen dont la validité n'a jamais été remise en question ; les documents qu'il a produit à l'appui de sa demande de titre de séjour établissent son identité ;
- il remplit les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-22 du code de l'entré et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il remplit les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; son comportement ne présente aucune menace à l'ordre public, ainsi que l'a jugé le tribunal ;
- l'obligation de quitter le territoire français est fondée sur une décision de refus de titre de séjour illégale ; elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale.
Par un mémoire en défense enregistré le 22 mai 2024, la préfète de l'Aube conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 juin 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Guidi, présidente, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant guinéen né le 14 mars 2004, est entré en France le 7 octobre 2018 selon ses déclarations et a été placé auprès des services de l'aide sociale à l'enfance par ordonnance de placement provisoire du 8 janvier 2019 puis par un jugement du tribunal pour enfants du 21 février 2019. Le 30 mars 2022, l'intéressé a sollicité son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 2 octobre 2023 la préfète de l'Aube a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 22 février 2024 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou s'il entre dans les prévisions de l'article L. 421-35, l'étranger qui a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance ou à un tiers digne de confiance au plus tard le jour de ses seize ans se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Cette carte est délivrée sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation qui lui a été prescrite, de la nature des liens de l'étranger avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil ou du tiers digne de confiance sur son insertion dans la société française ".
3. Si M. A... soutient qu'il était inscrit en certificat d'aptitude professionnelle boucherie dans le cadre duquel il était employé en qualité d'apprenti par la société Rif jusqu'en juin 2023, qu'il a été contraint d'arrêter son activité en l'absence de titre de séjour et que cette entreprise souhaite désormais l'embaucher en contrat à durée indéterminée, il est constant que, à la date de la décision de refus de séjour contestée le 2 octobre 2023, il ne justifiait plus être inscrit dans une formation. Dans ces conditions, alors qu'il ressort des pièces du dossier que la préfète de l'Aube aurait pris la même décision si elle ne s'était fondée que sur ce seul motif, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de séjour contestée méconnaît les dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. M. A... soutient qu'il réside depuis plus de cinq années en France, qu'il a suivi une formation qualifiante en boucherie lui permettant d'exercer un métier, qu'il dispose d'une promesse d'embauche en contrat à durée indéterminée de la part de l'entreprise au sein de laquelle il a effectué son apprentissage, qu'il ne dispose plus d'aucune attache familiale en Guinée où ses parents sont décédés et qu'il a développé d'importantes attaches sociales en France. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est célibataire et sans enfant. Si le requérant se prévaut du décès de ses parents, il ne l'établit pas en se bornant à produire des extraits d'acte de décès dépourvus de toute valeur probante, ainsi que l'ont relevé à juste titre les premiers juges. En outre, si l'intéressé se prévaut de son insertion sociale et professionnelle, il ne justifie pas, par les documents qu'il produit, disposer d'un emploi ni même d'une promesse d'embauche alors que l'administration verse au dossier un extrait du traitement des antécédents judiciaires mentionnant des faits de vol et de vol à l'étalage pour lesquels l'intéressé a été interpellé à deux reprises en 2021. Si le requérant soutient qu'il n'a fait l'objet d'aucune condamnation à raison de ces faits, il n'en conteste pas leur matérialité. Dans ces conditions, compte tenu de la durée et des conditions de son séjour en France, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que la décision portant refus de séjour en litige a porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise et que cette décision aurait été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 et 75-1 de la loi du 10 juillet 1991doivent également être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète de l'Aube.
Délibéré après l'audience du 10 juillet 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Wallerich, président de chambre,
- Mme Guidi, présidente-assesseure,
- M. Michel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 juillet 2025.
La rapporteure,
Signé : L. GuidiLe président,
Signé : M. Wallerich
La greffière,
Signé : I. Legrand
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
I. Legrand
N° 24NC00637 2